On l’a vu, la culture sera l’un des points de « non affrontement » entre les différents candidats à l’élection présidentielle, et pourtant il y aurait beaucoup à dire…
Exemple de cette importance, que revêt la définition de la politique culturelle à travers deux actualités, passées (bizarrement) sous silence. La décentralisation caractérise notre politique publique générale depuis plusieurs années, et la culture n’a pas échappé à cette délocalisation, et à cette multiplication des centres de décision. Ainsi, l’ancien ministre de la culture (2002 -2004) , Jean Jacques AILLAGON, devenu depuis président du domaine de Versailles déclarait : « Il faut que la culture soit présente partout. C’est un des grands enjeux de l’aménagement culturel du territoire ». Véritable déclaration de principe, voire de choix politique , cette allocution de M AILLAGON entoure la signature d’un accord tripartite unissant le château de Versailles, la ville d’Arras et la région Nord Pas de Calais. L’établissement public s’engage, par cet accord, à organiser des expositions thématiques en prêtant gracieusement des œuvres de ses collections historiques. Ces dernières seront présentées dans un lieu prestigieux, puisque 1000 m2 seront aménagés dans l’ancienne abbaye Saint Vaast d’Arras. On ne peut que s’en féliciter, puisqu’en relisant le dossier, on peut en effet vérifier que ces prêts seront gratuits. Il reste, que l’un des plus prestigieux sites historiques et touristiques français laisse le soin de financer les aménagements pour accueillir ces expositions ainsi que le coût des travaux à y accomplir, à la commune d’Arras et à la région. S’agit-il encore d’une réelle ambition de « démocratiser la culture », ou d’un coup de publicité pour Versailles, qui voit là, l’occasion de démontrer l’intérêt et la diversité d ses collections, à moindre frais ? la première est prévue début 2012 avec comme thème retenu : Les voyages de la Cour.
Second exemple, avec la Bibliothèque nationale de France (B.N.F.), qui ambitionne d’accélérer la numérisation de ses fonds pour tripler la taille de Gallica, le portail numérique de la B.N.F. Avec 1.5 millions de documents, Gallica espère donc pouvoir accélérer sa croissance, après avoir identifié les ouvrages à numériser en priorité : les livres anciens (de 1470 à 1700), la presse française de 1780 à 1940,… L’œuvre est ambitieuse, et relève d’un véritable choix politique. Les écrits font partie de notre patrimoine, et il faut non seulement les protéger mais aussi et surtout les diffuser le plus largement possible. Sauf que, cette actualité fait suite à un communiqué commun à la B.N.F. et au Ministère de la Culture (06/07/2011), qui annonçait le lancement d’un appel à trouver auprès du secteur privés la possibilité de réaliser les « Investissements d’avenir pour la numérisation et la valorisation des collections de la BNF ». En résume, la B.N.F. recherche 150 millions d’euros auprès du secteur privé pour pouvoir réaliser sa mission de service public.
Deux exemples distincts donc, mais une même approche de la politique culturelle. Oui, la culture doit être accessible à tous –ou tout du moins au plus grand nombre -, oui la protection de notre patrimoine est essentielle.,…Par contre, pour répondre à ses ambitions, les autorités ont décidé de faire appel à un financement extérieur, en l’occurrence au secteur privé pour les livres, et aux collectivités locales pour le Château de Versailles.