LE MAL EST BEAUCOUP PLUS PROFOND ET ENTRAÎNE TOUTE L’ECONOMIE MONDIALE DANS LA TOURMENTE
Début novembre 2008, on savait que la crise des subprime aurait un impact négatif sur l’économie et tout particulièrement sur la croissance – avec des prévisions de la croissance mondiale sans cesse revues à la baisse, tout particulièrement aux Etats-Unis où l’on envisageait même la possibilité d’une récession – mais les experts et les politiques pensaient qu’avec le temps tout s’arrangerait. C’était une affaire de quelques mois, une année dans le pire des cas. Pourtant, le 21 novembre, le sénateur américain Charles Shumer, chargé au Congrès de superviser l’économie du pays avertissait les autorités de son pays : « Le pire est encore à venir ». Il considérait que la crise immobilière et bancaire allait affecter désormais la production avec une prévision de la Réserve fédérale inférieure à 2% en 2008, au lieu des 2,5% prévus initialement. Il faisait aussi remarquer que la Fed avait abaissé par deux fois son taux d’intérêt directeur au cours des derniers mois sans aucun effet.
Or, dès le 2 janvier, la Bourse envoie un nouveau coup de semonce, avec des indicateurs qui sont tous dans le rouge : le dollar en chute libre, le pétrole à plus de 100 dollars le baril, l’inflation galopante, la croissance en berne, soit trois des indicateurs du fameux carré magique (le quatrième, le commerce extérieur n’étant pas mieux loti) et des faillites bancaires qui se profilent à l’horizon malgré l’apport d’argent frais venant du Moyen-Orient et surtout d’Asie. Des liquidités « douteuses » acquises sur les marchés de la spéculation, la Bourse de Shanghai ayant bondi de 97% en 2007 après 130% en 2008. Des excès qui risquent se payer plus vite que prévu. « Il va y avoir un krach en Chine. J'ignore seulement quand », affirmait Alan Greenspan, l’ancien président de la Fed, dans un entretien à la revue Emerging Markets publié le 19 octobre 2007. M. Greenspan, qui reste une figure très écoutée à Wall Street, expliquait sa conviction par « le manque de culture historique des marchés » chinois. Ce krach que prédit Greenspan sur les marchés financiers chinois peut tout aussi bien venir d’une crise monétaire comme en 1997 (crise asiatique) ou en 1998 (crise russe) avec l’effondrement du dollar.
En effet, le dollar surnommé depuis quelques semaines, dans les salles de marchés de change, la « monnaie subprime » est en chute libre, même si l’on arrive par des manipulations monétaires à l’enrayer pour quelques semaines – grâce à l’intervention concertée des banques centrales sur le marché des changes, jusqu’à épuisement de leurs réserves1 –, mais l’injection de près de 1000 milliards de dollars dans l’économie par les banques centrales et les baisses de taux d’intérêt, surtout par la réserve fédérale, ont déclenché une dangereuse tendance hyperinflationniste – qui se manifeste surtout, pour l’instant, dans le prix des produits alimentaires, de l’énergie et des matières premières –, qui pénalisera encore plus la première monnaie internationale… Or, que constatons-nous ? La Chine possède 1.500 milliards de dollars dans ses caisses, des dollars accumulés grâce à ses excédents commerciaux, qui sont en train de fondre comme neige au soleil2. La descente aux enfers du dollar serait donc une catastrophe pour les banques et toute l’économie chinoise, le Yuan n’étant pas considéré comme une monnaie internationale d’échange, car surévalué et n’étant pas le fruit de l’offre et de la demande sur le marché des changes. Une situation qui inquiète aussi les pays exportateurs de pétrole (le baril de pétrole est libellé en dollar), parmi lesquels certains comme le Venezuela et l'Iran réclament de vendre leur pétrole en euros, en dépit du blocage de certains pays de l’OPEP « liés par des accords » aux Américains, comme l'Arabie saoudite, mais pour combien de temps encore ?
Début janvier 2008, un signe qui en dit long. En ce premier jour de l’année boursière, c'est le plus mauvais démarrage enregistré depuis plus d'un quart de siècle par Wall Street (-1,67%). Par ailleurs, on apprend que l'indice ISM de décembre, reflétant l'état de santé du secteur manufacturier américain, est en net repli, ce qui amène à penser « que les risques de récession économique ont augmenté », d’après Al Goldman (A.G Edwards). Il est en effet passé à 47,7% en décembre, contre 50,8% en novembre. Or un niveau inférieur à 50% reflète une baisse de l'activité industrielle. En outre, le compte-rendu de la dernière réunion de la banque centrale américaine (la Réserve fédérale ou Fed), « a confirmé les craintes du marché sur une récession économique à venir ». Evoquant une économie américaine qui « devrait croître à un rythme sensiblement en dessous de son potentiel en 2008 », la Fed a fait état de fortes incertitudes pesant sur les perspectives économiques, et laissé la porte ouverte à une réduction supplémentaire de ses taux, ce qui ne résoudrait pas le problème crucial et latent de l’inflation.
D’autre part, le seuil symbolique des 100 dollars le baril, pourrait affecter durablement la consommation, premier moteur de la croissance. Enfin, « le premier jour de 2008 n'aura pas été bon pour le dollar », a commenté Kathy Lien, économiste de DailyFX, car dans un contexte de baisse de taux, cela ne ferait qu’éroder encore un peu le rendement du billet vert, et donc son attrait aux yeux des cambistes. Elle prévoit, elle aussi, une récession actuellement ou à venir aux Etats-Unis. La Réserve fédérale confirme ces propos lors de sa dernière réunion : « L'économie devrait croître à un rythme sensiblement en dessous de son potentiel en 2008 », en abaissant une nouvelle fois leurs prévisions de croissance. Soulignant les incertitudes « inhabituelles » pesant sur les perspectives économiques, certains membres de la Fed ont évoqué le risque d'une « spirale » où la détérioration du marché du crédit pèserait sur la croissance, ce qui réduirait à son tour les crédits disponibles.
