Panache volcanique cypressoïde.


Code 1803-02

Localisation : latitude 27.73° Nord, longitude 18.03° Ouest.

Volcan-bouclier, altitude 1.501 mètres, Îles Canaries, Espagne.



L’île de El Hierro, – Isla del Meridiano ou d’El Ferro et, en français, île du Méridien, de Fer ou Ferro -, en Macaronésie(1), est la plus occidentale et la plus méridionale des Îles Canaries(2). De forme triangulaire et de superficie réduite, – 268,71 kilomètres carrés -, elle culmine à 1.501 mètres d’altitude au Pico de Malpaso. Elle compte une population de 10.892 habitants, – Instituto Canario de Estadística 2009 -, répartie en trois agglomérations : Valverde, Frontera et El Pinar de El Hierro.

 

El Golfo.
 

Comme le sont, dans leur ensemble, les Îles Canaries, El Hierro est une île d’origine volcanique de Hot spot(3), – point chaud -, d’âge géologique estimé à 1,3/1,2 millions d’années, ce qui en fait d’elle la plus « jeune » de tout l’archipel canarien. Aux différent de celles de Lanzarote, Fuerteventura, Ténérife, et Gran Canaria, cataloguées en troisième phase de leur création, de celles de La Gomera et La Palma considérées être dans leur seconde phase, El Hierro est toujours classifiée en sa première. Quand le diapir(4) mantellique est remonté sous forme de panache et a commencé à faire fondre, par décompression, vers une profondeur de l’ordre de 100 kilomètres, générant un magma basaltique qui, dès qu’il est en proportion suffisante, traverse la lithosphère jusqu’à la percer, il s’est créé une brèche, en forme de « Y », engendrant la formation d’un volcan-bouclier.


Formation de l’Île « El Hierro »


La phase la plus active de la formation de l’île se situe aux prémices de l’Holocène, vers 10.000 avant Jésus Christ et les éruptions les plus récentes se sont succédées entre 4.790 avant l’ère chrétienne et 1793 : en 4790 BC(5) incertaine ; en 950 BC ± 150 ans, éruption explosive et coulées de lave, sur le flanc Est, « Soliman » ; en 550 BC ± 75 ans, éruption effusive et coulées de lave, dans un évent central, « Montañas Chamuscada et Entremontañas » ; en 1677 incertaine ; en 1692 incertaine ; et, malgré une incertitude en entourant le rapport historique, en 1793, éruption effusive consécutive à un séisme majeur de magnitude estimée supérieure à 6.0, indice d’explosivité volcanique 0, fissure radiale Rift Nord-Ouest, « Volcan de Lomo Negro », dans le secteur de la « Playa Verodal. »

 

L’Île de El Hierro.

 

Les coulées de lave et les éjectas, en permettant son expansion, se sont surtout concentrés au Sud, à l’Ouest et au Nord de l’île. De toutes les Îles Canaries, El Hierro est la plus densément fournie en cratères, – Hoya de Fileba, Mareta et Caldera de Los Angeles -, cônes de cendres, – Montaña de Afosa, Montaña de Asomada, Montaña Asomadas Negras, El Campanario, Montaña Chamuscada, Montaña de Las Cuevas, Entremontañas, Montaña de los Frailes, El Golfo, Montaña del Hombre Muerto, Montaña de los Humilladéros, Montaña del Jable, Montañas de Julan, Los Llanillos, Volcan de Lomo Négro, Malpaso, Montaña de Mercadel, Montaña de Orchilla, Restinga, El Rincon de la Cerca, Roque Grande, Montaña de la Rosas, Sabinosa, Soliman, Tanganasoga, Montaña Tembargena, Tembargena, Montaña Ténaca, Montaña Tenerife, Montaña Tenesedra, Tesoro, Montaña de Timborombo, Tinor, La Viña, Montaña de la Virgen, etc… -, et anneaux de tuf. Plus de 500 d’entre eux sont visibles, environ 300 autres sont ennoyés sous des matériaux pyroclastiques et des coulées de lave plus récents, et 5 bâtis volcaniques sous-marins sont dénombrés. En outre 70 grottes et tubes volcaniques, dont la « Cueva de Don Justo » et ses 6 kilomètres de long, – une cheminée volcanique divergente, « Red Hot Lava », dans laquelle la lave a continué à s’écouler dans le tube jusqu’à ce qu’il soit vide -, sont recensés et répertoriés.


Le volcan-bouclier El Hierro.


