À combien revient Jacques Chirac aux contribuables ? Selon Yvan Stefanovitch, de France-Soir, à guère moins d’un million d’euros par an… nationalement. N’y ajoutons pas les frais de représentation de la conseillère générale de la Corrèze, Bernadette Chirac, repartie battre la campagne, ni ce que les Chirac peuvent gratter localement. 

On ne sait encore à combien reviendra le château de Bity, monument historique depuis 1969, lorsque Bernadette Chirac décidera de ne plus du tout l’entretenir. L’enquête d’Yvan Stefanovitch, pour France-Soir, débute par une tentative d’approche de cette bâtisse. Il ne pourra constater son état de délabrement car l’un des six gendarmes de permanence aux abords (ou alertés par un dispositif de télésurveillance, allez savoir…) empêche d’aller photographier. Mais la toiture et le domaine revèlent un flagrant manque d’entretien. Bernadette Chirac y séjournerait parfois, en été, parce qu’elle se refuse à le chauffer l’hiver. La plupart du temps, lorsqu’elle est en Corrèze, elle séjourne au Pont du Bourg, dans l’hôtel Mercure d’Accor, La Séniorie (trois étoiles). Cela ne revient qu’à cent euros la nuitée (on trouve moins cher) mais Stefanovitch n’a pas eu la curiosité d’aller demander qui, au juste, réglait la note. Ni si Bernadette Chirac se ravitaille à la pompe du Conseil général pour sillonner les routes coréziennes à bord de sa 205 millésime 1984 (pas trop gourmande en carburant). Mais ces détails sont négligeables.
Bity ne dispose plus que de six gendarmes (et remplaçants) qui, eux, pompent 42 000 euros de l’an à l’État. Le musée Chirac de Sarran, lui, ne coûte qu’une trentaine d’euros par tête aux contribuables corréziens, un peu davantage chaque année. Une association des Amis du musée du président Chirac serait en cours de formation. Au menu du restaurant, la tête de veau… cuite « en pot au feu, servie en aumônière sur feuille de brique ». On peut lui préférer les aiguillettes de volaille pomme-cannelle du chef, François Ravary, servies avec un petit rizotto, par exemple. Pour les séminaires, le prix des menus se situe entre moins de 20 et 25 euros. C’est sans doute bien moins cher qu’au restaurant de La Séniorie. Mais bon, comme Stefanovitch ne nous en dit rien et que je ne suis pas chargé d’éplucher ses notes de frais, passons : la cour régionale des comptes signalait que, en 2008, le département couvrait 45 % du déficit d’exploitation du restaurant. Nous sommes en 2011, et la couverture du déficit est plafonnée à un euro par client. Rappelons simplement que la Corrèze est le département le plus endetté de France, explosant trois fois la moyenne nationale. Bah, au restaurant de Vulcania, le projet cher à l’Auvergnat Giscard, les prix sont comparables, le parc est chroniquement déficitaire, mais qu’importe. N’empêche, comparativement, le musée Mitterrand de Jarnac fait vraiment figure de petit joueur.

En tout cas, on espère que Sarran, dont Bernadette Chirac est conseillère municipale, parviendra à préserver son épicerie-dépôt de pain. Ce serait, selon les annuaires, le seul et unique commerce subsistant.

Un commentateur de France-Soir signale : « vous oubliez sa recette d’ancien combattant, 600 euros par an… ». On ne la lui chipotera pas. Mais cela confirme peut-être mon titre. Si on gratte encore ça et là, les 974 000 euros de l’an avancés par Stefanovitch pourraient risquer de s’arrondir au million d’euros, pour les seules dépenses assurées par le budget de l’État. Les postes les plus lourds sont ses rémunérations, celles des 19 fonctionnaires à son service, la location du deuxième étage de l’immeuble de la rue de Lille, à Paris, où Jacques Chirac reçoit à l’occasion. S’agit-il d’emplois fictifs ? Que fait au juste Bertrand Landrieu, préfet hors cadre retraité, de ses journées ?  Il fait encore du social, lui dont l’une des dernières missions de préfet fut de dresser un plan d’action pour « proposer un hébergement stable et une durée minimale d’un mois pour les personnes qui sont sans toit et qui ont un contrat de travail, qui sont confrontés à une difficulté spécifique pour se rendre à leur travail… » ? Ou il joue encore les truchements entre de Villepin et Sarkozy ? On peut penser que, comme autrefois à l’Élysée, chargé du cabinet civil, il est le Papillon (de la Ferté, maître des menus plaisir, chargé entre autres des « specacles et mascarades », de l’intendance de l’argenterie et de certains frais de bouche) des Chirac. Il donne des instructions, rallie à la cause chiraquienne un futur Philibert Besson ? Il reçoit discrètement les magistrats du parquet qui ont soutenu l’examen de la question de constitutionnalité qui pourrait reporter la date du procès Chirac et une transmission à la Cour de cassation ou au Conseil d’État ? En vue d’un éventuel procès en plein cœur de l’été ? Ou s’occupe-t-il déjà des détails de futures funérailles nationales ?

Pendant ce temps, l’agence de notation Moody’s relègue la note de la Grèce à proximité de celle de la Biélorussie et de la Bolivie. Motif : « les autorités grecques auraient beaucoup de difficultés à collecter les recettes nécessaires à l’assainissement » (financier). Selon Fitch, pour la France, le triple A est maintenu en dépit du fait que les ratios dette/PIB (88 %) seraient les plus élevés du groupe des nations cotées AAA. Mais c’est quoi, un million d’euros par an ? Une goutte de rosée ? Le coût d’un quignon de pain par rapport à la facture due à EDF par un ménage lourdement surendetté ? D’une brioche proche de la péremption soldée en supermarché ?

Tiens, au fait, cela revient à combien, un directeur général du FMI ? À la louche, 500 000 dollars l’an, dotation annuelle comprise, mais sans les frais. À la retraite, c’est 80 000 dollars, juste une voiture de fonction avec chauffeur. Même pas un dixième de ce que coûte un Chirac ou un Giscard.
Comme quoi, tout est relatif, n’est-il pas ?