Décédé en avril 2012, Claude Miller nous a laissé en héritage son dernier film posthume, Thérèse Desqueroux, une adaptation du roman de François Mauriac. 

Je ne me souviens plus exactement en quelle classe j‘étais quand j’ai lu ce livre bouleversant mais étrangement je me souviens très bien d‘Argelouse, de la grande demeure, de son ambiance, de la somptuosité de la nature, du malaise et de l‘infernale descente aux enfers de Thérèse. 

Avec les sublimes interprétations, le cadrage, les lumières, les costumes, les paysages, les décors, la musique, sans le moindre bémol, tous les ingrédients sont là pour réanimer Thérèse Desqueyroux à travers ce film, si réussi à mon goût ! 

Thérèse Larroque (Audrey Tautou) en consentant de s’unir par le mariage à Bernard Desqueyroux ( Gilles Lellouch) assure la prospérité de leur domaine forestier tout en se conformant bon gré, mal gré, au moule auquel elle était prédestinée. 

Une vie de grande bourgeoise provinciale, où il est de bon ton de se soumettre aux conventions de rigueur comme celles de s’afficher de temps en temps en couple harmonieux, à la messe du dimanche ou le jour du marché. 

Avec son caractère en forte ébullition intérieure, Thérèse qui croyait apaiser ses pulsions par le mariage en calquant le modèle implacable que lui imposait sa société, se met tout à coup à étouffer.

Dans son immense domaine immuable, semblable à une geôle où les hauts troncs qui s‘étendent à perte de vue lui apparaissent comme des barreaux infranchissables, elle regarde sa vie s‘évaporer.

Introvertie, peu prolixe, avec un entourage obnubilé par des soucis qui ne sont plus les siens, la frondeuse incomprise, désormais animée de cette irrésistible envie d‘en découdre, finit par se perdre totalement en se livrant à une tentative d‘homicide contre son mari. 

Et là c‘est « la symphonie humaine dans tout son grouillement et tout son foisonnement », dans toute sa complexité qui semble se jouer naturellement, sans effort, sans même qu’elle ait la moindre prise sur aucun de ses mouvements. 

D’ailleurs quand bien plus tard, Anne, (Anaïs Demoustier) lui demandera le mobile de son geste, Thérèse avouera son incapacité à répondre, mettant au défi quiconque pourrait véritablement s’auto- analyser. 

Des actes aux racines souvent ramifiées et inextricables, incrustées dans nos profondeurs abyssales et si difficiles d’accès ! 

Et c’est la raison pour laquelle, malgré son geste, Thérèse sous tous ses aspects, la glacée, la détachée, la génitrice, l’insensible, la cabossée, nous touche jusqu’aux larmes. 

Et qu’il est beau ce tableau final de cette Girondine descendue à Paris en quête de son salut et noyée au beau milieu de cette communion de personnages. Avec un léger sourire qui éclaire son regard noir… 

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