Cet article est une mise à jour du précédent (Ennahda minoritaire en Tunisie), après la publication des résultats « provisoirement définitifs » de l’élection du 23 octobre 2011. Sur le même sujet, on lira également l’article « Ils ont voté et puis après ? » de vieilleforge, qui apporte d’intéressantes précisions sur le plan économique.
La répartition des 217 sièges désormais tous officiellement pourvus (avec beaucoup d’avance par rapport au retard prévu…) ne change en rien l’analyse faite précédemment : si, avec ses 90 sièges, Ennahda jouit bien d’une majorité relative, l’émergence d’une majorité absolue ne peut s’envisager sans qu’une alliance se réalise réunissant a minima le CPR de Moncef Marzouki (30 sièges) ; le ralliement d’Ettakol (Forum démocratique pour le travail et les libertés) de Mustapha Ben Jamaar (21 sièges) engendrerait une coalition moins fragile.
Si les résultats ont été qualifiés plus haut de « provisoirement définitifs », c’est en raison de l’invalidation de certains sièges d’abord attribués à Aridha Chaabia (Pétition populaire pour la liberté, la justice et le développement) dirigée par le sulfureux Mohamed Hechmi Hamdi.
Dans un premier temps, l’ISIE a annoncé cette invalidation dans six circonscriptions : Jendouba, Kasserine, Sfax 1, Sidi Bou Zid, Tataouine, ainsi que la circonscription « France 2 » des Tunisiens de l’étranger (au motif, pour cette dernière, que sa tête de liste appartenait en fait au RCD…). Selon l’hypothèse avancée dans l’article précédent, l’annulation des votes s’est simplement traduite par le fait de les considérer comme nuls et de réaffecter arithmétiquement les sièges correspondants selon les règles de la répartition proportionnelle (attribution directe, puis au plus fort reste). Cette mécanique a bénéficié deux fois au PDP (Parti Démocrate Progressiste) dans les circonscriptions de Tataouine et France 2, deux fois aussi à Ennahda (Jendouba et Sfax 1), une fois au CPR (Congrès pour la République) et à deux listes indépendantes dans la circonscription de Sidi Bou Zid (une ville dont sont originaires -ironie de l’histoire,- Mohamed Hechmi Hamdi lui-même … et aussi Mohamed Bouazizi, martyr historique de la révolution de jasmin !).
Faute de comprendre les explications avancées par l’ISIE lors de sa conférence de presse tenue hier soir, le motif de la décision dans les cinq autres circonscriptions n’apparait pas clairement. En effet, s’il s’agissait des violations de la législation relative aux élections déjà évoquées (pour utilisation partisane et partiale d’une chaîne de télévision privée), on comprendrait mal qu’il n’ait pas aussi été retenu dans les 18 autres circonscriptions où Al Aridha avait cumulé 19 sièges.
Pourtant, il serait inutile de tenter de percer ce mystère car, coup de théâtre inattendu, le retrait de ces 19 élus résiduels de la Pétition Populaire de leurs sièges à l’Assemblée Constituante vient d’être annoncé par le leader du mouvement. Ce geste pourrait être traité comme autant de démissions, à moins que les motifs de l’invalidation dans les cinq circonscriptions domestiques soient considérés finalement comme génériques et étendus aux 18 autres.
Les scènes d’émeutes auxquelles ces tergiversations ont donné lieu à Sidi Bou Zid, puis à Sfax, pèseront probablement d’un poids décisif dans la décision qui sera finalement rendue. Mais, quelle que soit l’issue de ce mélodrame, l’arithmétique de la nouvelle assemblée n’en sera pas fondamentalement modifiée : Ennahda n’y aura toujours qu’une majorité relative et Messieurs Marzouki et Ben Jafaar sont placés au pied du mur des priorités respectives qu’ils accordent à leurs ambitions, d’une part et à leurs convictions, de l’autre.
J’allais oublier un détail : 49 des élus à la nouvelle assemblée, soit près d’un quart, sont des femmes ; une proportion qui doit provoquer des jalousies, place de la Concorde !…
À la libération et durant de nombreuses années, le Partie Communiste Français était un parti puissant. Quel est-il aujourd’hui ?