Dans un article du 18 décembre 2007, Challenge.fr confirme que malgré toutes ces nouvelles inquiétantes, ces mauvais indicateurs et les déclarations des plus grands experts économiques de la planète, le ministre de l’économie Christine Lagarde persiste et signe, en maintenant le cap contre vents et marées. La polémique enfle entre le ministre de l’économie Christine Lagarde et Jacques Attali, président de la Commission pour la libération de la croissance, qui a déclaré au Journal du Dimanche que « si les banquiers continuent à paniquer, nous risquons une crise de 29 ». Christine Lagarde juge « largement excessif de conclure que nous sommes à la veille d'une grande crise économique », ajoutant que l'Europe serait « moins affectée par les conséquences des turbulences de l'été ». Elle a estimé que le président de la Commission pour la libération de la croissance, Jacques Attali, faisait donc « une grosse erreur de diagnostic » en comparant la situation actuelle à la crise économique de 1929. A l'époque, il y avait « une grande crise de liquidité » alors qu'il y a « aujourd'hui beaucoup de liquidités disponibles », a souligné le ministre de l'Economie. Elle a donné l'exemple des fonds souverains, fonds d'investissements contrôlés par des Etats « très nantis en liquidités ». Et contrairement à la crise de 1929, « les banques centrales jouent un rôle, non pas de rétention des liquidités mais de mise sur le marché de liquidités, de manière raisonnable et pondérée, et de façon concertée ».
Le Ministre de l’économie feint d’ignorer les prévisions des grands organismes internationaux3, et se base sur un raisonnement purement théorique pour tenir les propos précédents. La réalité c’est une crise systémique qui se profile à l’horizon depuis plusieurs années avec un système financier international moribond, que l’on ne contrôle plus depuis bien longtemps, entre sociétés offshores et paradis fiscaux, et qui met en péril toute l’économie réelle, comme l’affirmait le plus gros investisseur de la Planète Warren Buffett, en évoquant les produits dérivés, véritable cancer de la finance internationale.
En effet, Il faut s’attendre dans les mois à venir à une crise économique (récession et multiplication des faillites) et financière (krach boursier et effondrement du système bancaire) beaucoup plus grave que ce que quiconque – analystes, économistes et politiques – aurait imaginé. On ne peut pas être incapable de résoudre le problème de la demande, en privilégiant le facteur capital au détriment du facteur travail, d’un côté, et de l’autre faire marcher « la planche à billets », en déversant des centaines de milliards d’euros et de dollars sur les marchés financiers qui font gonfler les bulles immobilières et boursières, par le biais de crédits non productifs, sans un jour en payer lourdement la note.
A l’appui de ces affirmations, un ouvrage que je viens de publier4, et un communiqué de presse qui résume l’ensemble des données annonciatrices de cette crise5 mais aussi, ces dernières opérations très inquiétantes qui montrent que les banques centrales et tout particulièrement la BCE est en train de paniquer. Le 18 décembre 2007, la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) publient le résultat de la première opération en dollars décidée en commun. La Fed avait mis aux enchères lundi 20 milliards de dollars de liquidités. La BCE et la Banque nationale suisse ont elles aussi procédé à des enchères en dollars lundi, utilisant des liquidités prêtées par la Fed. « Nous nous attendons à ce que l'opération n'aide par l'écart entre OIS (taux interbancaires au jour le jour) et BOR (taux interbancaires à trois mois) à se réduire significativement, étant donné le faible montant de l'adjudication: 20 milliards de dollars, soit 4% de l'allocation de la Banque centrale européenne » ont précisé mardi les analystes de BNP-Paribas.
Quant à la BCE, elle a alloué aux banques, le 17 décembre 2007, 348,6 milliards d'euros à un taux de 4,21%, des sommes colossales qui vont alimenter l’inflation déjà galopante (aux alentours de 2,5 % prévus en 2008 dans la zone euro). Une autre enchère de la Fed, de 20 milliards de dollars, aura lieu jeudi, et deux autres sont prévues en janvier pour un montant encore à décider. « Les banques centrales ont submergé le secteur bancaire de leurs économies respectives de liquidités, pour des résultats mitigés (…) On peut arroser les banques de liquidités, et cela peut être tout à fait bienvenu en fin d'année, mais quand il y a un problème typique d'offre, cela ne va pas nécessairement résoudre le problème des prêts interbancaires, mais juste permettre de gagner du temps », ont estimé les économistes d'ING.
« Les banques centrales sont en même temps en train d'injecter de la liquidité dans le système financier mondial et d'envoyer aux marchés le message que la politique monétaire va être largement dominée par les craintes inflationnistes », ont ajouté les analystes de Global Equities. L'inflation reste en effet une inquiétude. Les prix à la production en Allemagne ont progressé en novembre de 0,8% sur un mois et de 2,5% sur un an, selon des chiffres publiés mercredi par l'Office fédéral des statistiques (Destatis). La hausse mensuelle est deux fois supérieure aux prévisions des analystes interrogés par l'agence d'informations financières Thomson Financial News, qui tablaient sur +0,4%6.
La réalité microéconomique est là chaque jour présente pour confirmer ces assertions vraies :
– Citigroup rapatrie 49 milliards de dollars d'investissements à risque7 : Après HSBC, Rabobank et la Société Générale, c'est au tour de Citigroup de rapatrier dans son bilan des milliards d'actifs dépréciés de ses SIV, les « véhicules d'investissement structuré ». Un nouveau symptôme de la crise de liquidités qui frappe les marchés […] Il y a encore quatre mois, avant que la crise des prêts hypothécaires à risques aux Etats-Unis ne vienne tout embraser, ces 49 milliards en valaient 87 milliards […] Ce faisant, en se portant garante des actifs moisis composant ses SIV incriminés, le géant bancaire américain espère rasséréner les marchés […] HSBC avait procédé de la sorte fin novembre, tout comme la néerlandaise Rabobank. Le mastodonte britannique avait indiqué qu’il allait injecter 35 milliards de dollars dans deux de ses SIV puis les faire remonter dans ses comptes pour une valeur comptable de 45 milliards […] A présent, les investisseurs sont nerveux. « On n'est pas loin de la crise systémique, prédit pour L’Expansion.com Jean-François Virolle, chef économiste chez Global Equities. Car les banques centrales ont eu beau injecter des liquidités pour répondre au besoin de refinancement des banques, le marché n’a toujours pas recouvré la confiance. Il ne se régule pas.
Sans doute parce qu’on est encore très loin d’avoir touché le fond. Plutôt que de parler de 400 à 500 milliards de dollars touchés par le subprime, il faut plutôt envisager que les montants soient dix fois plus élevés ! De l’ordre de 4000 à 5000 milliards ». La « première crise financière de l’âge de la mondialisation » selon l’expression de Philippe Chalmin, professeur associé à Dauphine, est à présent dans l’impasse. « On ne voit pas bien quelle pourrait être la porte de sortie, ajoute Jean-François Virolle, à moins d’orchestrer un sauvetage général par les gouvernements et donc les contribuables. Mais à quel prix ? George Bush a d’ailleurs posé un premier jalon en précisant qu’il allait geler pendant cinq ans les taux immobiliers des ménages à risques. Mais cela ne fait que repousser l’échéance…» Et puis on sait bien qu’un afflux trop massif de liquidités ferait par trop gonfler la masse monétaire ; ce qui ne pourrait qu’accélérer le processus inflationniste. En attendant, tout le monde navigue à vue.
