Bien sûr, le Centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane n’a pas pour objectif de valoriser les conflits armés. L’exposition de photographies « Notre histoire – Sarajevo, Bosnie-Herzégovine », qui retrace la guerre bosniaque de 1992-1995, vise plutôt à conforter la compréhension des enjeux d’un pays où les tensions restent vives.


Je vous le livre tel que reçu de mon Deuxième Bureau (l’agence de communication et RP 2e-bureau) : Enki Bilal a été chargé de l’affiche de l’exposition « Notre histoire » qui se déroulera au Centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane, jusqu’au premier décembre 2010. Un « collecteur » (objet de collection) pour les amateurs de BD, dessin et graphisme. Je vous signale aussi cette expo puisque Gérard Rondeau (que je salue amicalement au passage), y participera. Photographe, aussi, avec le regretté Yves Gibeau, du Chemin des Dames et des lieux de mémoire de l’offensive Nivelle, il s’est joint à près d’une vingtaine de photographes ayant couvert la guerre de Bosnie, dont un dénommé ou surnommé… Tito.

 

Dans le cadre de cette exposition, une conférence de Nocals Moll, directeur-adjoint du Centre André Malraux de Sarajevo, docteur en histoire contemporaine, était donnée à l’Espace Norlac de Limoges, le 14 juin dernier. « Seront ensuite abordées les conséquences de la guerre, qui marquent toujours le présent des Bosniaques, et la guerre de mémoire qui envenime la situation actuelle… ». Je n’y étais pas (à la conférence, pas même en Bosnie, et brièvement seulement en Croatie lors des conflits), mais j’estime que ce résumé laconique décrit bien la situation sur le terrain.

 

J’ai des amis slovaques et tchèques qui se disent toujours tchécoslovaques puisqu’ils (ou elles) avaient émigré avant la séparation de la Tchéquie et de la Slovaquie. De même, à West Hampstead, c’est avec des Slovaques et des Tchèques réunis que j’avais célébré la victoire de je ne sais plus quelle équipe de hockey sur glace de l’ancienne Tchécoslovaquie contre celle du Canada. Et quand je vois les menées de fractions séparatistes de la « minorité » (majoritaire en certaines localités) hongroise de Roumanie, j’en ai une opinion pour le moins mitigée. Alors que les « musulmans » bosniaques s’inquiètent du récent rapprochement entre l’Union européenne et la Serbie, qui espère obtenir le statut de membre de l’UE en 2011, et du relâchement éventuel de la pression sur la Serbie pour obtenir l’arrestation de Ratko Mladic, je reste circonspect. Le nationalisme est une chose. Quand il se conforte de l’appartenance à une religion (orthodoxe, mahométane ou autre), j’ai tendance, sinon à m’en laver les mains, du moins à considérer suspectes toutes les manœuvres et réactions des uns ou des autres. Mais j’aimerais que cette exposition puisse, même très petitement, montrer la diversité des appréhensions locales, serbes et bosniaques (et croates), et contribuer à un apaisement.

 

Saviez-vous que l’équipe nationale de balle au pied de Bosnie-Herzégovine n’est composée que de joueurs bosniaques « musulmans » (tant bien même seraient-ils agnostiques, c’est ainsi qu’on les qualifie), et que les joueurs « serbes » ou « croates » du pays sont intégrés dans les sélections nationales des pays voisins ? La mixité dans l’enseignement universitaire est précaire, difficile. Et tout le pays est plongé dans une crise économique générant un chômage de près de 40 %. La misère nourrit donc les ressentiments.

 

L’écrivain espagnol d’expression française Jorge Semprun, qui préside l’association Paris-Sarajevo-Europe Centre André Malraux, sera présent à l’inauguration de l’exposition. Il est membre de l’Académie universelle des cultures, dont les activités ont été obérées par des restrictions de financement, mais dont le manifeste de sa secrétaire générale, Françoise Barret-Ducrocq,  Imaginer la Paix (Grasset, 2003) reste d’une forte actualité. Comprendre, c’est déjà se donner les moyens d’agir, et si vous passez par Oradour cet été, au moins, essayez…