La "matière première" de Boyhood, le film de Richard Linklater n’est autre que le temps, son ingrédient fétiche. Ce temps  que l’on regarde filer à vive allure emportant tout sur son passage, sans jamais avoir la moindre prise sur lui. Tourné sur une période de 12 ans, ce long métrage ne s’encombre pas de ces artifices si chers au cinéma. Les personnages  sont les mêmes et  seront filmés quelques jours l’année durant toute la période du tournage.  

L’occasion de suivre l’évolution d’une famille en recomposition après le divorce des parents : Mason, (Ellar Coltrane) et sa soeur Samantha,(Lorelei Linklater), les enfants du couple subissent de plein fouet les conséquences de la rupture à l’heure où leur insouciance est à son apogée. Tant qu’ils seront tributaires des choix des adultes, aussi fous soient-ils, ils apprendront à se faire petits pour ne pas trop les encombrer ; ils se déplumeront peu à peu en perdant leurs illusions : entre unions et désunions, ils auront le temps de se familiariser avec les déboires inhérents à l’instabilité chronique ou à l’alcoolisme… 

Des échecs en série avec une loi temporelle intangible où ni les rattrapages, ni les redoublements n’ont droit de cité.Le physique, le psychique en constante "érosion"sont là aussi pour nous rappeler la fugacité des choses de la vie. Les événements extérieurs et surtout leurs perceptions par ces êtres en devenir participent aussi à leur façonnement : ingérence américaine en Irak, droit au port d’arme à feu, puritanisme, racisme, etc. 

A travers ces scènes de la vie quotidienne souvent banales, Richard Linklater nous dresse un constat affligeant de la condition humaine où règne la vacuité. La mère, Patricia Arquette se rend bien à l’évidence une fois que les enfants sont devenus grands et de se dire quelque chose comme : hier encore, j’avais vingt ans et j’ai perdu mon temps à faire des folies, à céder ou à renoncer sans trop réfléchir, à improviser, à bacler,  à zapper des moments privilégiés ; que des souvenirs qui ne me laissent rien de vraiment précis que quelques rides au front et la peur non de l’ennui mais de mourir. 

Un film, une réflexion sur la vie, ce long fleuve si peu tranquille, et tout ce qui peut l’impacter. D’excellents comédiens très attachants, simple mise en scène, musique  toute en nuances. Avec une demi-heure en moins, ce film de 2h45 n’aurait sans doute rien perdu de sa grâce… 

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