Duval Lebel Ebale: le précurseur du concept
Au Cameroun, plus de la moitié des personnes incarcérées le sont sans jugement. Une situation qui s’explique par la l’extrême lenteur qui caractériserait le pouvoir judicaire camerounais. Dans un tel contexte, porter une affaire devant les juridictions du pays est devenu une chose bien difficile pour une bonne majorité de camerounais. Car le faire reviendrait à engager un long feuilleton judicaire interminable et le plus souvent sans issu. Face à cela, il était urgent pour les camerounais de se trouver entre eux un mécanisme pouvant les aider à résoudre eux-mêmes leurs différents, sans avoir à saisir la justice ordinaire. Et, aujourd’hui, ceux-ci semblent avoir trouvé une formule pratique, efficace, et aux résultats immédiats.
En effet, depuis quelques temps, des Radio privées de Yaoundé ont mis sur pied des émissions qui au quotidien jugent les litiges entre camerounais. Ainsi, lorsqu’une personne pense avoir été abusée par une tierce, il se rend dans l’une de ces radios, rencontre le responsable en charge de cette émission, et lui pose son problème. Après toutes les vérifications, le journaliste programme l’affaire et donne rendez-vous au plaignant.
Le jour de l’audience, tout se fait en direct : Le journaliste demande au plaignant d’exposer en direct son problème ; puis, celui-ci appelle (toujours en direct) l’accusé, pour avoir sa version des faits. Au cas où les deux personnes ne parviennent pas à s’entendre, l’audience est reportée à une date ultérieure. Et, si possible, les deux personnes (plaignant et accusé) sont cette fois invitées toutes deux à la radio, pour s’expliquer l’une en face de l’autre.
Dans ces « procès », les auditeurs jouent très souvent un rôle très important. Car à chaque fois que le présentateur se trouve embarrassé, il sollicite rapidement l’avis de ceux –ci ; qui au moyen des appels téléphoniques donnent leurs opinions.
Inventé par un certain Duval Lebel Ebale sur les antennes de la radio Sky One Radio, le concept est à ce jour imité par de nombreuses radios de la ville de Yaoundé et de Douala. Et, au jour d’aujourd’hui, ces « tribunaux » radiophoniques ont déjà réussi à débloquer plusieurs litiges. Aussi, longtemps épinglées par les autorités, ces émissions jouissent maintenant du soutien de plusieurs organismes de lutte contre la corruption, et même de certains commissariats de police.