On crie au loup , dans nos campagnes , mais entre le loup et les troupeaux , qui méritent vraiment sa place dans nos alpages ? qui occupent à outrance le territoire de l’autre ?
La nature « sauvage » promeut un écosystème riche avec le loup au sommet de la chaîne alimentaire. La disparition du loup sur le territoire français a en effet fait oublier le rôle du prédateur dans l’écosystème. Une étude sérieuse réalisée en Pologne par le Dr Sabina Pieruzek-Nowak , diplômée de l’Université de Silésie à Katowice. Elle inclue dans sa thèse de doctorat sur l’écologie de la population de loups dans les Carpates occidentales. Ses intérêts de recherche portent principalement sur l’écologie, le comportement et la conservation des grands carnivores, dont elle a publié de nombreux livres et articles ; il en ressort que même en présence de troupeaux, le loup reste un animal sauvage : le bétail représente de 1.5% à 5% de ses victimes et moins de 11% de son alimentation, la majorité de ses proies sont des ongulés sauvages. Les loups jouent donc un rôle pour stabiliser les populations d’ongulés et de cervidés. Au Parc de Yellow Stone (Etats-Unis), la réintroduction de loups a dispersé les ongulés ce qui a entraîné un reboisement des berges et ainsi le retour d’oiseaux et de castors ; en revanche le sur pâturage des alpages est nocif pour l’environnement et favorise la transmission des maladies dans les troupeaux ( une simple histoire de rentabilité ? ) :
"- Quelles sont les circonstances favorisant les attaques du loup sur un troupeau ?
Le suivi effectué dans les Alpes du Sud – et particulièrement dans le Mercantour – fait ressortir comme causes principales :
– l’absence de parcage nocturne des troupeaux (90 % des attaques),
– l’absence de gardiennage,
– l’absence de chiens de protection,
– l’effectif des troupeaux (ce sont les gros troupeaux qui enregistrent le plus d’attaques)…
– Le gardiennage des troupeaux se justifie-t-il seulement par la présence du loup ?
L’intérêt de la présence d’un berger va bien au-delà de la seule protection d’un troupeau vis-à-vis des attaques de prédateurs : elle permet de concilier l’approche écologique, pastorale et un bien-être accru des animaux (possibilité de prodiguer des soins rapides si besoin).
Nous verrons plus loin que les troupeaux non gardés sont souvent une source de surexploitation et de dégradation des prairies alpines : la présence d’un berger et d’un plan de pâturage permettent généralement d’y remédier. (1) (2)
Des études menées dans les Alpes du Sud montrent que les ovins non gardés et, de fait, divagants, effectuent de plus grands déplacements, au détriment de leur engraissement (« mauvaise finition des agneaux ») et de la production allaitante. En outre, la mortalité naturelle déclarée dans les cheptels non gardés est de 50 % supérieure à ce qu’elle est dans les troupeaux soumis à un gardiennage permanent (1). La présence d’un berger est donc indispensable même en l’absence de grands prédateurs.
En bref , on crie au loup mais la négligence et l’aspect de rentabilité sont les vrais coupables : " De nombreux éleveurs sont pluri-actifs, ce qui explique aussi la difficulté pour l’éleveur à assurer un gardiennage qui ne serait pas rentable économiquement, d’où une incapacité accrue à s’adapter au retour du loup "
Causes de mortalité des ovins dans les Alpes (PACA + Rhône-Alpes) en 1998 sur un cheptel total de 850 000 bêtes :
– Loup : 1006 (0,12 %)
– Brucellose : 6500 (0,80 %)
– Chiens : 10 à 20 000 (1 à 2 %, estimation)
– Mortalité en estive : 25 000 (3 %, estimation)
– Les attaques automnales : Pourquoi ? Comment y remédier ?
29 % des troupeaux étudiés par Thierry Durand sont encore présents en montagne au-delà du 15 octobre, période à laquelle ils sont beaucoup plus exposés aux attaques du loup et des chiens errants, d’autant que 50 % d’entre eux ne sont pas surveillés et présentent des moyens de protection très insuffisants. Constatation identique dans le Mercantour .
Reste l’épineux sujet du pastoralisme et de la biodiversité :
– Quel est le rôle exact du pastoralisme dans « l’entretien de la montagne » ?
Les tracts agricoles nous expliquent que le pastoralisme permet, tout à la fois, d’éviter l’embroussaillement des milieux, les incendies de forêts et les avalanches ! Qu’en est il vraiment ?
Les alpages sont des prairies naturelles qui existeraient même sans pâturage ; compte tenu de l’altitude, elles ne peuvent ni « s’embroussailler », ni se fermer.
Thierry Durand fait remarquer que les troupeaux non gardés et sans plan de conduite pastorale peuvent occasionner de véritables dégâts sur les milieux naturels d’altitude « sensibles aux piétinements répétés et à l’érosion. » Sans gardiennage, « la tendance naturelle des ovins à monter vers les cimes provoque un grave déséquilibre » : sous-pâturage de l’étage subalpin (1500 à 2000 m d’altitude) et surexploitation des pelouses alpines. « Ce déséquilibre est aggravé les années où l’étage alpin est précocement déneigé car les bêtes y pâturent dès les premiers jours de juin. ». Le vallon du Lauzanier, dans le Parc national du Mercantour, en est un triste exemple : autrefois réputé pour sa richesse botanique, il est en train de devenir un véritable désert floristique.
Le pastoralisme peut donc avoir un rôle intéressant à jouer dans l’entretien des milieux à condition qu’un plan de gestion pastorale soit mis en place, ce qui implique évidemment la présence permanente d’un berger. Fait de plus en plus rare !
http://loup.fne.asso.fr/…/sur-les-tr…/loup/12-questions.html