le Sénat peut-il basculer à gauche ?

 

Cette forteresse de droite imprenable depuis la cinquième république c’est à dire depuis grosso modo 60 ans peut-elle basculer à gauche ? Les victoires successives de la gauche aux élections régionales, départementales, municipales pourraient avoir comme conséquence en septembre 2011 aux élections sénatoriales un changement de majorité au Palais du Luxembourg, et cela à quelques mois de l’élection présidentielle. Un scénario catastrophe pour Nicolas Sarkozy mais oh ! Combien souhaitable. Les Sénateurs ont un mode d’élection particulier et complexe par suffrage universel indirect, ils sont élus par ce que l’on appelle les Grands Électeurs. Le Sénat est la représentation des collectivités territoriales de la plus peuplée à la moins peuplée. La Haute Assemblée est composée actuellement de 343 sénateurs et en 2011 elle est prévue de 348 sénateurs.

* 326 seront élus dans les départements de métropole et d’outre-mer
* 2 en Polynésie française
* 1 dans les iles Wallis et Futuna
* 1 à Saint-Barthélemy
* 1 à Saint-Martin
* 2 en Nouvelle Calédonie
* 2 à Mayotte
* 1 à Saint-Pierre-et-Miquelon
* 12 représentent les Français de l’étranger.

Les sénateurs sont élus pour 6 ans avant la réforme de juillet 2003 ils étaient élus pour 9 ans. Le renouvellement partiel du Sénat continuera d’être triennal, tous les 3 ans, mais portera désormais chaque fois sur la moitié des sièges. Les sénateurs sont élus dans chaque département par un collège électoral composé des députés, des conseillers régionaux, des conseillers généraux et des délégués des conseils municipaux. Au total, environ 150 000 «Grands Électeurs» participent à l’élection des sénateurs, 577 députés, 1 880 conseillers régionaux, 4 037 conseillers généraux, environ 142 000 délégués des conseils municipaux.

Dans ce contexte, l’appartenance politique n’est pas seule en compte compte tenu de la surreprésentation, dans le collège électoral des sénateurs des élus des petites communes rurales La moitié des grands électeurs sont «sans étiquette» et ils sont extrêmement sensibles au contexte politique. En 2008, les inquiétudes sur l’avenir des services publics, en pleine réforme de la carte administrative, judiciaire, militaire et sanitaire, avaient fortement pesé sur leur vote. Le PS, qui misait sur le gain d’une douzaine de sièges, en avait conquis 21. L’UMP espère bien inverser la tendance d’ici à 2011.

A droite comme à gauche, chacun a commencé à faire ses calculs. Actuellement, sur un effectif de 343 sénateurs, ce qui place la barre majoritaire à 172, la gauche peut compter sur un socle stable de 153 voix, 116 du groupe socialiste, 24 du groupe Communiste, républicain et citoyen (CRC) et 13 des 16 membres du Rassemblement démocratique et social européen (RDSE).Pour que la majorité bascule en 2011, alors que le nombre de sièges aura été porté à 348, la gauche doit, par conséquent, en gagner 22.

Sur le papier, la mission n’est pas impossible. Les gains réalisés par la gauche en 2008 dans les départements et les villes, + 112 villes de plus de 10 000 habitants, ont consacré son influence dominante dans les territoires. Six Français sur dix vivent dans une municipalité administrée par la gauche. Pour la première fois, le nombre total de communes de plus de 3 500 habitants gérées par la gauche est supérieur à celui de celles détenues par la droite.

C’est donc une chance pour la gauche qui ne se renouvellera pas de sitôt. Les élections sénatoriales sont plus techniques que politiques, ce n’est pas une affaire d’arithmétique, c’est une élection de proximité et l’expérience des responsabilités exécutives est un atout majeur. Le problème des alliances à gauche rend difficile une majorité cohérente avec les Verts. Les Verts, qui comptent actuellement cinq sénateurs, rattachés au groupe socialiste, revendiquent une représentation parlementaire plus conforme à leur poids électoral. «Mettre comme préalable la volonté d’avoir un groupe de 15 membres au Sénat, ce n’est pas raisonnable, prévient M. Jean-Pierre Bel président du groupe socialiste. Nous n’avons pas de volonté hégémonique, mais il faut examiner les situations concrètement, au cas par cas». Le Monde du 27 mai 2010.

L’élection je jouera dans un mouchoir, M. Bel insiste, «nous ne sommes pas les favoris, nous sommes plutôt les challengers». La situation qui se dégagera à l’issue des élections sénatoriales, dernière marche avant l’élection présidentielle, n’en constitue pas moins un enjeu politique de taille. M. Bertrand le dit sans détour, «nous n’avons pas l’intention de laisser les clés du Luxembourg au PS». Il faudra bien un jour que cela arrive.