– UBS : 40 milliards de dollars de pertes8 ? L’Union des Banques Suisses a annoncé, lundi 10 décembre, une nouvelle dépréciation d'actifs d'environ 10 milliards de dollars (6,8 milliards d'euros) causé par la fermeture ou le gel de trois « conduits » : Triton Property, Secure Income Property et Real Estate Euro Core. La première banque suisse s'attend par conséquent à une « possible » perte sur l'ensemble de l'exercice. En octobre dernier, la banque avait annoncé une première dépréciation d'actifs de 4,2 milliards dans l'activité banque d'investissement en raison de la crise sur les subprime, se traduisant par une perte nette de 830 millions de francs suisses au troisième trimestre. En réalité, on est plus prêt de la vérité entre 40 et 60 milliards de dollars. Face à cette situation, UBS a annoncé le renforcement de son capital, qui est actuellement de 19,4 milliards de francs suisses (11,7 milliards d'euros). Pour tenter de calmer les esprits, la banque procédera à une augmentation de capital : 11 milliards de francs suisses ont déjà été placés auprès du gouvernement de Singapour, et 2 milliards auprès d'un investisseur du Moyen-Orient.
– Hausse du coût du sauvetage de la banque allemande IKB9 : Des banques allemandes se sont portées pour la seconde fois en quatre mois au secours de leur consœur en difficulté IKB en acceptant de couvrir un risque supplémentaire de 350 millions d'euros lié à un véhicule d'investissement financier. Cette nouvelle prise en charge des risques du fonds Havenrock vient s'ajouter aux 3,5 milliards d'euros d'ores et déjà annoncé pour le coût du sauvetage d'IKB. IKB avait frôlé le dépôt de bilan cet été après avoir massivement investi sur le marché des subprimes. IKB avait auparavant annoncé le report de la publication de ses résultats semestriels, en raison des difficultés de consolidation dans ses comptes d'un autre véhicule d'investissement offshore, Rhineland Funding, dont les investissements hasardeux dans le subprime avaient rendu nécessaire le sauvetage initial […] Les perspectives pour Rhineland Funding s'étaient détériorées et qu'elle avait dû plus que doubler, à un total de 4,8 milliards d'euros, l'argent mis de côté pour éponger les pertes […] L'onde de choc de la crise du subprime continue à s'étendre en Allemagne. La banque publique Landesbank Baden Würtemberg (LBBW) a dit s'attendre à passer quelques 800 millions d'euros par pertes et profits liés à la crise du subprime.
La situation est tellement grave que l’on a recours aux fonds souverains10. Les fonds d'investissement créés par la Chine et d'autres pays en développement montent à l'assaut de Wall Street, en profitant de la faiblesse momentanée des grandes banques d'affaires américaines qui doivent reconstituer d'urgence leurs réserves financières. Morgan Stanley a annoncé hier que le groupe China Investment Corporation (CIC) allait lui apporter cinq milliards de dollars pour l'aider à rétablir ses fonds propres, mis à mal par les énormes dépréciations d'actifs résultant de son exposition au marché des crédits hypothécaires à risques (subprime). La banque a en effet dû passer par pertes et profits 9,4 milliards de dollars d'actif au quatrième trimestre de son exercice 2007 (clos fin novembre), soit l'équivalent d'un cinquième de sa capitalisation boursière. China Investment Corporation est le fonds souverain créé par les autorités communistes de Pékin pour gérer une partie de leurs colossales réserves de changes. La société, qui a officiellement été créée cette année, dispose d'une puissance de feu de plus de 200 milliards de dollars. Elle a déjà investi trois milliards de dollars dans le fonds d'investissement Blackstone. L'investissement du groupe chinois pourrait lui donner à terme jusqu'à 9,9 % du capital de Morgan Stanley, mais celui-ci se comportera en investisseur passif, a assuré la banque. CIC ne se verra reconnaître aucun droit dans la gestion du groupe, et notamment pas de poste d'administrateur, a-t-elle ajouté. Ce schéma est visiblement destiné à faire passer la pilule auprès de l'administration américaine, qui pourrait s'inquiéter de voir un actif aussi stratégique pour l'économie du pays tomber entre des mains étrangères.
Dans le dernier numéro de la revue Foreign Affairs, le secrétaire adjoint au Trésor américain Robert Kimmitt soulignait déjà les risques pour la sécurité nationale présentés par les investissements des fonds souverains. « De telles préoccupations ne surgissent pas seulement dans les cas où les fonds souverains obtiennent formellement une participation de contrôle dans une compagnie. Elles peuvent aussi survenir quand un investisseur cherche à obtenir une représentation au conseil ou des droits de votes supérieurs à sa participation – en fait, tout ce qui va au-delà d'un investissement passif ». L'inquiétude de M. Kimmit peut s'expliquer par la multiplication récente des sauvetages d'institutions financières par des fonds souverains étrangers. Un autre grand nom de la finance américaine, Bear Stearns, a annoncé un accord en octobre avec la banque chinoise Citic, qui lui donne potentiellement jusqu'à 9,9 % de son capital. La banque universelle Citigroup a pour sa part dû être renflouée d'urgence à hauteur de 7,5 milliards de dollars par le fonds d'investissement de l'émirat d'Abou Dhabi. Quant à une autre victime illustre de la crise des subprimes, le Suisse UBS, il a dû lever 13 milliards de francs suisses, dont 11 milliards fournis par le fonds du gouvernement de Singapour (Government of Singapore Investment Corporation) et deux milliards par un investisseur anonyme du Moyen-Orient.
Le monde compte aujourd'hui une quarantaine de fonds souverains, dont les actifs sont évalués autour de 2500 milliards de dollars. Ils se développeraient sur la base de 1000 milliards de dollars par an, selon une estimation avancée dans ce même article par M. Kimmit. Certains analystes avancent que ces fonds pourraient atteindre 10 000 à 15 000 milliards de dollars d'ici 2015, à comparer à la capitalisation cumulée des cinq cents plus grandes sociétés américaines, qui est actuellement de l'ordre de 12 000 milliards de dollars.
