Les voyages forment la jeunesse, c’est bien connu. Plus on visite de pays aux cultures différentes et plus on devient tolérant à des usages pouvant paraître saugrenus au premier abord. Parcourir le globe est une chance unique pour apprendre des choses qui ne sont pas consignées dans les livres, vivre des expériences non transposables par écrit. L’Europe est capable du pire comme du meilleur et dans le meilleur, il y a le fameux programme Erasmus. Cependant, le meilleur a tendance à disparaître le premier et de ce fait, l’aventure Erasmus prend l’eau. 

 

Ce programme d’échanges universitaires, rendu célèbre grâce au succès de film l’auberge espagnole de Cedric Klapisch, connait une passe financière très compliquée et risquerait de péricliter. L’avenir du programme portant le nom du fameux Humaniste néerlandais n’est pas brillant car il dépend de la Commission européenne dont le budget est sujet à caution. En effet, pour trouver de l’argent, le nerf de toute chose, elle doit négocier avec les pays de l’Union. Cette année, c’est une rallonge de 8,9 milliards d’euros qui doit être trouvée pour assurer la pérennité du projet. Une opération périlleuse dans ce contexte de crise où les états perdent autant de lettres qu’ils en égarent leur alphabet. 

 

En tant normal, la Commission nécessite 132,7 milliards d’euros, soit 1% du budget de l’Europe, pour fonctionner correctement, c’est à dire financer différents programmes comme l’Erasmus. Ce dernier coûte à lui  seul près d’un milliard d’euros. Actuellement, les états ne conçoivent lui donner que 129 milliards, ce qui signifie, après un calcul savant, un manque de 3,7 milliards. A cela s’ajoute les 5 milliards d’euros au titre des arriérés de paiement de l’année 2011. Erasmus, c’est beau, c’est humaniste, ça permet de brasser allègrement les cultures entre les futurs directeurs, cadres, acteurs professionnels du continent, ça donne des bases pour mieux se comprendre et ainsi éviter des conflits meurtriers mais cela coûte cher, très cher.

 

Malgré tout, il semblerait que les bourses des étudiants partis suivre des cours loin de chez eux soient sauvées pour l’année 2012, mais les vraies difficultés pourraient subvenir en 2013. Ces bourses sont une nécessité absolue pour subvenir a tous les besoins tels que payer son loyer, payer les cours, s’équiper,  régler les abonnements en tous genres, se sustenter et, quand cela le permet, s’amuser. Si un jour, elles connaissaient des coupes, de plus en plus de jeunes en viendraient à demander de l’aide à leurs parents, et par conséquent, cela favoriserait les plus nantis. Un fossé risquant de s’approfondir d’avantage selon la nationalité des étudiants. L’écart de richesse entre les pays combiné à la diminution, voire la surpression, des bourses, rendrait accessible le programme qu’aux étudiants riches des pays "riches". 

 

La France est une ardente défenseur du programme et souhaite le développer de plus belle, une ambition paradoxale avec la situation actuelle. Elle souhaite rendre Erasmus possible à un plus grand nombre d’étudiants, et notamment les plus modestes. Toutefois, la France agit de façon schizophrénique en continuant à s’opposer au financement du budget de la Commission pour 2013, tout comme ses voisins britanniques, allemands, finlandais, suédois, néerlandais et autrichiens.

 

Concrètement, Erasmus fonctionne selon le schéma comme suit, tout d’abord, le Parlement européen vote les fonds et la Commission, dotée d’une enveloppe, distribue l’argent proportionnellement aux organismes nationaux des 33 pays organisateurs, c’est à dire les 27 de l’UE, le Croatie, l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège, la Suisse et la Turquie. Ils reversent à leur tour l’argent à des universités partenaires. En France, c’est l’Agence Europe Éducation Formation France (2EDF) qui est chargée de gérer le budget. L’Erasmus est intégré dans le programme européen d’Éducation et de Formation tout au long de la Vie (EFTLV) dont le budget 2007-2013 était fixé à 7 milliards d’euros.

 

Pour éviter que le programme soit une énième victime collatérale de l’appétit budgétivore des banques qu’il faut sans cesse rembourser à des taux usuriers, une campagne publicitaire est diffusée sur les chaînes de télévision anglaises et sur internet. Il faut sauver "l’esprit Erasmus", celui qui depuis 25 ans a permis à 3 millions des personnes, dont 400.000 français, de vivre une aventure humaine unique en son genre.

 

Bien plus que de proposer des cours et/ou des stages en entreprise ou dans des organisations pour une durée allant de 3 mois a 1 an, Erasmus a fait naître des unions. Des couples se sont formés, des mariages ont été prononcés et des bébés sont nés, le programme a rapproché les européens comme aucune autre opération ne l’avait jamais fait auparavant. Il est donc vital qu’il puisse continuer à exister bon gré, mal gré.