Noyé parmi les tonnes de salive que l’affaire a d’ores et déjà fait couler (et parmi les tonnes d’encre qu’elle va libérer dans les prochaines semaines), la minuscule goutte d’eau du présent billet ne risque pas de provoquer des débordements catastrophiques. Une raison suffisante (sinon nécessaire) pour ne pas l’autocensurer.  

Je me garderai bien d’exprimer la moindre opinion définitive quant au fond : n’est-ce pas cela que l’on nomme présomption d’innocence dans un sens et victime présumée dans l’autre ?

Mais il y a une autre raison à cela : c’est que très sincèrement j’éprouve les plus grandes difficultés à en avoir une… En effet, de deux choses l’une : où bien les faits allégués ne sont pas avérés et nous vivons une erreur judiciaire, ou bien ils le sont et c’est alors beaucoup, beaucoup plus grave, sur toute une série de plans.

Comme vous peut-être, j’ai été frappé par la subite apparition dans les médias, en particulier le nôtre, de vidéos « édifiantes ». Sur C4N, c’était celle de l’émission de Thierry Ardisson diffusée en 2007 et relatant un fait divers survenu cinq ans auparavant ; l’auteur de l’article précisait qu’il s’agissait d’un document « qui pourtant n’a pas fait le buzz à mon grand étonnement ».

On ne saurait mieux dire ! Surtout en remarquant que le nom du personnage mis en cause est soigneusement bippé et que cette vidéo a pourtant émergé à point fort nommé, le soir même de l’annonce de l’arrestation. De là à conclure que s’il en était ainsi, la seule hypothèse crédible était que l’information était un secret de polichinelle pour « les milieux bien informés » (selon l’expression de Coluche), il n’y a qu’un pas…

Au premier rang de ces « initiés », bien évidemment, les journalistes, qu’ils soient professionnels ou citoyens. Le fait de veiller à masquer l’identité d’une personne le doit en général à la crainte d’encourir des poursuites en diffamation. Dans ces conditions, comment qualifier le fait d’attendre, pour se lancer dans la révélation, le moment où un homme à terre n’est plus en mesure de l’exercer ? Ou bien encore, comment nommer l’attitude consistant auparavant à ne pas rendre totalement publiques des informations gravissimes ?

Mais il serait simpliste de ne montrer du doigt que leur cohorte. Un porte-parole d’une composante de la majorité (dont le nom est passé au travers des mailles du filet de ma mémoire ; qu’il veuille bien accepter mes excuses) déclare, en substance, que le Parti Socialiste devra s’expliquer sur le fait d’avoir laissé quelqu’un qualifié désormais de « chimpanzé en rut » arriver si près des marches de l’élection suprême.

Il a mille fois raison, car si l’épisode new yorkais tient à une pulsion irrépressible, je n’ose en imaginer les conséquences si au lieu de se produire à la veille des primaires, il était survenu en juin ou en septembre 2012, après que l’élection ait donné les résultats que prédisaient les sondages voilà peu ! Tsunami provoquant un formidable chaos interne, doublé d’une insupportable humiliation de notre pays sur la scène internationale.

Encore que pour ce qui est de cette dernière, nous y sommes bel et bien d’ores et déjà confrontés. D’où une dernière interrogation : si les journalistes et la classe politique étaient informés de telles turpitudes, on peut supposer que celui qui a proposé, soutenu et obtenu la nomination du directeur général du Fonds Monétaire International ne l’était pas moins ; dans le cas contraire, c’est à désespérer de tout puisqu’il dispose, en plus de toutes les autres sources, de celles de la Sécurité Intérieure, ex-DST.

Finalement, cette toute dernière interrogation, je ne l’expliciterai pas, pour vous laisser le soin de la formuler vous-même.