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La conclusion nous sera dictée par l’avenir, mais ce dont on est certain c’est que la crise des subprime n’est pas finie, comme l’affirme le président du directoire de l'assureur français Axa, Henri de Castries11, même s’il en modère l‘ampleur future. Ce dernier a en effet déclaré que la crise des crédits à risque américains (subprime) n'était « pas derrière nous » mais qu'il ne fallait « pas l'exagérer ». « Les autorités américaines ont pris conscience de l'ampleur de la crise et ont pris des mesures pour la corriger », a dit M. de Castries au Grand Jury Europe 1/TV5 Monde/Le Parisien. « C'est une crise bancaire d'abord, ce n'est pas une crise industrielle ou une crise des entreprises d'assurance: quand vous regardez les indicateurs, sur les taux de croissance, les commandes, les industriels vont bien, l'Asie va bien », a-t-il relativisé. M. de Castries n'a pas exclu toutefois que la crise financière contamine l'économie réelle. Cette crise « nous menace car elle peut avoir un effet sur l'activité des banques. Moins d'activité des banques, c'est moins de crédit, et moins de crédit, c'est moins de croissance », a-t-il dit. Le président du directoire d'Axa, qui réalise 80% de son chiffre d'affaires hors de France, a pointé du doigt la responsabilité des banques américaines dans cette crise. « Les Etats-Unis ont donné pas mal de leçons au monde sur la gouvernance mais ils pourraient faire des progrès en matière de protection des consommateurs », a-t-il dit. Des établissements financiers américains, qui n'ont souvent pas le statut de banque, ont prêté à des ménages à risque sans prendre en compte leur solvabilité. Avec la remontée des taux d'intérêt, ces ménages, qui avaient emprunté à taux variable, se sont retrouvés dans l'incapacité d'honorer leur dette.
Evoquons aussi cette dette publique américaine qui dépasse pour la première fois de son histoire les 9.000 milliards de dollars. Dmitry Sudakov, dans un article paru le 9 novembre 2007 dans la Pravda12, évoque cette dette qui ne cesse de croître suite aux relèvements successifs des limites fixées par le Congrès. En effet, Henry Paulson, ministre des finances des Etats-Unis, a instamment prié le Congrès d'adopter le projet de loi augmentant la limite de la dette nationale à 9,815 billions de dollars (comparé aux 1,2 billions de la dette publique française). C’est la cinquième fois durant la présidence de George W. Bush que le Congrès relève la limite de la dette nationale, pour un total de 3.865 milliards de dollars. La dette publique des États-Unis a atteint le niveau d’un billion de dollars (mille milliards) au cours de la présidence de Ronald Reagan dans les années 80. Aujourd'hui, rapporte ITAR-TASS, chaque Étasunien détient environ 33.000 dollars de la dette nationale, contre 27.600 dollars pour les Français (au cours de 1 euro = 1,45 dollars). Si les Étasuniens voulaient vendre l’intégralité des USA pour rembourser, il faudrait qu’ils obtiennent le prix moyen de 10.482 dollars l’hectare. Cette dette publique insupportable s’ajoute à la dette des ménages et à celle des entreprises qui dépassent les 200% de leurs revenus.
Or, ce n’est pas la croissance qui va nous sauver, car le FMI vient de réduire ses prévisions de croissance13 : « Le Fonds monétaire international (FMI) va réduire à nouveau ses prévisions de croissance économique 2008 pour les Etats-Unis et l'Europe en raison de la crise persistante du crédit […], selon les déclarations faites par le chef économiste du FMI au quotidien financier allemand Börsen-Zeitung : « Nous ne pourrons pas maintenir notre prévision de croissance de 1,9% pour les Etats-Unis, ni celle de 2,1% pour l'Europe ». Les mauvaises nouvelles pour la croissance ont prédominé depuis octobre dernier et la dernière révision à la baisse des objectifs de croissance du FMI, ajoute Simon Johnson, précisant que le Fonds fournirait de nouvelles estimations en janvier […] Le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, a déclaré le vendredi 21 décembre que la stabilité financière avait pâti de la crise du « subprime » et que la croissance américaine et européenne allait en être affectée.
L’analyse14 de James Galbraith, fils de John Kenneth Galbraith, un des plus grands économistes américains, est plus sévère et plus critique que les propos du PDG d’Axa, Henri de Castries et les prévisions du FMI. Il s'en prend à la corruption des marchés et appelle à de nouvelles régulations pour protéger l'intérêt public. Toujours loin de ce qu'il faudrait pour faire face à la crise systémique qui est devant nous, son analyse nous permet de mieux comprendre la situation actuelle et les solutions à y apporter. Réagissant à l'une des questions portant sur le fait que tous les « oracles » de l'économie nous disent qu'il ne faut pas craindre un krach à la 1929 car les « fondamentaux sont bons » et la « croissance mondiale solide », Galbraith a dit « on disait la même chose avant la crise de 1929. Les années 20 connurent le plein emploi sur fond de croissance insolente et de spéculation boursière, à l'image des années 90 […] Le cycle actuel est similaire. Depuis 1995, les Etats Unis connaissent une période de croissance à crédit, financée par les dettes privées des particuliers et des entreprises à la faveur d'abord de la bulle Internet, gonflée par des « business plans » reposant sur du vent, puis de cette bulle immobilière financée, elle, par les crédits hypothécaires reposant sur du vol ». Galbraith s'attaque ensuite aux injections de centaines de milliards d'euros et de dollars par les Banques centrales destinées à sauver les banques qui ont multiplié les opérations aventureuses, et qui équivalent à « absoudre les banques de tous les péchés »15. Galbraith appelle à une « réforme approfondie du marché des capitaux. Car l'instabilité n'a pas toujours été de mise ! Des années 50 aux années 70, par exemple, on n'avait presque pas ce genre de problème. Il existait un système de régulation publique qui était assez fort. Depuis les années 90, on est revenu aux années 20, à la régulation par le marché, et l'on voit ce que cela donne : on va de bulles en bulles et de krach en krach ».
« Reformer aujourd'hui », continue Galbraith, « c'est un peu appliquer de la criminologie à l'économie » il faut d'abord disséquer les preuves, remonter les chaînes. « Comme dans le circuit de l'argent sale de la drogue, quelles sont les banques qui ont recyclé ou injecté des fonds dans des institutions douteuses ? Enquêter sur les agences de notation, qui, une fois, de plus, n'ont rien vu venir et ont validé l'état financier d'instruments spéculatifs frauduleux. Créer une autorité indépendante, une sorte d'agence sanitaire appliquée aux banques et aux crédits, pour éviter que se referment de tels pièges. » A la question de savoir si ces crimes financiers peuvent être punis, Galbraith répond par l'affirmative, revenant sur la crise des caisses d'épargne où les autorités ont poursuivi un millier de financiers. « Mais la vraie alternative », conclut Galbraith, « passe par un rééquilibrage où l'intérêt privé ne primerait plus sur l'intérêt public. Où la régulation se ferait au profit des particuliers, des petits consommateurs de produits financiers, et non plus des grands acteurs du marché.» Enfin questionné sur les prévisions de l'ancien patron de la Réserve Fédérale, Greenspan qui prédit « une crise économique virulente », Galbraith répond : « Il dit la vérité. Il n'est plus contraint, il ne déguise plus ses mots ».
