Quinze militaires ont été mis à la disposition de la justice pour leur participation supposée dans l’assassinat de deux jeunes gens en janvier de l’année passée, jeunes qui avaient ensuite été présentés comme des paramilitaires tués au combat.

Parmi les militaires, on retrouve un colonel, un major, deux officiers, un sous-officier et 10 soldats qui sont donc accusés non seulement d’avoir assassiné deux jeunes hommes, mais en plus d’avoir maquillé la scène du crime en habillant les deux cadavres avec des uniformes et en modifiant les lieux pour faire croire qu’un affrontement s’y était déroulé. Les quinze militaires sont également accusés de faux témoignages, d’association de malfaiteurs et d’entrave à la justice.

Après la plainte portée par les familles des victimes contre ces militaires, ces derniers avaient été suspendus de leurs fonctions, ce qui a permis à la justice civile de se saisir du cas et de poursuivre l’enquête. Les éléments scientifiques réunis par les enquêteurs prouvent à suffisance qu’il n’y a pas eu de combat et que la scène du crime a été altérée.

Cette accusation contre des militaires s’ajoute aux mille trois cents autres cas d’exécutions à propos desquelles une enquête judiciaire est ouverte. Comme le signale Philip Alston, rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, le grand nombre de cas pour lesquels la justice a été saisie prouve que les exécutions d’innocents par les forces armées étaient devenues une pratique systématique.

Cependant, Philip Alston relève qu’aucune preuve n’a pu être découverte laissant supposer que tous ces assassinats sont en relation avec une quelconque volonté politique de l’actuel gouvernement.

Au contraire, le grand nombre d’enquêtes suggérerait que le gouvernement Uribe a décidé de remettre au pas les forces armées obligeant la "grande muette" à s’expliquer devant les juges.

Le rapporteur de l’ONU souligne d’autre part qu’avec mille trois cents enquêtes ouvertes, les autorités militaires ne peuvent plus parler de quelques "pommes pourries"

Espérons que la justice colombienne pourra poursuivre son travail en toute indépendance, et que les coupables seront jugés et punis. Souhaitons également que les forces armées chargées de combattre le terrorisme qui sème le chaos en Colombie depuis bientôt 50 ans n’oublient pas leur mission et n’agissent plus comme leurs ennemis.

La transparence dans les grandes opérations militaires et la fin de l’impunité pour les soldats coupables d’exactions pourront seules rendre au peuple sa confiance dans les forces armées, ce qui poussera les populations à une plus grande collaboration lors des campagnes menées contre les groupes paramilitaires ou les différentes guérillas.

Bien que l’on comprenne le stress des militaires au combat, il est regrettable de constater que pratiquement sur tous les terrains d’opérations, où qu’ils se situent, les forces armées s’en prennent souvent aux populations qu’elles sont chargées de défendre.