"Après des siècles d’interdiction de montrer, femmes sommées d’exhiber qu’elles ont bien tout aux normes, qu’elles se sont calibrées. Voilà mes jambes interminables, galbées hâlées, mon ventre plat, nombril percé, mes seins énormes fermes et moulés, mes cils sont longs, mes cheveux brillants… Consternation et sur un ton de connivence amusée, foison de petits conseils pour être une putain à la page et se mêlant de tout… Que tout rentre dans les cases et comment il faut jouir. Se teindre jusqu’aux poils pubiens et comment on doit être du dedans au dehors. Ton faussement débonnaire propagande imbécile pour être comme il faut."

 – Extrait du film "Les jolies choses".

Et merde, j’suis pas aux normes.

J’ai pas réussi à me couler dans le moule. J’ai jamais essayé, finalement.

 

Le superficiel, la consommation, faut bien renflouer les caisses de l’État et ce moyen fonctionne à la perfection. Il me FAUT le dernier sac Prada, j’ai BESOIN de cette paire de chaussure Versace.

 

Bravo, chère société, tu as réussi à TOUS nous berner. (Pas si dur à faire, au final.)

Et on s’invente des besoins et la vie qui va avec, et on vit pour faire du fric, et on s’imagine des sentiments que l’on ne ressent pas, et on s’en vante, et on se moque de ceux qui n’ont pas ce qu’il FAUT avoir, on en s’en moque, de savoir qu’ils sont dans une put… de merde.

Car oui, c’est MA vie qui m’importe, MA réussite, MA jolie famille et MON emploi qui me rapporte toute cette putain de thune sans laquelle ma vie ne rimerait à rien.

Ce qu’il en est de mon bonheur? Il est artificiel, tout comme le vôtre. Mais je m’en contente très bien, c’est ce qu’on attend de moi, au final.

Facile, d’être une habitante de la planète Terre exemplaire, ca se résume en une phrase bien connue et sans cesse plus répandue : "Sois belle et tais toi."

Dur, pour quelqu’un comme moi. J’ai toujours eu beaucoup de mal à me taire (et à être belle, en passant).