Elle va être bien la future Libye sous protectorat de l’Otan et du Qatar. « T’es qui, toi ? ». « Ben, un révolutionnaire… ». « Tu as vu ce que tu nous a fait ? ». « Euh, c’est pas moi, tu sais, on nous disait d’avancer, on avançait, de reculer, on reculait, et quand l’Otan avait fait ce qu’il vous a fait, on avançait… ». Et maintenant, peut-être, on commence à entendre : « Alors, ces rats, euh, ces chiens, quand est-ce qu’on s’en débarrasse ? ».
« Nous » (vous, moi…) sommes peut-être mal barrés en Libye.
Faudra voir.
Mais, à tout hasard, si je devais faire de l’auto-stop un jour prochain en Libye, je préférerais coudre un drapeau suisse qu’un français sur mon sac à dos.
Deux choses.
D’une part, il se ferait jour que des forces spéciales « occidentales » aient un peu nettoyé les metchas.
Les bleds, les gourbis, quoi.
Des « mauvais rebelles » comme des « bons » (bon teint) loyalistes. D’autre part, l’Otan, face à Beni Walid, préfère que les insurgés se retirent pour éviter les tirs amis.
Ils se retirent.
Comme ils s’étaient retirés ailleurs. « Moralité », les futurs « rats », ce ne sont plus « eux », mais « nous ».
Eh, nous n’avons rien demandé.
Juste, peut-être, répondu à des sondages nous pressant d’approuver l’initiative de Nicolas Sarkozy et d’opiner du chef aux propos de Bernard-Henri Lévy.
Mais les futurs « Boches », c’est « nous », a priori.
Il faut comprendre. Les révolutionnaires sont un peu las de tirer de loin, et surtout de près, sur de lointains parents. C’était combien d’habitants, la Libye d’avant ? Environ six millions. C’est quoi, celle d’aujourd’hui ? Allez, compte tenu des récents immigrés, ou réfugiés, environ cinq.
Tout le monde ne se connaît pas, loin de là. Ce n’est pas le Québec. Mais, avec les mouvements d’est en ouest, un peu d’ouest en est, du nord au sud, un peu tout le monde finit par se connaître, se fréquenter. Du coup, si on ne s’entredéchire pas trop, il faudra bien se réconcilier. Sur le dos de qui ? Peut-être du « Juif » Bernard-Henri Lévy. Ou d’on ne sait trop qui, plutôt les « occidentaux » que d’autres.
Les « traitres algériens » redeviendront peut-être les « frères algériens », allez savoir…
Ce ne sera pas aussi tranché. Les Tunisiens, qui ont accueilli les uns et les autres, prévoyant l’avenir, seront globalement absous, tout comme, individuellement, nombre de journalistes russes, français, britanniques, &c., ou des médecins, qui ne seront pas trop pointés du doigt. Mais il apparaîtra que l’essentiel des destructions, des victimes, aura été le fait des aviations et des forces spéciales de l’Otan. Il fallait y songer avant. Ou, à présent, il faut faire en sorte de se dédouaner, de valoriser les uns, de minorer le rôle des autres, et de faire taire les plus diserts des sceptiques. Cela fonctionnera ou pas.
L’histoire des offensives, sur les divers fronts, reste encore à écrire. France et Royaume-Uni donneront leur version. Les Libyens, d’un bord ou de l’autre, en auront une vue sensiblement différente. Fédératrice ? Pas sûr. Tunisiens, Algériens, Égyptiens, &c., contribueront aussi à l’historiographie. Peut-être considérera-t-on que, contrairement à l’offensive sur Suez et l’Égypte de Nasser, celle-ci a été mieux maîtrisée. Mais certains mythes se dissiperont, au profit d’autres, pas forcément plus véridiques, plus proches de la réalité. Bernard-Henri Lévy a fait un pari à court terme, j’en fais un autre, à moyen terme : le retour sur investissement vanté par Alain Juppé est une chimère… L’avenir nous départagera. Le sort de Kadhafi n’est qu’accessoire… Ah, si, un espoir : le retour en Libye d’infirmières bulgares. Cela peut calmer ceux qui considèrent les insurgés tels les « harkis de l’Otan » comme les autres.
Du [i]Mirror[/i] :
« [i]As the[/i] Sunday Mirror [i]joined troops making their advance, rebel leader Abdullah Kenshil said:[/i] “There are big fish in the town.” [i]They are thought to include former government spokesman Moussa Ibrahim as well as Saif Gaddafi. Fighter Ahmed Naji, 23, declared:[/i] “We have surrounded the exits so they cannot leave. If they are still there we will catch them.” ».
Pipeau. [i]Rubbish[/i].
L’avance s’est traduite en retraite. Histoire de laisser l’aviation coalisée faire son œuvre.
De [i]Sky News[/i] :
« [i]Some of them tell us they are frustrated as they felt they were making progress; but they say the decision to pull back has come from on-high – a joint decision by the National Transitional Council and NATO.[/i] ». Pas de « tirs amis ». Donc, les rebelles, insurgés, révolutionnaires, &c., sont priés de laisser la place aux professionnels.
Bani Walid, par elle-même libérée, qu’ils disaient.
Du [i]Scotsman[/i] :
« [i]Hundreds of men who fought for Col Gaddafi have been killed in bombing raids and fighting with rebel forces since the war began in February. Many came from the staunchly loyalist town of Bani Walid, and many families there still see Nato as an invading force.[/i]
« They [[i]loyalists[/i]] don’t talk to us; we don’t exist in their eyes. This is a fight with Nato, » [i]said Kenshil[/i]. « They demanded that we hand Nato to them. »
« We are happy to change the regime, we are happy to change Gaddafi, but not with the force of Nato. ».
En gros, comme une certaine honte d’être considérés comme les supplétifs, les « harkis », de l’Otan.
Du [i]Tripoli Post[/i] :
«[i] Libya’s interim health minister in the country’s new leadership, Naji Barakat said that at least 30,000 people have been killed and 50,000 more wounded, including some 20,000 with serious injuries, during the over six-month conflict that began in mid-February in Benghazi.[/i] ».
Bon, j’avais lu 20 000 tués, puis 50 000. Allons pour 30 000, on n’en est pas, de Paris, de l’Élysée, à 20 000 près, hein ?
Tiens, un triple amputé britannique, héros de l’Afghanistan, s’est vu attribuer un logement social, au sixième étage. Avec ascenseur souvent en panne, comme dans les HLM de Nanterre.
Bah, on n’est pas à cela près, n’est-il pas ?
Bises à Patricia Allémonière (Belfort, grève du centenaire Alsthom, furtive rencontre), légèrement blessée en Afghanistan (après Beyrouth). Et aussi de Dominique Thouars (comprend qui peut, ou qui veut).
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Zy-va donc. Combien du fait des frappes aériennes ?
Oh, p’tain, les apparentements terribles.
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