Le troisième et dernier volet de la trilogie Clearstream, L’Affaire des affaires, de Denis Robert, scénarisé graphiquement par Laurent Astier, s’intitule « Clearstream, manipulation ». C’est très stupide, mais je l’ai reçu en retard, et j’ai un avion à prendre. Je vous conseille donc de vous reporter au site de Dargaud (mdp « images »). Mais, quand même, quelques furtives impressions.

Nous voulions être hôtesse de l’air (salut les copines, « beau cul », aurait dit Dominique Strauss-Kahn incidemment) ou journaliste. Denis Robert a sauté la tête la première dans le journalisme. J’ai franchement déconseillé à mes deux enfants de suivre mes traces en cette profession. Il suffit de se plonger dans le troisième tome de L’Affaire des Affaires (Dargaud éd.) pour comprendre pourquoi. Or donc, j’ai cet avion à prendre et je vous couche à soixante mots/minute mes impressions. Comme vous le savez, je me suis tapé certaines audiences de Clearstream II, avec Lahoud, Gergorin, de Villepin et consorts (vont pas aimer, ce « consorts », et je vais encore me mettre à dos Plenel, de Mediapart), et Isabelle Horlans sur le banc de presse (ouf, cela meuble les temps morts). Lahoud, dans l’album (c’est de la BD), ne ressemble pas à mes photos. Mais bien à ce que j’ai pu ressentir en audience. On projette, on suppute. Mais personne ne ressent ce que c’est que d’être aux premières loges, ni dans les coulisses.

Il y a plusieurs façons de le prendre. N’est pas Albert Londres qui veut, mais surtout, parfois, une affaire vous tombe entre les gencives (comme un os à ronger), et elle vous prend comme la mer chantée par Renaud. Au lieu de faire carrière, on se laisse emporter.

Vivez, vibrez cela avec Denis et Astier, et peut-être approcherez-vous de ce pourquoi l’oubli est réparateur. C’est encré noir et blanc : en fait, on passe par toutes les couleurs, genre lie de vin, violets, demi-teintes, et toutes celles qui ne correspondent pas aux agencements convenus de la gamme chromatique.

Et puis, ce décalage constant : au moment de passer le portique (de la fouille), on dit « vous avez lu Brautigan ?» (ou Tom Coraghessan Boyle, Dos Passos, Kurt Vannegut, qui vous imaginez), et c’est là qu’on se retrouve niais. Frime, ok, mais si dérisoire. Il est tenté de rendre sensible, accessible, limpide, ce qui fait vraiment notre quotidien en dépit des apparences (ce n’est pas le plus immédiat qui nous gouverne, quoi qu’on fasse). Il est si difficile d’y parvenir. Au moins, Denis Robert aura essayé quand tant d’autres ont renoncé. Idem, et au temps pour moi-même. Les deux.

 

 

 

Imaginez la solitude, celle du coureur de fond, si vous le sentez ainsi.
Imaginez l’inextricable.
La totale incompréhension.
La vanité, le bûcher, les illusions (Tom Wolfe, Balzac…).
Deux façons donc de parcourir cette BD. Agrément, intérêt, mais aussi détachement. Ou, au contraire, adhésion, ressenti, revisite. Bon, allez, on ne va pas kerouaciser plus longtemps. Entrez aussi, si vous le pouvez, en immersion. Ah, zut, j’allais oublier la brosse à dents !
Et le raton laveur… celui qui tourne la dernière page avant de passer à tout autre chose. Bons envols !