Le volcan-bouclier est tronqué par un conséquent escarpement aux parois abruptes, – 1.500 mètres d’aplomb -, sur toute la longueur de sa façade Nord-Ouest qui s’est formé consécutivement à un effondrement gravitionnel, lors d’une probable éruption surtseyenne(6), environ 130.000 ans, donnant naissance, sur 12 kilomètres de long, à la large baie El Golfo. Trois autres grands glissements sous-marins peuvent, de même, se déterminer, face aux côtes îliennes Sud-Ouest et Sud-Est, une zone caractérisée par la présence de cinq bâtis volcaniques :

– Le plus proche, à environ 2 kilomètres au Sud-Sud-Ouest de La Restinga à -370 mètres ;

– Le second, à environ 10 kilomètres au Sud de La Restinga, culminant à -1.784 mètres ;

– Le troisième, à environ 20 kilomètres au Sud-Sud-Est de La Restinga, culminant à -3.095 mètres ;

– Le quatrième, à environ 30 kilomètres au Sud-Ouest de La Restinga, culminant à -3.693 mètres ;

– Et le cinquième, à environ 35 kilomètres au Sud-Ouest de La Restinga, culminant à -2.979 mètres.

 

Les volcans sous-marins au large des côtes Sud-Ouest et Sud-Est de El Hierro.

 

Trois failles importantes, orientées Sud-Est/Nord-Ouest, Sud-Ouest/Nord-Est, et Nord/Sud, à 120 degrés d’angles, forment d’éminentes crêtes topographiques. La partie sub-aérienne du volcan se compose de strates quaternaires résultant de coulées de lave basaltique et trachybasaltique et de tufs surmontées de nombreux cônes de scories et plafonnées par des coulées récentes de lave.


L’activité séismo-volcanique sous le niveau basal du volcan El Hierro.


Depuis le début du mois de Juillet 2011 et au cours des dernières semaines, la sismicité, bien que de faible magnitude, magnitude locale, – ML – de 2.0 ± 0.5 sur l’échelle ouverte de Richter, a été d’un volume élevé, avec des essaims de plus de 1.000 microséismes confinés à des profondeurs proches de la frontière croûte terrestre/manteau supérieur conforme à un tel cadre océanique, – maximum 25 kilomètres -, des hypocentres variant entre 9 et 16 kilomètres sous la surface. Rares sont les foyers ayant une profondeur focale égale ou inférieure à 4 kilomètres et rares sont les tremblements de terre de magnitude ML comprise entre 3.0 et 3.9, – seulement 6 enregistrés : un le 24 Septembre de ML 3.4 et 5 le 27 Septembre : un de 3.1, trois de 3.5 et un de 3.8 .


Les aléas séismo-volcaniques, au cours du mois de septembre se sont amplifiés et se comptabilisent entre 200 et 250 par jour avec des pics pouvant atteindre 700 événements séismiques journaliers. En outre, une inflation, – soulèvement -, du sol est estimée à environ 1 à 2 centimètres depuis le 24 Août. Le magma est en mouvement sous le niveau basal de El Hierro, probablement en direction de la chambre magmatique, et cela peut se poursuivre durant un certain temps, plusieurs jours voire quelques semaines.

 

Montañas de Julan.

 

Aussi trois questions se posent :

– Une éruption volcanique, de type effusif, serait-elle en préparation pour le volcan-bouclier, de point chaud et basaltique, El Hierro ? Peut-être ? Peut-être pas ? En effet, dans le cadre de cet édifice volcanique, depuis 1793, – une éruption bien que documentée historiquement mais, pour certains scientifiques, considérée comme incertaine-, la majorité des intrusions magmatiques n’atteignent pas la surface et, comme par le passé, l’activité séismo-volcanique peut cesser à tout moment. En outre, la déformation du sol et les émissions de gaz sont stables et ne montrent aucun signe d’une quelconque augmentation notable.

– Si une éruption se produit, – plausiblement sur le site des Montañas de Julan –, le hotspot étant situé sous l’Île El Hierro, elle se présentera, théoriquement, sous la forme d’une éruption hawaiienne, un genre d’éruption volcanique, à l’origine de la construction des volcans boucliers, se générant sur des volcans rouges et se caractérisant par l’émission d’une lave extrêmement fluide formant très facilement des coulées laviques qui peuvent atteindre des dizaines de kilomètres de longueur. Dans le contexte d’une telle éruption, la lave sort très facilement de la cheminée volcanique, – ou à travers une fissure qui peut-être créée par la pression croissante -, en formant des fontaines de lave ou des lacs de lave mais sans explosion, même de moyenne ampleur.

