Le Conseil Constitutionnel a rejeté les comptes de campagne 2012 du candidat UMP. Cette fois les mots ne sont pas assez durs contre cette institution de la part de l’UMP et des amis de l’ancien Président . C’est donc bien « haro sur le Conseil Constitutionnel ». On n’en est pas encore à réclamer sa suppression, mais on dénonce son impartialité. Nicolas Sarkozy fustige lui-même la décision du Conseil et s’inquiète surtout des conséquences financières pour son parti, lui qui s’était mis en « réserve » et qui rêvait sans doute de se représenter au prochain tour… le voilà qui, non seulement, a perdu l’élection, mais qui laisse en plus exsangue son parti !
Le Conseil Constitutionnel aurait eu tort de constater que le candidat Sarkozy a dépassé le plafond des dépenses autorisées aux présidentielles. Il aurait fait preuve d’impartialité selon les partisans de l’UMP. Or, que je me souvienne, lorsqu’ils étaient au pouvoir les décisions du Conseil de rejeter des recours de l’opposition leur paraissait tout-à-fait normales et ils se gardaient bien de les critiquer.
Pourtant, on ne peut pas dire qu’il y ait une majorité de gauche au Conseil Constitutionnel, au contraire, sur neuf membres, deux seulement ont été nommés par le président actuel et un par le président actuel de l’assemblée.
Rappelons que cette institution veille à la régularité des élections nationales et des référendums et qu’elle se prononce sur la conformité à la Constitution des lois et de certains règlements dont elle est saisi. Elle intervient également dans certaines circonstances de la vie parlementaire et publique.
Dans la présente affaire, le Conseil Constitutionnel n’a donc fait que son devoir. Les Sages ayant bien pris soin de préciser que « la législation n’a pas pour objet de limiter les déplacements ou manifestations du président en exercice mais que ceux ayant « un caractère manifestement électoral » doivent être déclarés.
L’ancien président a parlé « d’un principe nouveau mis en œuvre par le Conseil Constitutionnel », or, en réalité il ne pouvait faire autrement que confirmer els constatations de la commission (CNCCFP) qui a épluché les comptes de campagne. c’est cette Commission qui a décidé le 21 décembre 2012, que Nicolas Sarkozy et l’UMP avaient dépassé le plafond de dépenses ouvrant droit à remboursement.
Est-ce bien raisonnable dans ces conditions de crier « haro » sur le Conseil Constitutionnel ?
Qu’aurait-on dit si le Conseil n’avait pas été dans le même sens ? (Encore une magouille de la justice, etc… la justice n’est pas la même pour tous, etc.. )
Il faut bien reconnaître cependant que dans le camp de ceux qui crient à l’impartialité, l’ex Premier ministre Alain Juppé s’est distingué en refusant de commenter la décision du Conseil. «Le Conseil constitutionnel est la plus haute juridiction de notre pays et ses décisions s’imposent à tous», a-t-il dit… Puisse-t-il être entendu par ceux qui contestent les juridictions quand elles ne décident pas en leur faveur !
Cette décision du Conseil, semble inédite sous la V ème République, faut-il pour autant en profiter pour argumenter contre elle ? A u nom de quoi peut-on parler de « partialité » ?
Si, on écoute le précieux soutien de Sarkozy, Brice Hortefeux, ce serait « le Président du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré qui aurait voulu « mettre des bâtons dans les roues du précédent chef de l’Etat ». Il va même plus loin en voyant dans la décision « la main des socialistes », à cause de la nomination de trois membres du Conseil par le Président actuel. On se demande bien s’il a un problème d’arithmétique ou s’il a tendance à voir « le complot permanent des socialistes » ? Qui peut croire à ces arguments ?
Lors d’une conférence de presse en Tunisie, François Hollande a insisté sur le respect qu’il faut avoir des décisions prises par le Conseil Constitutionnel, en déclarant : « Le Conseil constitutionnel doit être respecté, pleinement respecté, entièrement respecté et personne ne peut suspecter, mettre en cause cette institution, sans alors mettre en cause l’ensemble des institutions »… « le Conseil constitutionnel est une institution de la République qui, par son indépendance, règle des questions qui sont de sa seule autorité »… Jusqu’à maintenant, ce n’était même pas la peine de le préciser. Mais maintenant que certains crient « haro » sur le Conseil, cela devient indispensable » !
Il y a aussi ceux qui trouvent que la décision est exagérée et que la sanction aurait dû être minime, voire insignifiante. Mais que serait cette justice qui ne sanctionnerait pas les grands, mais seulement les petits ? Il y a eu d’autres personnalités (députés maires, etc…) qui ont été sanctionnées pour des irrégularités de campagne et qui en plus ont écopé d’un temps d’inégibilité !
La garde des sceaux, Christiane Taubira, a eu des mots très juste pour défendre le Conseil. Elle s’est dite « surprise » par les attaques de Nicolas Sarkozy contre le Conseil constitutionnel et a précisé : « La contestation des décisions du Conseil constitutionnel participe d’une défiance à l’encontre de nos institutions, privilège délétère réservé aux puissants, qui subissent moins que les citoyens ordinaires les effets de (l’)affaiblissement de nos institutions », avant d’ajouter : « La contestation de ces décisions contribue à l’affaissement de l’Etat de droit »… Elle a encore argumenté : « Aussi désagréable que soit une décision, son acceptation fait appel à l’esprit civique et au sens de la responsabilité, et réclame un effort de dignité au nom de l’intérêt général ». A ceux qui, dans l’opposition l’aurait oublié, elle a rappelé que « le gouvernement s’est incliné devant toutes les réserves d’interprétation et censures de dispositions législatives prononcées par le Conseil constitutionnel depuis un an" (faisant allusion à la taxe à 75%).
De quoi , faire méditer ces politiques qui ont oublié « le sens de l’Etat et de l’intérêt général » !
Sources : Le Figaro, Le Monde, Libération, Le JDD,Europe 1
Photo : capture d’image sur le site lemondepolitique.free