Je peux vous dire que les femmes agricultrices sont des « pionnières » et des « innovatrices », par contraste avec la majorité. En effet, j’observe l’émergence d’un potentiel des femmes « actrices ». Les femmes agricultrices ont un niveau d’instruction plus élevé; elles écoutent;elles regardent; elles lisent plus de masse média;elles participent plus aux institutions sociales et aux associations; elles ont plus de facultés d’empathie et des aspirations plus élevées; elles sont plus ouvertes au changement en général,elles sont capables d’une grande mobilité géographique et ont une grande capacité d’adaptation aux situations diverses.Toutes ces caractéristiques nous permettent d’etres informées et plus « ouvertes » que les « autres ».
Les femmes agricultrices ont un savoir-faire ancien. Les agricultrices se servent de leurs acquis dans le domaine de l’élevage et de la transformation.Les femmes s’occupent depuis toujours des activités qu’elles développent aujourd’hui. Elles savent déjà gérer un élevage, transformer des volailles, faire du fromage…Partout en France, ce sont les femmes qui s’occupent de l’élevage, transforment les produits et les écoulent sur le marché. Production et transformation ne s’effectuent pas sur les mêmes produits selon les régions, mais elles se réalisent souvent de façon artisanale dans chaque exploitation. Bien que les travaux des champs et plus généralement l’ensemble des travaux agricoles soient de plus en plus assistés de machines et requièrent de moins en moins de forces, le critère de la capacité physique est encore explicitement ou implicitement à la base de la répartition actuelle des tâches sur l’exploitation. C’est bien dans la mesure où l’homme est amené à travailler en priorité aux travaux de foorce qui se font dehors (travaux des champs, ensilage, alimentation du gros bétail…) que le femme va se voir réserver toutes les tâches moins « pénibles » (traite, petit élevage, comptabilité…) qui se déroulent dans et à proximité de la maison. L’« Intérieur », c’est à dire la maison et son extension vers l’étable et la basse-cour, est le domaine de la femme, tandis que les champs constituent le « dehors » réservé à l’homme. « traditionnellement, c’étaient les femmes qui élevaient la volaille pour avoir des liquidités pour aller au marché, donc je pense qu’il y a une tradition qui s’est héritée… ».Quand j’ai lancé la diversification, je commençais à connaître un petit peu l’élevage. Je peux parler aux gens de l’alimentation…et c’est vrai que ça m’aide surtout maintenant pour l’accueil à la ferme pour parler aux gens… c’est vrai que c’est important de bien connaître l’élevage avant de faire la diversification, je crois que c’est très important . Il faut être crédible quand on fait des choses comme ça.
Les femmes se servent également des savoirs-faire « typiquement » féminins inculqués dés l’enfance au sexe « faible » par le processus de socialisation : travail domestique, soin des enfants, préparation des repas, l’accueil des invités…en découle l’habitude du quotidien, la persévérance, le savoir culinaire, le sens de l’hospitalité , la patience…Par exemple, les normes et les priorités de soins aux autres sont construites socialement et varient fortement en fonction du genre. Traditionnellement, on attend des femmes qu’elles soient plus altruistes envers leur famille que les hommes et on les encourage dans ce sens.Les femmes qui ont en charge totalement une production, un atelier en assument également toutes les relations avec l’extérieur. Elles décident seules, elles discutent seules avec le technicien( ET OUI Messieurs!) Les femmes sont très attachées à leur rôle de relation avec l’extérieur, c’est pour elles la preuve de leur professionnalisme. Elles peuvent mesurer à l’étendue et à l’intensité de leur réseau extérieur leur intégration professionnelle.Les agricultrices utilisent leur expérience dans le secteur de la gestion-administration de l’exploitation pour avoir une meilleure vsion de l’avenir et du choix de développement : financièrement elles sont plus à même de savoir « ce qui marche ».
Auparavant, les exploitations étaient l’affaire d’un couple, le travail était suffisamment important pour que la femme puisse, grâce à sa participation aux travaux, discuter, s’informer et finalement peser sur la décision. Plus tard, après l’industrialisation de l’agriculture, la femme est de plus en plus écartée des décisions lors des choix de gestion de l’entreprise notamment par la pression croissante des organismes extérieurs (conseillers de gestion, banque…).La prise en charge par les femmes de la comptabilité en tant que travail d’intérieur peut être considérée comme un acquis de l’agriculture moderne. Les femmes sont prêtes à consacrer beaucoup de temps dans ce domaine car elles trouvent cette activité très intéressante et très instructive, voire même passionnante pour ma part. Si une véritable comptabilité-gestion demande du temps aux femmes, elle réclame aussi de façon impérative la collaboration de leur mari. Lorsque cette collaboration est acquise, il semble alors que l’investissement de la femme dans cette activitéepuisse entraîner de grands bouleversements sur l’exploitation. J’en suis un exemple : ainsi après avoir géré durant plusieurs années la comptabilité de l’exploitation, j’ai entraîné mon mari hors des productions traditionnelles locales dans lesquelles il se cantonnait, vers des créneaux nouveaux plus rentables (tourisme rural, accueil à la ferme, développement et transformation de petit élevage…).
Les femmes ne pensent pas qu’enregistrer, remplir des formulaires ou assurer la trésorerie soient des activités intéressantes en elles-mêmes. Mais calculer des marges, le rapport des différentes productions, la combinaison de différents ateliers, permet d’orienter la production et l’avenir de l’exploitation. C’est ce qui me motive profondément dans cette responsabilité. Par ce moyen, je peux exercer mon contrôle. Les femmes agricultrices par cette pratique ont acquis un certain recul et une meilleure maîtrise de la situation.
[b]Comment les femmes d’agriculteurs peuvent-elles se faire entendre des institutions? le font-elles déjà et si oui comment.
Mais ce sera peut-être un sujet qui sera abordé un peu plus tard.
Belle série d’articles![/b]
Bonsoir [b]JEANNE[/b]
Voilà une chronique intéressante et fort bien écrite, qui restaure avec élégance et passion l’importance d’un métier éprouvant, trop souvent déconsidéré ou ignoré. On se demande pourquoi d’ailleurs, eu égard au rôle considérable des agriculteurs-trices dans la marche des siècles ?
C’est en souriant que j’ai parcouru le court parallèle que vous faites entre les agricultrices, et une profusion d’actrices qui souvent courent après un talent à défaut d’en être littéralement dépourvues.
A contrario, les agricultrices n’ont pas le temps d’entretenir l’illusion et leur talent est considérable.
Merci beaucoup JEANNE pour cette corbeille de fraîcheurs qui fleurent bon le terroir 😉
Bonjour,
Moi aussi j’aurais bien aimé exercer le métier d’agricultrice. Je suis née dedans. Mais d’autres personnes en ont décidées autrement : Bien lire le lien suivant.
http://les-coulisses-de-l-agriculture.over-blog.com/pages/Combat_dun_agriculteur_contre_la_DDAF_de_lIndre_et_le_ministere_de_lagriculture-2519874.html