Depuis quelques années, avec l’explosion démographique qu’a connue le Cameroun, le choléra est devenu un véritable problème de santé publique. Cependant, il n’était jusque là circonscrit que dans les régions septentrionales du pays où l’eau potable est rare, et les mesures d’hygiène exécrables. Mais, depuis quelque temps, la maladie des mains sales s’est invitée dans toutes les grandes villes camerounaises, dont Yaoundé la capitale politique. C’est ainsi qu’on dénombre chaque jour plusieurs dizaines de cas dans les quartiers insalubres de la ville aux sept collines. Egalement, comme la partie nord du pays, les autres villes du sud du pays sont de plus en plus elles – aussi confrontées à un sérieux problème d’eau potable. Toute chose qui a poussé, plusieurs personnes à s’investir dans la production et la vente des eaux emballée dans des sachets en plastique. Aussi, en l’absence d’une structure de contrôle, plusieurs spécialistes émettent le doute sur la potabilité de ces eaux aux origines douteuses. En ce moment où le choléra fait rage à Yaoundé, nous nous sommes proposés de lorgné un tout petit peu dans ce domaine des eaux en sachet, vendues dans tous les carrefours et les boutiques de la ville.
La crise économique qu’a connue le Cameroun ces dernières années a touché de plein fouet tous les secteurs d’activité du pays dont celui de la distribution de l’eau potable. En effet, à Yaoundé la capitale, moins d’un ménage sur dix dispose d’une borne fontaine d’eau de la CDE (la Camerounaise Des Eaux). Aussi, une bouteille d’un litre et demi d’eau minérale vendue dans les grandes surfaces coute entre 400 et 500 F.C.F.A (près d’un dollar américain), très largement au dessus du revenu du camerounais moyen. C’est ainsi que pour avoir le précieux liquide, les Yaoudéenns devraient pour ceux ayant un peu de moyens, aménager dans leur domicile des puits d’eau ; et pour les autres, sans moyens, ils doivent se battre comme ils peuvent pour se trouver un peu d’eau, même dans certains marigots nauséabondes de la ville. Si ces eaux des puits et marigots sont essentiellement utilisées pour la lessive, la vaisselle et autres, le plus dur ici est de trouver une eau propre à la consommation, surtout pour les quartiers ne disposant pas de borne fontaine payante. C’est ainsi que pour trouver une eau potable, les populations de ces quartiers doivent parcourir de très longues distances.
Depuis quelques mois, certaines structures proposent dans des sachets en plastique des eaux disent – ils des forages, à des prix défiant toute concurrence. Vendues à 50 F le paquet, on les retrouve partout, même dans les échoppes des quartiers les plus reculés. Quand à leur origine, même les détaillants de ce nouveau « business » ont du mal à vous donner une réponse fiable. C’est le cas de Henri, jeune vendeur d’eau en sachet au grand rond point de la poste centrale à Yaoundé, qui nous martèle « je ne sais pas où mon livreur les prend, mais il semble que c’est lui-même qui les fabrique dans son domicile ». Nous nous rendons alors chez un producteur de cette eau dans un quartier populaire de Yaoundé ; ici, dans sa cour, il a aménagé un forage où des jeunes gens recueillent ces eaux dans des gros récipients ; puis, ils s’en vont dans une salle, y ajoutent quelques goutes d’eau de javel et de certains produits que nous n’avons pas pu identifier, avant par la suite de les emballer dans des sachets de 50 cl chacun, et le produit est prêt à la livraison. A la question de savoir, s’ils ont une licence d’exploitation, le promoteur de la structure nous dit que la procédure est en cours.
Au jour d’aujourd’hui, on dénombre plus de deux dizaines de marque de ces eaux. Du côté des autorités, on semble ne pas mesurer l’ampleur du phénomène, pourtant, un médecin que nous avons rencontré dans un dispensaire au quartier Nkomo, a dit emmètre beaucoup de doute sur la potabilité de ces eaux.
Il est vrai que dans un contexte marqué par la pauvreté et le chômage, l’esprit d’initiative doit être encouragé et même soutenu ; mais on ne saurait le faire au détriment de la santé des populations, notamment en cette période où le choléra décime des familles camerounaises. La production et la vente de l’eau sachet fait vivre son homme ; on n’est d’accord ; mais il faut de l’ordre dans ce domaine. Car l’eau c’est la vie, mais elle peut bien aussi être la mort !
Très intéressant, cet article! Hélàs, le « trafic d’eau » ne fait que commencer et ce, à l’échelle mondiale!