Il faudrait être aveugle pour ne pas voir que tous ces éléments sont autant de signes négatifs qui ne peuvent que déboucher que sur une crise économique et financière mondiale, n’en déplaise aux éternels optimistes, qui en d’autres temps ont plongé la France dans des crises ou des conflits qui n’ont pas toujours tourné à notre avantage. Il convient donc de mettre en place tous les moyens et les mesures qui éviteront que cette crise ne se transforme en catastrophe et en tsunami qui nous ramèneraient soixante en arrière. Effectivement, il s’agit de penser déjà à un plan Marshall, à la mise en place d’un plan indicatif qui permettra de surfer sur la vague des subprime pour qu’elle ne nous engloutisse pas.
MESSAGE A CEUX QUI NOUS GOUVERNENT
Messieurs,
Depuis juin 2007, la crise des crédits immobiliers à risques s’est propagée des Etats-Unis à l’Europe. Elle a d’abord touché le marché de l’immobilier, puis les marchés monétaires et financiers, et enfin l’économie. L’actualité de décembre 2007 et des premiers jours de janvier 2008 confirme l’analyse faite dans mon ouvrage : « Krach 2007 : la vague scélérate des subprimes », paru en novembre 2007.
Le manque de réalisme de certains conseillers économiques, qui ne sont que peu ou prou imprégnés de la philosophie et de la stratégie des entreprises, conduit le gouvernement Fillion à accompagner la crise actuelle plutôt qu’à la combattre. Vingt cinq ans passés à des postes de responsabilités dans le monde de l’entreprise, m’ont appris que seul le réalisme conjugué à la première personne de la rentabilité et de la profitabilité, pouvait permettre d’atteindre ses objectifs.
La majorité des chefs d’entreprises de TPE, de petites PME, celles qui ont entre 0 et 20 employés, qui créent de l’emploi et représentent près de 80% de la valeur ajoutée (PIB) du pays, se sentent très peu concernés par les nouvelles mesures du gouvernement (heures supplémentaires défiscalisées, contrats nouvelle embauche, etc.) car même si on leur donnait la lune ils n’embaucheraient pas si leur portefeuille de commande est vide et le marché atone. Pour que leur « boutique » tourne, il faut uniquement que la demande soit au rendez-vous, donc que le pouvoir d’achat progresse, pas avec les quelques sous des heures supplémentaires – les entreprises n’aiment pas payer les heures supplémentaires, et préfèrent que leurs employés récupèrent, car elles savent que même avec moins de personnel elles obtiendront autant de travail, par la motivation et l’adaptation permanente aux fluctuations quantitatives du travail –, mais avec une augmentation conséquente des salaires, sans pour autant pénaliser les coûts.
Les économistes américains, que les gouvernements français soient de droite ou de gauche, se sont toujours gaussés de nos mesurettes, de nos réductions d’impôts dérisoires, là où ils considèrent qu’il faut y aller « à la louche » avec en prime des crédits à taux zéro et autres mesures incitatives fortes (sans pour autant tomber dans leurs excès).
Actuellement, tous nos maux viennent de la rémunération du capital qui progresse beaucoup plus vite que celle du travail (qui représente pourtant les trois quarts de la demande), qui régresse et se réduit comme peau de chagrin. De 1998 à 2006, 0,01% des français les plus riches ont vu leurs revenus augmenter de 42,6%, 0,1% de 32%, 1% de 19,4%, 10% de 8,7% tandis que les autres soit 90% de la population active voyaient leurs revenus progresser seulement de 4,6%. Par ailleurs, le nombre de millionnaires dans le monde a progressé entre 2003 et 2006 de 8,3% et leur patrimoine de 11,4% ; ceux-là même qui alimentent l’économie virtuelle (l’économie financière où la spéculation règne) au détriment de l’économie réelle (physique). C’est la cause principale d’une économie mondiale qui se grippe et qui voit se profiler à l’horizon la récession, malgré le poids de la croissance chinoise fortement endettée, et qui ne doit ses bons résultats qu’à ses exportations vers les Etats-Unis et l’Europe dont les économies battent de l’aile.
Pour relancer la croissance en France, pourquoi ne pas exonérer de CSG et de CRDS, d’une part les salaires de moins de 1500 euros net (salaire médian) c’est-à-dire 50% des travailleurs, voire aller jusqu’à 2000 euros (65 à 70% des salariés), et d’autre part les PME de moins de 20 ou jusqu’à 50 salariés – au-delà il y a destruction d’emplois –, c’est-à-dire celles qui créent réellement de l’emploi, en faisant supporter le manque à gagner par les entreprises qui débauchent plus qu’elles n’embauchent, par les stock-options comme le suggérait Philippe Séguin (Premier président de la Cour des comptes), ou plus logiquement par les marchés financiers en général (une sorte de taxe Tobin relookée), sachant que les revenus du capital et à fortiori les plus-values ne subissent pas les prélèvements de la CSG et de la CRDS. En effet, les transactions quotidiennes sur les produits financiers (principalement les produits dérivés) représentent trois fois… le PIB à l’échelle mondiale. Une goutte d’eau dans un océan de profit qui permettrait non seulement de résorber le déficit de notre système de protection sociale mais aussi d’effacer notre dette publique… Qui parlerait alors de fuite de capitaux qui de toute façon ne s’investissent pas dans l’économie réelle !
1Lorsque George Soros et ses amis spéculateurs ont décidé d’attaquer la Livre sterling puis le Franc en 1992 et 1993 respectivement, rien n’y a fait (sauf contre le Yen) et les monnaies se sont dépréciées fortement ou ont été dévaluées, les banques s’inclinant face aux sommes déployées par la spéculation. On pourrait citer beaucoup d’autres cas similaires où les banques centrales ont dû baisser les bras.
