Développement local et promotion professionnelle : récompense politique ?

 

«  Le maire de notre commune m’a chargé personnellement de vous dire que si son parti politique arrive en tête dans notre quartier à l’occasion de cette présidentielle 20011, il installera avant la fin de cette année des lampadaires tout le long de notre rue… » : Tels sont les propos d’un chef de quartier de Yaoundé, dans un débit de boisson de son quartier. Comme pour dire qu’au cas où son quartier voterait pour l’opposition, il ne bénéficiera jamais de l’éclairage public, qui est pourtant un devoir régalien des pouvoirs publics vis-à-vis de la population.

« Politique Na Ndjangui » (la politique est une sorte de tontine en pidgin English) lançait déjà un ancien premier ministre du Cameroun lors d’un meeting du parti actuellement au pouvoir au Cameroun. Une façon pour ce dernier d’indiquer aux  populations qu’en politique, c’est la règle de  «  tu me cotises et je te cotise ».

Cette théorie s’est presque déjà officialisée au Cameroun. C’est ainsi que les localités traditionnellement acquises à l’opposition sont marginalisées et totalement abandonnées à elles-mêmes.  Les natifs de ces localités sont également très défavorisés dans les concours administratifs. En outre, aujourd’hui, pour aspirer à une nomination dans l’administration publique camerounaise, il ne suffit pas d’être un bon fonctionnaire exemplaire. Non ! Plutôt seul votre militantisme sera capable de vous propulser jusqu’au sommet de l’administration, même si vous avez un profil discutable. Les camerounais l’ont finalement compris, et se sont tous transformés en de véritables opportunistes politiques. Même les intellectuels qui sont souvent présentés comme des hommes plutôt libres n’ont pas pu résister à cette « loi » ; c’est un ainsi qu’à la veille de chaque scrutin présidentiel, les enseignants d’universités qui souhaiteraient connaître une promotion adresse une lettre de « motion de soutien » au prince, pour lui témoigner de leur « soutien indéfectible ». Et tant pis pour vous, si vous vous abstenez de signer cette déclaration ! Avec cette pratique, il est désormais difficile au Cameroun de rêver. Car être un bon enseignant, un bon médecin, un bon technicien, un bon gestionnaire ne suffit  plus pour occuper un poste de responsabilité. Applaudissez, chantez des louanges pour le prince et vous serez récompenser : telle est la règne numéro un au Cameroun ! Et surtout, sachez que les neutres sont immédiatement taxés d’opposants  et sont écarté de la mangeoire

Il est vrai que pour aspirer manger aussi du pain, il faut déjà songer à aider le pâtissier à tourner la pâte ; cependant, il serait tout aussi totalement paradoxal pour un pays qui se voudrait d’ici 2035 être un pays émergent de baser ses critères de développement et de promotion au sein de l’administration sur les seules bases politiques !

 

4 réflexions sur « Développement local et promotion professionnelle : récompense politique ? »

  1. A lire ou à voir le film Topaze dans la version avec Jouvet, sous toutes les latitudes ce sont les mêmes promesses.

  2. Je dois être bien vieille, n’avoir plus grand chose comme dents, les seins qui tombent jusqu’aux genoux, plus ou moins chauve, les yeux qui regardent vers l’infini à perte de vue en me disant « à quand mon tour », la peau d’orange généralisée, bref affreuse comme pas possible car vous parlez de la présidentielle de 20011[b][/b][u][/u].
    Bref, après cette entrée humoristique, je pense qu’en France c’est également à certains endroits plus ou moins la même chose notamment en ce qui concerne l’attribution des logements. Certains communes ne donnent des logements qu’à des familles très, très susceptibles de voter pour le maire. Cela se sait, cela se fait et malheureusement, tout le monde y trouve son compte, personne ne dit mot.

  3. Bonjour Maurice Defao

    Au Cameroun et ailleurs, en passant par la France…la corruption a investi toutes les catégories socio-professionnelles et tous les domaines. Elle est utile au Pouvoir dont elle assure la pérennité.
    Plus les gens sont démunis (intellectuellement et matériellement), plus la propagande est peu coûteuse et efficace. Sinistre et cynique !

    Néanmoins, de colossales richesses matérielles et intellectuelles sont détournées du pays et coûtent une fortune à ses habitants.
    N’était ce pas en 2008 qu’une campagne de lutte contre ce fléau avait été initiée au Cameroun par l’OLC ?
    Tenter de sensibiliser les différentes communautés contre ce fléau n’est pas une mince affaire quand on sait qu’elle est animée intra et extra-muros.
    Que ce soit au Cameroun ou en France, s’il n’y a pas de volonté politique forte de faire aboutir un tel programme, ce sera l’éternel rideau de fumée qui masquera une toute autre réalité. Pudeur oblige ?!

    J’ai passé de longues années en Afrique (Est) dont je garde une nostalgie certaine.
    Si le Paradis devait exister sur Terre, m’est avis que c’est en Afrique qu’il se trouve.
    Qu’est ce qu’ils en ont fait ? Qu’est ce qu’il en reste ?….

    MAURICE ….à l’époque où nous étions en Afrique, des campagnes humanitaires étaient orchestrées principalement en France et en Belgique.
    Si je vous disais qu’une bonne partie des sommes récoltées n’arrivaient même pas à destination. Volatilisée ! Je suis dégoûtée…

  4. Maurice, il me semble que la tontine est très ancienne chez les Bamilékés? Lesquels ont été durement traités juste après l’indépendance.

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