El Hierro : l’Île aux 1.000 volcans
ou le décorticage d’une éruption volcanique.
En guise de préambule
L’île El Hierro, – île du Méridien, île de Fer ou île Ferro et, en espagnol, Isla del Meridiano -, culmine, au Pico El Malpaso, à 1.501 mètres d’altitude. Elle est, avec une superficie de 268,71 kilomètres carrés et une population de 10.995 habitants(1), la plus petite, la plus méridionale et la plus occidentale des sept îles, – Lanzarote, Fuerteventura, Ténérife, Gran Canaria, La Gomera, La Palma et El Hierro -, auxquelles s’ajoutent six îles secondaires, – La Graciosa, Alegranza, Montaña Clara, Roque del Este et Roque del Oeste, formant l’archipel de Chinijo, et Los Lobos -, et des îlots et rochers, – Anaga, Garachico, Salmor… -, composant l’archipel canarien. Elle appartient à la Province de Santa Cruz. Elle se divise, avec la création de celle de El Pinar depuis le 15 Septembre 2007, en trois municipalités, Valverde, le chef-lieu, et Frontera.
Elle constitue la partie émergée de trois volcans boucliers, – Hierro, Tinor et El Golfo -, ayant connu au moins quatre effondrements de leurs flancs, – le glissement de El Julan, plus de 200.000 ans, volume déplacé compris entre 60 et 120 kilomètres cubes, détruisant le flanc Sud-Ouest, celui de San Andrès, 176.000 ans et celui de Las Playas, plus de 134.000 ans, entre 25 et 35 kilomètres cubes emportés et, le plus récent, le glissement de El Golfo, daté entre 136.000 et 21.000 ans, ruinant le flanc Nord-Ouest, charriant entre 150 et 180 kilomètres cubes de roches -, qui lui ont donné sa forme triangulaire.
Le 22 Janvier 2000, l’île El Hierro a été déclarée, par l’UNESCO, « Réserve de la biosphère ». Actuellement, avec l’élaboration d’un plan lancé par le Ministère de l’Industrie, Énergie et Tourisme, elle tend à devenir la première île au monde approvisionnée en énergie totalement renouvelable.
Étymologie du toponyme El Hierro.
Si nous nous en référons àJuan Tous Meliá, « La isla de El Hierro, o de la Herradura », un article publié, en 1998, dans « elAnuario de Estudios Canarios, T-XLIII, pages 441-449 », « Des historiens, des linguistes et des géographes ont passé des années à chercher le sens et l’origine du nom El Hierro. Avec l’aide du contour de l’île et la description de son image par les voyageurs, les géographes et les cartographes, nous pouvons conclure que l’île El Hierro peut aussi se dénommer l’île Fer à Cheval. »
Pour certains linguistes, l’île appelée El Hierro ou Ferro depuis le XIVe siècle, avait été baptisée, « Ecerós » ou « Esero » qui veut dire « fuerte » ou, en français « forte », par ses premiers colonisateurs préhispaniques, les Guanches connus sous le nom de Bimbaches. De fait, et par facilité, la transposition qui en a été donnée, en espagnol, s’est traduite par « Hierro » alors qu’il n’existe aucune trace de fer sur l’île. Et, selon Richard Henry Major, dans le langage guanche le mot « héros »ou « herro », signifie « citerne » ou « source ». Par processus d’étymologie populaire, cet appellatif a pu se transformer en « hierro ».
Le relief de l’île d’El Hierro.
Toutes les descriptions afférentes à l’île de El Hierro débutent par l’impression que génère son point de vue depuis la mer. Et il ne peut pas être pire. « L’île de El Hierro », écrit Georges Glas, « se dresse abrupte et escarpée au-dessus des eaux océaniques, de tous les côtés, de sorte que son ascension est très difficile et fatiguante. Le reste de l’île est une plaine fertile et tolérable. » Ce tableau brossé par l’auteur anglais du XVIIIe siècle, est assez réel, certes, mais il n’est cependant pas personnel car Georges Glas, reprenant la description faite par Juan deAbreu Galindo(2)dans son « Histoire de la conquête des sept îles des Canaries », à la fin du XVIe siècle, d’une part, et celle de Pierre Bontier et de Jean Le Verrier(3), chroniqueurs de la découverte et de la conquête des dites îles, en 1402, par Jean de Béthencourt, n’a jamais foulé le sol de l’Île du Méridien
Ce double visage îlien, côtes abruptes l’encerclant et pénéplaine sur sa superficie intérieure, différencie nettement El Hierro, à l’exception de Lanzarote et de Fuerteventura, du reste des autres îles canariennes qui ont une configuration pyramidale les rendant impraticables sur leurs hauteurs. L’île du Méridien, au contraire, développe, historiquement, une activité agro-pastorale sur le vaste plateau du Nidafe et les bergers colonisent, pour leurs troupeaux, sur les pentes de La Dehesa, les meilleurs pâturages
Dans son « Historia de Canarias », l’historien, biologiste et écrivain, José de Viera y Clavijo, – né le 28 Décembre 1731 à Los Realejos, Santa Cruz de Tenerife -, en 1763, décrit l’île telle une « forteresse. » En effet, « naturellement défendue par les falaises abruptes de l’ensemble de ses côtes »,contrairement aux autres, l’île de El Hierro, « paraissant inaccessible aux attaques de l’ennemi »,n’a jamais nécessité la construction de quelconques châteaux, tours ou bâtiments défensifs.