2www.trend.be
3N’en déplaise à Madame Christine Lagarde, le ministre français de l’économie, la croissance française ne devrait pas dépasser les 2% en 2007 et en 2008, d’après les prévisions de l’OCDE parues début décembre, même si depuis la croissance française au troisième trimestre a été révisée à la hausse (0,8% au lieu de 0,7%). Par ailleurs, d’après les prévisions de l’OCDE, le déficit budgétaire en 2008 tournera aux alentours de 2,6% du PIB tandis que la dette publique s'alourdira pour atteindre 67% du PIB d'ici fin 2009. Ce qui ne cadre pas avec les intentions du gouvernement français qui a transmis cette semaine à la Commission européenne son « programme de stabilité », dans lequel il compte sur une dette publique à 64,0% du PIB en 2008 et à 63,2% en 2009, qui serait ramenée sous la barre des 60% en 2012. Mais, ce scénario optimiste se base sur des taux de croissance contestés, compris entre 2 et 2,5% en 2008 et de 2,5% en 2009, et sur un déficit public de 2,3% du PIB l'an prochain et de 1,7% en 2009. La BCE confirme les prévisions de l’OCDE. En septembre, alors que la crise des marchés du crédit n'avait fait que commencer, la BCE avait dit tabler sur un ralentissement de la croissance des Treize à 2,3% en 2008, contre 2,5% attendu cette année. Fin novembre, Gertrue Tumpel-Gugerell, membre du Directoire de la BCE, a déclaré à la TV polonaise : « Nous anticipons pour 2008 une croissance au potentiel, c'est-à-dire autour de 2% ».
4« Krach 2007 : La vague scélérate des subprime », André-Jean Locussol-Mascardi, Le Manuscrit, novembre 2007.
5La crise des subprimes s’amplifie. Les dirigeants des banques centrales pensent que l’on a sous-estimé la crise. Les autorités des marchés financiers, les analystes des plus grandes banques d’affaires américaines multiplient les conseils de prudence vis à vis des investissements sur les marchés financiers. Plus rien ne peut enrayer la chute des marchés boursiers, pas même les centaines de milliards de dollars et d’euros déversés dans l’économie, pour aider les banques en graves difficultés, sous forme de nouveaux crédits qui ne font que gonfler la masse monétaire M3, signe d’une reprise galopante de l’inflation. C’est le tonneau des Danaïdes. Les plus grands experts économistes de la planète sont de plus en plus persuadés que nous sommes encore loin de la vérité, et que la crise du crédit hypothécaire à risques débouchera inévitablement sur une très grave crise économique, pire qu’en 1929…
Fin octobre, Merrill Lynch, 2ème banque d’affaires américaine, annonce qu’elle va provisionner 8 milliards de dollars de dépréciations dans ses comptes. On évoque une série d’accord avec des hedge-funds pour dissimuler ou retarder l’annonce de nouvelles pertes. Des manipulations comptables suspectes sur lesquelles enquête la Securities and Exchange Commission (SEC). Le 7 novembre, Merrill Lynch déclare que son exposition totale aux créances à risque (obligations CDO ou crédits immobiliers à risque subprime), se monterait en tout à 27,2 milliards de dollars, soit 6,3 milliards de dollars de plus que ce que la banque américaine avait révélé fin octobre.
Le 12 novembre, E-Trade Financial Corp, spécialiste du courtage immobilier en ligne, prévoit des pertes plus fortes que prévu au quatrième trimestre à cause des subprimes et n’exclut pas une possibilité de banqueroute. Le 19, le leader américain des prêts hypothécaires, Countrywide, prévient les autorités de régulation des marchés américains (NASD et SEC) que s’il était classé dans la catégorie des investissements à risque, il risquait le dépôt de bilan. Citigroup, 1ère banque mondiale, est frappé de plein fouet par cette crise qui ralentit la croissance américaine et mondiale. Le 5 novembre 2007, elle annonce des pertes colossales, et prévoit des dépréciations supplémentaires de 8 à 11 milliards de dollars pour son portefeuille de crédits subprimes – dont la valeur est devenue quasiment nulle –, ce qui va réduire son résultat net de 6 à 7 milliards de dollars. Des chiffres sous-évalués d’après Goldman Sachs, qui publie le 19 novembre une note selon laquelle Citigroup devrait procéder à 15 milliards de dollars de dépréciations d’actifs sur les deux prochains trimestres, et ajoute : « Alors que nous entrons dans le 5e mois de crise, il semble qu’une fin de crise du crédit hypothécaire américain est encore loin […] Il y a un sentiment général qui se répand désormais, selon lequel les choses vont encore empirer avec les subprime ».
En Europe, Northern Rock, 1ère banque privée britannique, en pleine déconfiture, va emprunter à la Banque d’Angleterre 25 milliards de livres sterling (52 milliards de dollars !). Swiss Re, 1ère société mondiale de réassurance, a annoncé que son exposition à la crise subprime risquait de lui coûter 1,2 milliards de francs suisses (1,1 milliards de dollars). En France, la Société Générale a passé 404 millions d’euros (600 millions de dollars) de dépréciations au 3e trimestre, dont 230 millions d’euros au titre des crédits subprime, ce qui est loin des chiffres des banques d’affaires américaines, mais ne constitue pas un point final aux dégâts causés par les crédits hypothécaires à risques. Pour chiffrer cette exposition aux subprimes, la Société Générale a retenu l’hypothèse la plus pessimiste, soit une perte d’environ 200 milliards de dollars pour l’ensemble du secteur immobilier résidentiel américain. Mais la réalité est parfois bien loin des prévisions les mieux élaborées.
Chaque jour, de nouvelles annonces noircissent le tableau des résultats et des bilans, et nous réserve son lot de surprises. Nous ne sommes qu’au début de l’effet domino, car le système bancaire mondial est en train de s’effondrer. Pire, cette crise aura des conséquences incalculables sur l’économie mondiale, dont les indicateurs de croissance sont revus régulièrement à la baisse.
Cette crise – qui fait suite aux nombreuses crises des années 30, 80 et 90, l’avant-dernière étant celle des technologiques (ou Nouvelle économie) en 2000 – est analysée et décrite en détail avec ses conséquences financières et économiques, dans l’ouvrage d’André-Jean Locussol-Mascardi : « KRACH 2007, la vague scélérate des subprimes », aux éditions Le Manuscrit (novembre 2007).
Extrait : « En 2004, le PIB américain a progressé de 495 milliards, alors que la dette totale (ménages + entreprises + administrations publiques) augmentait de 1.920 milliards. Presque 4 fois plus… De tels déséquilibres ne pourront pas durer éternellement ! En 1929, avant que n’éclate la dernière grande crise du capitalisme, la dette totale américaine représentait 140% du PIB. Elle dépasse en 2005/2006 les 240% du PIB… »
6Extraits de Challenge.fr, le 18/12/07.
7L'Expansion.com du 14 décembre 2007
8Nouvelle Solidarité, le 10/12/07
9Reuters le 29/11/2007
10extraits d’une dépêche de AFP, du jeudi 20 décembre 2007
11AFP, le 9 décembre 2007
12Original : http://english.pravda.ru/world/americas/09-11-2007/100549-national_debt-0
13La Tribune.fr du 24/12/0714Interview donnée à Libération le 24 septembre 2007, et reprise par le journal Nouvelle Solidarité.