 

Répartition spatiale des 8.523 séismes depuis le 16 juillet 2011 (en rouge et en bleu les plus récents).

 

– Et si cette éruption, – c’est une possibilité aussi -, affecte l’un des deux ou trois volcans sous-marins les plus proches de La Restinga, – tout particulièrement celui localisé au Sud-Sud-Ouest de l’île et culminant à -370 mètres -, lors, le contact de l’eau et de la lave engendrerait un choc thermique qui provoquerait la vaporisation de l’eau et la fragmentation de la lave au cours d’explosions qualifiées de « cypressoïdes » pour la ressemblance des panaches volcaniques avec des cyprès, une éruption sans aucun danger apparent pour la population locale.

 

Le 23 Septembre, se basant sur le PEVOLCA, – le Plan Spécial des Risques volcaniques aux Canaries -, le gouvernement canarien a pris la décision de modifier le niveau d’alerte volcanique l’élevant du niveau vert, – état de pré-alerte -, au niveau jaune, – état d’alerte ou de pré-urgence -.


Notes.


(1) La Macaronésie, – parfois écrit à tort Macronésie -, « les îles fortunées », d’appartenance au Portugal, à l’Espagne et à la République du Cap-Vert, est un archipel de l’Océan Atlantique composé des archipels des Açores, de Madère incluant les îles Selvagens, des Canaries et du Cap-Vert.

(2) Les îles Canaries, – en espagnol Islas Canarias-, sont un archipel composé de sept îles principales, – Lanzarote, Fuerteventura, Ténérife, Gran Canaria, La Gomera, La Palma et El Hierro -, d’îles secondaires, – La Graciosa, Alegranza, Los Lobos, Montaña Clara, Roque del Este et Roque del Oeste -, et d’une kyrielle d’îlots et rochers, – Anaga, Garachico, Roques de Salmor, etc… – qui se situent à environ 150 kilomètres au nord-ouest du Sahara occidental et à plus de 1.000 kilomètres du sud de l’Espagne. Ces îles sont reconnues par l’Union africaine comme territoire africain occupé par une puissance étrangère

(3) Un point chaud, – hot spot en anglais -, est, en géologie, un endroit à la surface d’une planète qui a une activité volcanique régulière. Actuellement, les connaissances sur les points chauds et les phénomènes internes à leur origine sont encore très incomplètes.

Les points chauds terrestres sont généralement expliqués comme étant la trace en surface de l’expression sous forme de volcanisme, d’endroits relativement fixes les uns par rapport aux autres, du manteau où la température est plus élevée relativement aux autres zones de même profondeur. Les matériaux présents en ces zones se retrouvent moins denses, et l’effet de la poussée d’Archimède provoque la formation d’un diapir mantellique qui remonte sous la forme d’un panache. Ce dernier, s’approchant de la surface de la Terre, commence à fondre par décompression, vers une profondeur de l’ordre de 100 kilomètres, générant un magma basaltique qui, dès qu’il est en proportion suffisante, traverse la lithosphère jusqu’à la percer, engendrant la formation de volcans-boucliers dits de point chaud. La dérive des plaques tectoniques entraînant la lithosphère au-dessus des sources profondes fait que le point chaud crée des alignements volcaniques à la surface terrestre, comme l’archipel des îles Hawaii-Empereur, l’archipel des Marquises, des îles de la Société, etc.

(4) En géologie, un diapir, – du grec diapeirein, percer au travers -, est une structure plus ou moins globuleuse, résultant de la remontée de roches plus légères à travers des roches plus denses.

(5) « Before Christ », équivalent anglo-saxon de « avant Jésus-Christ »

(6) Une éruption surtseyenne, tirant son nom du Surtsey, est un type d’éruption volcanique caractérisé par l’émission d’une lave à fleur d’eau lorsque le volcan est une île maritime ou lacustre de faible altitude. Le contact de l’eau et de la lave engendre un choc thermique qui provoque la vaporisation de l’eau et la fragmentation de la lave au cours d’explosions qualifiées de « cypressoïdes » pour la ressemblance des panaches volcaniques avec des cyprès. L’indice d’explosivité volcanique de ce type d’éruption va de 2 à 5 mais il dépend grandement du type de magma : basaltique ou andésitique.

 

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