En outre, lors de la conquête des îles Canaries, à partir du XVIe siècle, l’île de El Hierro, petite et pauvre, était à l’abri de toute ambition. Ceux qui se hasardaient sur son sol, n’y venaient pas pour se couvrir de gloire mais par l’attraction, d’une part, du Méridien d’origine(4) comme édicté, à la suite de son prédécesseur Marinos de Tyr, par Ptolémée, dans sa Géographie, et situé dans les Îles des Bienheureux, identifiées comme la partie occidentale des îles Canaries, le point le plus occidental du monde connu, et, d’autre part, du Garoé, ou Arbre Saint, un arbre légendaire servant, « réunissant les nuages pluvieux à sa cime », de fontaine à eau pour les habitants.
Y ajout à la difficulté d’accession à l’île, n’y ayant ni port ni mouillage pour y ancrer les bateaux de commerce, même de petit tonnage, seul le trafic provincial, par cabotage, s’y pratiquait à condition, encore, que les marins fissent preuve de hardiesse. « La Gomera et El Hierro… », écrivit Georges Glas au XVIIIe siècle, « …sont si pauvres qu’aucun navire, venant d’Europe ou d’Amérique, n’y accoste. »
De fait, le Port de la Estaca étant inauguré en 1960 et l’aéroport Valverde El Hierro en 1972, son isolement à perduré jusqu’au milieu de XXe siècle et a conforté le conservatisme des coutumes et de la culture insulaire hierrenque qui transparait dans toutes les manifestations culturelles et cultuelles.
27 Décembre 2012 © Raymond Matabosch
Notes.
(1) Instituto Canario de Estadística, – ISTAC -, recensement du 01 Janvier 2011
(2)Juan de Abreu Galindo était un religieux franciscain d’origine andalouse, auteur de « la Historia de la conquista de las siete islas de Gran Canaria »,probablement écrite entre 1590 et 1600.
(3) La chronique de l’expédition de Jean de Béthencourt Chambellan de Charles VI, avec Gadifer de La Salle, aux Canaries est contenue dans Le Canarien, chronique et journal de campagne de l’expédition normande de 1402, écrite par les franciscains Pierre Bontier et Jean Le Verrier, chapelains des deux capitaines.
(4)Le méridien de Ferro, ou méridien de l’île de Fer, est un méridien utilisé par le passé comme méridien d’origine en Europe, correspondant à la partie occidentale d’El Hierro, île la plus à l’Ouest de l’archipel des Canaries.
Ptolémée avait basé ses calculs de longitude sur la position la plus occidentale connue, permettant de réaliser des cartes avec des longitudes exclusivement positives. En Europe, la Géographie de Ptolémée reste une référence jusqu’aux grandes découvertes maritimes des XVe et XVIe siècles.
Suite de l’article : El Hierro : l’Île aux 1.000 volcans, chapitre I-I
Impressionnant ces îles!
une petite question:c’est vous Catalan,la photo sur cette île?
[quote]une petite question:c’est vous Catalan,la photo sur cette île? [/quote]
N’y ai-je pas annoté la première photographie : « [i]l’auteur sur El Hierro[/i] », Mozarine… ?
C’était au mois d’Octobre 2011…
Un petit coin de paradis cette île dont je suis devenu amoureux il y a une quinzaine d’années et ou j’envisage de me retirer pour mener une vie au rythme de la nature .
On y trouve tout pour être heureux , l’essentiel sans artifices avec une population charmante.
Comme son sous sol , je « bouillonne » d’y retourner dans les mois qui viennent.