15Nouvelle Solidarité titrait le 21 novembre : « Les pertes des banques se comptent en milliers de milliards », et continuait : « Selon les annonces de ces derniers jours – relatives à des pertes dues à la crise financière, de la part de grandes banques – l’énorme bulle de contrats dérivés financiers détenus par les banques, est évaluée à 500 000 à 700 000 milliards de dollars, ajoutée aux « pertes à effet de levier » sur les actifs de crédit, ce qui constitue le nouvel épicentre des pertes comme le LPAC et l’EIR l’avaient prévu, avec par conséquent un krach de plusieurs milliers de milliards de dollars face à nous ». Par ailleurs, le journal proche l’économiste américain Lyndon Larouche, précise que le 16 novembre, l’économiste en chef de Goldman Sachs pour les Etats-Unis, Jan Hatzius, a publié une estimation effrayante des dégâts dans le système bancaire. Il prévoit que les pertes directes pour les banques américaines au cours de l’année prochaine seraient de 400 milliards de dollars (une estimation très similaire venait juste d’être produite par l’économiste en chef de la Deutschebank). En supposant simplement que la moitié de ces pertes soient en actifs fortement multipliés (où le taux de dollars empruntés dans l’argent utilisé pour acheter les actifs est de 10 pour 1), Hatzius prévoit que la baisse totale dans la capacité des banques à prêter sera de 2 000 milliards de dollars. A titre de comparaison, en 2006, selon la Réserve fédérale, les prêts totaux des banques américaines aux ménages et aux sociétés non financières étaient de 3 240 milliards de dollars. En déclarant beaucoup moins que la réalité, Hatzius appelle le résultat « une récession substantielle ».
bravo
article de très grande qualité, même s’il est très inquiétant…
« L’ORGUEIL PRECEDE LA CHUTE »
que va faire le tzar….TOUT EST POSSIBLE ET ON VA AVOIR DES SURPRISES !
C’est un secret!
Vous avez fait un très grand effort de pédagogie…mes félicitations. La mondialisation a au moins un avantage….la dématérialisation et l’accessibilité de l’information. Elle nous permet de prendre connaissance de vos analyses sur cette crise…car les grands médias ne le font pas; soit par ignorance soit par une volonté délibérée de cacher la vérité.
Encore une fois merci pour cette analyse.
tomtom
félicitations
Terriblement réaliste.
Que font donc les connards qui gouvernent le monde?
Un seul élément positif: cette déroute totale risque de nous sauver des envies de réforme de civilisation de notre NAZI national avec son gyrophare sur et dans la tête.
CRISE DU SUB-PRIME, JEUX OLYMPIQUES DE PEKIN, ET DEFAUT DE PAIEMENT RUSSE ET CHINOIS
La crise du sub-prime aura-t-elle pour effet inattendu d’amener les agences de notation de crédit à attribuer des notes « distressed debt » (familièrement « junk bonds » ou « obligations pourries ») à la totalité des obligations émises par des entités privées ou publiques chinoises et russes, ajoutant ainsi une information catastrophique supplémentaire à des marchés de crédit qui n’en manquent déjà pas? Les enquêtes de plus en plus nombreuses, engagées de part et d’autre de l’Atlantique, portant sur les conditions dans lesquelles les agences de notation de crédit (credit rating agencies ou CRA) attribuent des notes aux obligations émises par leurs clients, pourraient mettre en valeur de façon incontournable les conflits d’intérêts qui, selon de très nombreux initiés, conduiraient depuis des années les CRA à attribuer des notes d’une qualité exagérément bonne à des émetteurs dont la solvabilité ou la volonté réelle de rembourser sont loin d’être avérées, dans le seul but de préserver leur chiffre d’affaires, dans la mesure ou ce sont les émetteurs eux-mêmes qui rétribuent les CRA. Une remise à plat des procédures de notation devrait amener les agences à retirer leurs notes « investment grade » à la Fédération de Russie et à la République Populaire de Chine, afin de tenir compte du fait que ces deux pays sont toujours en état de défaut de paiement sur leurs obligations prérévolutionnaires.
Depuis quelques mois l’on assiste à une accélération des enquêtes dirigées contre les agences de notation, visant à éclaircir les conditions dans lesquelles les « Collaterized Debt Obligations » ou CDO se sont vues attribuer des notes nettement supérieures à ce que leur qualité semble pouvoir justifier. Aux Etats-Unis ces enquêtes sont diligentées notamment par le FBI, la Securities and Exchange Commission (SEC), les District Attorneys du Connecticut et de l’Etat de New York; en Europe, après la déclaration conjointe de 4 chefs d’Etats et de gouvernements et de M. Barroso du 29 janvier 2008 à Londres, la Commission Européenne adresse un avertissement aux agences, lesquelles ont selon Michel Prada Président de l’Autorité des Marchés Financiers été incontestablement défaillantes.
Le cœur du reproche fait aux CRA, c’est qu’elles sont payées par les émetteurs qu’elles sont priées de noter, ce qui crée un conflit d’intérêts évident: quel émetteur accepterait de payer une agence pour une note défavorable dont chacun sait qu’elle aurait pour conséquence immédiate de renchérir très considérablement le cout du crédit pour cette émetteur, voire même de le priver de toute source de crédit? Il faut savoir que pour les trois principales CRA – qui contrôlent à elles seules près de 96% du marché mondial de la notation (source: Bloomberg markets), le chiffre d’affaires tiré de la notation se compte en milliards de dollars annuels: précisément 1,52 milliards en 2006 pour Standard and Poors (source: Bloomberg markets).
Les CRA ne nient pas l’existence de ce conflit d’intérêts, même si elles prétendent avoir mis en place les mesures nécessaires à en éliminer les effets.
Le reproche leur est régulièrement adressé lors de chaque crise importante: Penn Central, Parmalat, Enron, Worldcom,… et maintenant le sub-prime. En pareil cas la défense des agences est systématiquement la même:
1.Les notes qu’elles attribuent ne seraient que le reflet de leur opinion, et ne garantissent en aucun cas le respect des conditions contractuelles d’émission.
2.Les notes qu’elles attribuent seraient également le reflet des informations qui leur ont été communiquées ou qui étaient disponibles; mais, ces notes ne pourraient évidemment pas refléter des informations qui ne leur aurait pas été divulguées ou qui ne seraient pas disponibles.
En quoi la Russie et la Chine sont-elles concernées?
