Babylone, vous y étiez, polyglotte sous les bananiers

Quest Visual a développé une application pour Iphone ou téléphones portables sous Android qui permet de photographier tout texte en anglais, espagnol, français ou italien et d’en obtenir une traduction quasi instantanée dans l’une ou l’autre de ces langues grâce à la ROC (reconnaissance optique des caractères). Bientôt le téléphone enregistreur traduisant presque simultanément ? On pourrait d’ores et déjà l’imaginer.

Babylone, vous y étiez, nue parmi les bananiers, comme le remémore le titre du roman de René Ehni… Nue certes, mais peut-être bientôt la langue bien pendue pour converser en arabe irakien sans rien connaître de cette variante locale. On peut rêver, mais ce n’est plus tout à fait utopique…

 

Il semble cependant que la conversation sera encore longtemps hésitante, voire confuse, et la machine à traduire instantanément tout langage de manière claire et élégante reste à concevoir.

Mais la traduction assistée fait des progrès constants et elle devient une réalité pour le commun des mortels du fait de miniaturisation du stockage des données.

Certes, c’est loin d’être parfait. Les techniques du traitement automatique du langage naturel n’en ont pas moins fortement progressé, avec quelques problèmes sémantiques subsistants dus aux homonymies, à l’analyse du contexte, à la maîtrise de la syntaxe.

Cela est dû aussi au fait que l’anglais étant plus ou moins dominant, cette langue est souvent utilisée en tant que langue pivot, ou intermédiaire, pour traiter une autre langue source vers une langue cible tierce.

Ainsi, parfois, bien que l’espagnol, le portugais, l’italien ou le roumain, langues romanes, soient proches, pour en obtenir une traduction, c’est en fait leur traduction vers l’anglais qui est traduite (par ex., esp. > eng. > fr ou inversement fr. > eng. > esp.).

D’autres méthodes permettent le traitement direct de couples de langues, permettant d’obtenir des résultats plus fiables, mais elles sont rarement commercialisées à moins de quatre ou cinq euros, et la qualité dépend aussi de l’étendue des corpus (vocabulaire et règles syntaxiques, voire d’analyse contextuelle sémantique).

Mais brisons là, j’ai presque tout oublié des cours de mon mastère de traitement des langues et de traduction spécialisée. Mais pour vous donner une idée des perspectives, dites-vous que cela fait près de deux décennies que les bulletins météorologiques émis par les divers organismes officiels sont véritablement très fidèlement traduits.

Pour des menus de restaurants, difficile d’en normaliser internationalement les termes et énoncés, mais peut-être y parviendra-t-on… un jour… si les restaurateurs voulaient bien se plier à respecter quelques règles.

En attendant, munis d’un IPhone ou d’un appareil sous Android, Word Lens, de Quest Visual, permet au touriste français de décrypter toutes sortes d’inscriptions en anglais, espagnol ou italien, avec des résultats approximativement compréhensibles, voire rigoureusement exacts.

Le mode d’emploi est simple, vous pointez la lentille du photophore de votre appareil de téléphonie mobile vers l’inscription, l’application fait le reste (je n’ai pas testé, et ne sais si, de nuit, l’emploi du flash ne fausse pas encore davantage les résultats).

 

Tout se passe en interne, sans recours au réseau téléphonique, et il y a quelques restrictions. Déjà, l’écriture manuscrite est rarement « comprise », de même que les inscriptions ayant recours à des polices qui ne soient pas très proches des « times-like » ou « helvetica-arial-like ».

Mais vous pouvez aussi avoir recours aux serveurs de Quest Visual, et améliorer le rendement et l’efficacité du système, de ses algorithmes, &c.

 

Quest Visual vous propose en effet une version « Lite » (gratuite), mais aussi une autre, plus complète (contre quatre euros) et d’envoyer les intitulés dont la traduction serait non conforme ou incompréhensible. Vous aiderez ainsi  à étendre le corpus des données, et la base des expressions figées reconnues.

Un bémol : pour le moment, les avis d’utilisateurs sont plutôt mitigés et la note globale sur 240 avis se situe à 2,2 sur 5 (avec 40 cinq étoiles, mais 120 une étoile). Vous achetez les versions selon les paires de langues proposées et il semble bien que l’anglais sert de langue pivot.

Qui voyage beaucoup sait bien sûr reconnaître un signe d’interdiction de fumer ou d’une vitesse limitée imposée. Et il y a bien sûr des limites. Ainsi, « Velocidad limitar 10 si autobus o tranvia es detenido a seguridad zona » ne peut se traduire vers l’anglais par « Speed limit 10… » que dans les pays anglophones exprimant les vitesses en km/h et non en miles per hour.
Mais on aura au moins compris que cette limitation ne s’impose que si un bus ou un tramway se trouve à l’arrêt.

En plus, je crains fort que « Semolina Upama » ou « Semolina Dosa » ne soit traduit par « Polenta à la Upama » ou « à la Dosa », alors que si ces deux plats du sud de l’Inde emploient bien de la semoule, non de maïs, mais de blé dur, leurs recettes font appel à de l’oignon, des légumes divers, des graines de moutarde, &c., ingrédients inconnus dans la polenta niçoise ou la mamaliga roumaine ou moldave. L’application risque fort de patauger dans la semoule… jusqu’à ce que vos apports et rapports d’erreurs soient traités.

La transposition des menus est l’un des plus ardus casse-tête des traducteurs expérimentés mais divers espoirs sont néanmoins permis.
Les applications ultérieures devraient permettre d’énoncer de manière sonore les inscriptions photographiées. Le portage vers Windows Phone ou Palm devrait suivre 

 

 

Google Goggles et LookTel, d’autres applications sans doute, concurrencent déjà Word Lens.
L’avenir supposera sans d’allier reconnaissance optique des caractères et reconnaissance de formes, ce qui permet déjà de reconnaître imparfaitement l’écriture manuscrite. La plupart des chefs de file du domaine (Iris, Omnipage…) s’y emploient et fourniront sans doute bientôt des applications allégées pour téléphones portables dont « l’allègement » se réduira en fonction de la capacité des mémoires à stocker des données.

Pour le moment, divers éditeurs fournissent des dictionnaires bilingues ou multilingues pour téléphones, qu’ils fonctionnent en réseau (en ligne) ou en mode autonome (stockés dans la mémoire du téléphone). Si vous optez pour Word Lens, ne vous dispensez pas de les utiliser en complément…

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

Une réflexion sur « Babylone, vous y étiez, polyglotte sous les bananiers »

  1. Babylone, vous y etes avec l’anglais !
    NOUVEL ORDRE MONDIAL = TOUR DE BABEL
    LAISSEZ FAIRE LAISSEZ PASSER !
    [img]http://ecx.images-amazon.com/images/I/4121K973RSL._SL500_AA300_.jpg[/img]

Les commentaires sont fermés.