"Une guerre est juste quand elle est nécessaire", écrivait Machiavel dans Le Prince. Nécessaire, la guerre que se livrent les opérateurs l’est-elle vraiment ? Ça dépend beaucoup de ce dont on parle. Pour le porte-monnaie, plutôt oui, puisqu’il semblerait qu’elle contribue à faire baisser les prix. Pour la qualité du service, en revanche, on repassera.
Dans cette affaire, les belligérants sont connus. Si tout avait commencé par une entente illicite entre les trois opérateurs historiques, Bouygues Telecom, Orange et SFR, l’Autorité de la concurrence ne tarde pas à épingler ce petit arrangement, et à casser cette troïka en laissant entrer un quatrième acteur dans le game : Free. La filiale du groupe Iliad, emmenée par le franc tireur Xavier Niel, ne va dès lors en faire qu’à sa tête, brisant les prix à coups de massue. Jusqu’à son annonce coup de poing, climax d’une stratégie offensive, courant décembre : la 4G pour tous, au même prix que la 3G. Hop.
L’annonce désarçonne la concurrence, qui réplique plus ou moins intelligemment dans les colonnes des journaux, Stéphane Richard, PDG d’Orange, allant même jusqu’à qualifier Niel de "roi de l’embrouille" dans le cadre d’un entretien livré au Figaro. Mais les bisbilles prennent aussi corps sur le plan commercial. Dans la foulée, Bouygues, SFR et Orange annoncent tour à tour des baisses de prix sur leurs forfaits, pour ne pas se laisser distancer par Free.
Cette stratégie de l’effondrement des prix fait des heureux chez les clients, qui jouissent d’une augmentation de leur pouvoir d’achat. Les opérateurs font quant à eux grise mine, arguant que cet engrenage est avant tout destructeur d’emplois. C’est vrai dans leur branche, dont les marges baissent, le CA du secteur ayant chuté de 12% dans les 5 plus grands pays européens ces cinq dernières années. C’est moins vrai dans d’autres branches, qui bénéficient du transfert de cette portion de pouvoir d’achat.
Malgré tout, les consommateurs auraient tort de croire que cette escalade dans le discount ne les lèse pas d’une façon ou d’une autre. Yves Gassot, directeur du think tank Idate (Institut de l’audiovisuel et des télécommunications en Europe), livre son analyse pour le Nouvel Observateur : "Elle (la guerre des prix, ndlr) risque avant tout de faire un blessé : le consommateur. Il a beaucoup gagné de la concurrence entre opérateurs, qui a fait baisser les prix. Mais la guerre des prix contraint leur capacité d’investissement et d’innovation et in fine pourrait freiner la montée en débit et en qualité de l’internet mobile en France et en Europe."
Même constat pour Antoine Autier, de l’UFC-Que Chosir, selon lequel le consommateur doit rester sur ses gardes. Concernant la 4G, par exemple, vendue comme la panacée, alors qu’elle n’est déployée que de façon parcellaire sur le territoire. "Et même dans les zones couvertes, la qualité du signal peut varier du simple au double selon le type d’antenne-relais !" prévient Antoine Autier. De quoi relativiser les offres de Free, par exemple, et regretter que la surenchère médiatique des 3 + 1 se fasse au détriment du déploiement du réseau et de l’innovation.
excellente chose pour nous ! Les entreprises des pays dont le prix des communications sont plus faibles que celles qui sont pratiquées en France enregistrent des résultats financiers bien meilleurs avec moins de personnels et qui plus est mieux payés que ceux de nos hexagonaux