Le problème est que depuis le retour des émetteurs tant privés que publics de la Fédération de Russie (FR) et de la République Populaire de Chine (RPC) sur les marchés de capitaux internationaux à partir des années 1990 ces deux pays se sont vus attribuer par les trois principales CRA mondiales des notes « investment grade » (investissement de qualité), normalement réservées à des émetteurs à la fois solvables et respectueux de leurs obligations contractuelles, alors que les trois CRA ont été officiellement informées à de très nombreuses reprises des défauts de paiement d’ailleurs notoires de ces deux pays sur leurs dettes souveraines d’avant 1917 pour la Russie et d’avant 1949 pour la Chine, défauts qui illustrent sans ambigüité le fait que malgré leur solvabilité présente ces deux émetteurs ne sont pas disposés à respecter les obligations contractuelles qui leur incombent pourtant en vertu des principes de continuité des Etats établis et universellement reconnus du droit international.
Ces notes « investment grade », attribuées au lieu et place des notes « default » ou « selective default » normalement attribuées aux mauvais payeurs et que justifient à l’évidence les refus de payer de la FR et la RPC, illustrent clairement l’aspect fallacieux de l’argument no. 2 ci-dessus invoqué en défense par les CRA: en effet ces notes sont attribuées non comme elles le prétendent par suite d’informations incomplètes ou erronées mais bien au contraire en dépit de la connaissance d’informations exhaustives et vérifiables sur la situation défaillante de l’émetteur.
Comment en sommes-nous arrivés là?
Obtenir une note « investment grade » constitue un préalable obligatoire pour quiconque veut émettre des emprunts sur les marchés internationaux. La perspective des émissions de plus en plus importantes qui se profilaient à l’horizon dans la deuxième moitié des années 1990 en provenance de la FR et de la RPC constituait donc une opportunité très importante pour les CRA, dont le chiffre d’affaires, et donc le bénéfice, est constitué d’un pourcentage prélevé sur le montant des émissions qu’elles sont appelées à noter.
Il est capital de comprendre qu’il n’est normalement pas d’usage d’attribuer à un émetteur quel qu’il soit d’un pays donné une note de meilleure qualité que celle donnée au gouvernement de ce pays. Ainsi, en attribuant la note « default » ou « selective default », seule justifiée dans le cas de la FR ou de la RPC, aux gouvernements de ces deux pays, les CRA se seraient privées de l’intégralité de la chaine de bénéfices en provenance de la totalité des émetteurs publics ou privés de ces pays puisqu’en vertu du principe énoncé plus haut ils auraient tous été notés au mieux « default » ou « selective default », comme le gouvernement. Inutile de dire que dans ces conditions personne n’aurait demandé à être noté et les CRA n’auraient donc rien gagné. C’est ce qu’expliquait d’ailleurs très bien Helmut Reisen, chef de la division de recherche au Centre de développement de l’OCDE dans un article du Monde de l’économie dès 1998: « De plus, les agences de notation tirent l’essentiel de leurs revenus des Etats qui sollicitent leurs services ; aussi répugnent-elles à abaisser leur cote de crédit. La peur de mécontenter leurs clients et de voir baisser la demande de leurs services et les revenus qui s’y rapportent peut introduire une rigidité à la rétrogradation du classement des pays dans les périodes d’afflux excessif de capitaux ».
Ainsi, la Fédération de Russie tout autant que la République Populaire de Chine se sont-elles vues attribuer des notes dites « investment grade » (investissement de qualité) par les trois principales CRA mondiales, au lieu des notes « default » ou « selective default » qu’elles méritent; dès lors ces deux pays ont donc pu se financer sur les marchés internationaux sans honorer leurs engagements préalables.
Que va-t-il se passer maintenant?
Les marchés et les autorités règlementaires s’en étaient accommodés jusqu’à aujourd’hui, car même si les encours non remboursés s’élèvent a bien plus de US$ 100 milliards dans les deux cas, ces montants n’avaient à être provisionnés nulle part puisque les émissions correspondantes étaient pour la plupart entre les mains de particuliers, et qu’au surplus les pertes étaient déjà « provisionnées » depuis longtemps.
Mais aujourd’hui les CRA, très sévèrement attaquées pour leurs responsabilités dans la crise mondiale des subprime, vont devoir redorer leur blason. Comment peuvent-elles le faire si elles persistent à nier l’évidence de deux défauts de paiement notoires et mondialement reconnus en s’obstinant à noter la FR et la RPC « investment grade »? Le fait est qu’à la veille des Jeux Olympiques de Pékin, une dégradation de la note souveraine de la République Populaire de Chine à « Selective Default » créerait un problème majeur pour la Chine – ainsi d’ailleurs que pour toute la planète financière. Or les porteurs d’emprunts défaillants ne semblent pas prêts de relâcher la pression sur les CRA. Quant à la Fédération de Russie, même en l’absence de jeux olympiques son problème est que certains des « emprunts russes » défaillants – qui étaient encore inscrits à la cote officielle Eurolist by Euronext de la Bourse de Paris jusqu’en octobre 2007 – pourraient bien trouver une place au sein de ces « fonds vautours » qui sont prêts à se donner la peine de poursuivre les mauvais payeurs solvables là ou d’autres abandonnent, et qui eux non plus ne vont pas relâcher leur pression sur les CRA.
c’est en effet exact le sujet avait été traité également de façon magistrale il y a pas mal de temps sur paca informations économiques http://www.pacainfoeco.com en plusieurs articles :
http://www.pacainfoeco.com/actune/070907.hugues.html
http://www.pacainfoeco.com/actune/071214.hugues.html
http://www.pacainfoeco.com/actune/2008/080125.hugues.html
http://www.pacainfoeco.com/actune/2008/mars08/080328.hugues.html
La réalité économique ce n’est pas le rebond de + 8 % de la Bourse française, mais l’économie réelle qui va deplus en plus mal…
N’oublions pas plusieurs faillites sont en cours qui concernent des compagnies d’aviation… ALITALIA et d’autres quiconnaissent de graves difficultés, et ce n’est que le début car la crise économique arrive au grand galop. Ce n’est pas du pessismisme mais du réalisme. Que ferons nos gouvernants lorsque l’inflation sera à 5, 6 ou 7 % voire plus, et que le chômage se rapprochera des 10 % (Aux Etats-Unis on est passé de 4 % à plus de 6 % en quelques mois). Qui consommera, qui investira dans l’économie réelle ? que fera-t-on avec une demande atone ? S’ensuivra une croissance négative et la récession. Rappelons que les prévisions de l’OCDE et du FMI pour 2008 et 2009 ont été divisées par deux… là aussi en quelques mois et que celles-ci se rapprochent dangereusement du 0 % dans la zone euro et aux Etats-Unis pour 2009 (0,7 et 0,8)…