Droit, Justice et Morale: rien à voir.

Hier, nous avons appris à nos dépens la différence capitale entre Droit, Morale et Justice.

Pour rétablir le contexte : mon compagnon a subi, de la part de son père, maltraitances et sévices moraux de l’enfance à l’âge adulte.

Sévices qui portent encore préjudice aujourd’hui, alors qu’il a 35 ans.

J’explique :

         Outre les maltraitances physiques (coups, traumatismes crâniens etc), au décès de sa maman, mon compagnon a été jeté à la rue, encore mineur. On était en 1996.

         Une année après, courant 97 donc, sombrant en dépression (on le serait à moins) mon compagnon demande à entrer à l’hôpital psy. Son cher papa intervient, le plombe, raconte des tas de belles histoires et ma foi, mon compagnon sort de l’hôpital… (soit-disant) schizophrène. (Quand je regarde Wolfman avec et que je vois comment Hopkins enfonce le clou au sujet de Del Toro, ça me donne une idée de ce qu’a du trafiquer beau-papa à cette époque, le loup-garou en moins bien entendu.)

         Au passage alors que mon compagnon était sous médication, beau-papa lui fait signer sous contrainte une renonciation à l’héritage et prive mon compagnon de presque 10 000 euros (on parlait Francs à l’époque, je fais la conversion toute seule)… au profit de sa nouvelle épouse. (Ca je le sais parce que j’ai vu le dossier du notaire, les dates correspondent à l’hospitalisation, et je doute que mon compagnon aurait signé pour refiler gracieusement une telle somme à celui qui l’avait foutu à la rue.)

         Mon compagnon sort de l’hopital en 2000, en Juillet 2000 on lui inflige une pension d’invalidité catégorie 2 (bam, il peut pas travailler) alors qu’un mois avant on le libérait de sa curatelle renforcée parce que, selon un autre rapport médical, il avait « retrouvé la pléniture de ses facultés et était en mesure d’agir avec discernement ». Bref, en gros, il a guéri de sa dépression quoi. Normal. Peut-on m’expliquer dans ce cas pourquoi il a toujours cette fichue pensio, 13 ans après ? non, et tout le monde s’en fiche.

 

En 2004, on s’est mis ensemble. Beau-Papa a rencontré mes parents et a tellement Sali mon compagnon qu’ils m’ont crue aux prises d’un psychopathe. Notre vie a été un enfer pendant des années, et encore aujourd’hui, les relations entre ma famille et lui sont très tendues.

Pendant ce temps, Beau-Papa se la coule douce à 750km de là, et attention, il faut le laisser tranquille hein, parce qu’il a eu une opération à cœur ouvert le pauvre chou.

Bon, le fait que mon compagnon galère comme un crevard depuis 13 ans et n’ait aucun avenir professionnel, ma foi, rien à fiche. C’est tellement pas important.

 

Mais moi, je trouve ça important. Alors j’ai écrit au président de la République (ben oui, encore) pour demander si c’est normal qu’un gars ait le droit de commettre tous ces crimes et délits et s’en sortir parce que ça fait « trop longtemps » (délai de prescription oblige).

Fort heureusement, le Ministère de la Justice et Madame Taubira ont répondu, nous encourageant à porter plainte effectivement. Moi, qui ne suis pas juriste, quand je lis le courrier, je comprends que la prescription pourrait être levée et que Beau-Papa pourrait enfin payer, que mon compagnon serait reconnu de bonne foi et (surtout) sain d’esprit (depuis le temps, pas d’examen de pension, pas de traitement et ma foi depuis 9 ans qu’on est ensemble, je peux assurer qu’il est comme tout le monde !).

 

Ni une ni deux, on va chez un avocat, remplis d’espoir. Et la douche froide, c’est que voilà, le Droit, c’est un ensemble de règles qui ma foi, va souvent à l’encontre de la Justice et de la Morale mais qu’est-ce que vous voulez y faire, hein, c’est comme ça ma p’tite dame.

Et de nous proposer de forcer la CPAM qui verse la pension, à réexaminer le dossier et constater qu’il y a eu une "évolution de la maladie" qui fait que ma foi, la pension n’est plus nécessaire. En gros, reconnaître qu’il a bien été schizo (ce qui est faux), que ces 13 ans de privation de vie professionnelle étaient mérités et que ça a tout simplement disparu. Pouf. Comme ça.

 

Alors bon, je ne vais pas cracher sur le Droit, il est nécessaire en théorie.

Mais je me demande à quoi il sert, là. A quoi ça sert d’avoir des lois, si on a des gens qui peuvent les bafouer, faire du mal autour d’eux et s’en tirer à bon compte parce que les victimes mettent du temps à s’en relever. Concernant mon compagnon, c’est d’autant plus vicieux que lui, il a pas mis du temps à vouloir porter plainte, c’est juste qu’avec son statut de malade mental, il a jamais été pris au sérieux. 

 

La morale et la justice voudraient que son père soit puni, que l’on reconnaisse avoir fait une erreur au sortir de l’hôpital, qu’il a simplement guéri d’une dépression et pas autre chose, qu’il retrouve au passage l’héritage de sa maman et qu’il puisse aujourd’hui retrouver, avec aide adaptée, un emploi et une réelle insertion dans la Société.

Le Droit veut que Beau-Papa sirote son panaché sur la plage, en toute tranquillité, entouré de ses autres enfants et sa troisième femme, et que mon compagnon reconnaisse une maladie qu’il n’a jamais eue pour espérer – peut-être – qu’on lui enlève son argent de poche et qu’on le laisse se dépatouiller tout seul dans sa mouise. Et encore, dans 5-6 ans, soit quand il aura 40 ans passés et 20 ans de trou dans le CV.

 

Mon compagnon a 10 000 raisons de sombrer encore, se tirer une balle, devenir réellement dingue ou aller se faire justice lui-même et ruiner son avenir pour de bon. Ben il est avec moi, il élève nos 2 garçons, les emmène/cherche à l’école, fait le ménage à la maison et me regarde, moi, aller bosser comme tout le monde. Rien que pour ça, il a droit à la Morale et à la Justice, mais le Droit, celui avec un D, reste sourd.

 

Je sais pas vous, mais moi ça me laisse songeuse. 

3 réflexions sur « Droit, Justice et Morale: rien à voir. »

  1. Se réfugier derrière le paravent du droit évite aux juges de se poser quelque question que ce soit, c’est la défausse institutionnelle la plus hypocrite qu’on puisse imaginer: c’est pas moi, c’est la loi !
    (La loi qui les arrange et comme il y en a des milliers et contradictoires qui plus est, ils peuvent choisir …)
    nb pire: la plupart d’entre eux appartiennent au syndicat de la magistrature, et quand on sait de quelle mouvance il s’agit…

  2. Nadoo, oui, la morale est bafouée, dans notre société! Tenez, ne préfère t-on pas mettre un vieux à l’asile que de payer une maison de retraite…?
    Que dire aussi du monde du travail?….. Je peux témoigner que certains se croient au-dessus des lois. Des éternels et supposés impunis… Les droits? ils les prennent, tous. Même s’ils n’ont « pas le droit »… Les « justiciers » sont trop occupés ailleurs… Les cas se multiplient, alors… Tout cela rentre dans une espèce de « normalité » détestable…
    Bon courage à vous!

  3. Il y a deux règles qui prennent le pas sur toutes les autres de plus en plus à l’époque actuelle*:
    – le droit du plus fort (riche, puissant, tricheur…)
    – le pas vu, pas pris
    *ce qui n’a rien empêché en d’autres temps

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