Le Ennahda est sur la même voie. Quand il ne fera plus rêver, on l’oublira. C’est bien qu’il gouverne…
A propos de l’attitude et des choix de Moncef Marzouki, les lecteurs intéressés pourront utilement se reporter à son interview publiée par MEDIAPART ([url]http://www.mediapart.fr/journal/international/031111/moncef-marzouki-la-tunisie-est-capable-d-etre-gouvernee-par-des-moderes[/url])
Un extrait significatif de cet entretien :
[quote]Islamiste ne veut pas dire terroriste, il y a un spectre extrêmement large de l’islamisme qui va d’Erdogan en Turquie aux talibans. En Tunisie, l’islamisme est un mouvement conservateur de droite avec une connotation religieuse. J’ai essayé alors d’expliquer d’autres lois, comme celle de l’osmose, c’est-à-dire la dynamique qui a fait que dans les années 1970 et 1980, les deux groupes, les laïcs de gauche nationalistes et les islamistes, se sont pour partie rapprochés.
Des laïcs se sont rapprochés de l’islam, sans pour autant abandonner leurs conceptions de la politique, et des islamistes se sont littéralement convertis à la démocratie et aux droits de l’homme. Cette osmose est complètement méconnue par les Français, qui en sont restés à des schémas stéréotypés, ce qui les a empêchés de comprendre et de prévoir les révolutions arabes.
J’ai l’impression que les amis français, car je me définis toujours comme un francophone et un francophile, sont en train de passer tout à fait à côté de ce qui arrive dans le monde arabe, et cela me fait mal au cœur. Les Anglo-Saxons sont beaucoup plus pragmatiques, et avec eux, on peut discuter.
Avec les Français, parfois, les bras m’en tombent, et je me dis qu’ils sont vraiment prisonniers de leurs schémas mentaux, ne comprennent rien à rien dès qu’il s’agit du monde arabe, et vont tout louper. Parce que si l’on part du principe que c’est l’islamisme qui a triomphé en Tunisie, je dis non ! Il y a 60% de Tunisiens qui n’ont pas voté pour Ennahda. Il ne faut pas oublier que le CPR défend l’État civil, les droits de l’homme, les droits de la femme, et qu’il est partie prenante du gouvernement. Et nous serons des sentinelles absolument intraitables sur ces questions. Le monde arabe est en train de se transformer, et il va falloir se bouger un peu pour suivre ce qui se passe. [/quote]
Qui va d’Erdogan!!!!????
Erdogan (premier ministre turc) a déclaré en 1999 : [b]«Les minarets sont nos baïonnettes, les coupoles nos casques, les mosquées nos casernes et les croyants nos soldats.».[/b]
[b] »Nous vous conquerrons par vos valeurs démocratiques, nous vous dominerons par nos valeurs musulmanes. » Recep Erdogan
« On ne peut pas être musulman et laïque à la fois. » Recep Erdogan
[/b]
[b]Ennahda s’attaque aux mères célibataires[/b]
…A la radio Monte Carlo Doualiya qui émet en langue arabe, le discours semble beaucoup plus conservateur et régressif sur le statut des femmes qui ont eu un enfant hors mariage : «les mères célibataires ne devraient pas aspirer à un cadre légal qui protège leurs droits» et que les [u]«mères célibataires étaient une infamie»[/u] tout en ajoutant qu’elle avait honte pour la Tunisie par rapport aux autres pays du monde arabe.
Les réactions à de tels propos contre celle supposée illustrer la tendance moderniste d’Ennadha ont tout de suite été relayées sur la toile via des remarques acerbes et une descente en règle de la nouvelle députée. Quelques femmes tunisiennes ont aussi exprimé leur désapprobation (…)
Slate.fr
Le Maroc, de la « révolution tranquille » au laboratoire islamiste :
quelque logiciel de gestion de laboratoire serait bien utile !!!!!
Epuisé !