Au fil d’Ariane, le film de Robert Guédiguian

Robert Guédiguian dans son dernier film, aux allures de fable, "Au fil d’Ariane",use sans parcimonie de la fantaisie jusqu’à friser parfois le ridicule. Une fable ambitieuse qui se veut à la fois poétique et philosophique, un peu du genre du Petit prince de St Exupéry. 

Ariane fraîche et pimpante pour le jour de son anniversaire reçoit des bouquets de fleurs sans aucun des expéditeurs. Elle, (Ariane Ascaride),  se retrouve dépitée devant un savoureux gâteau orné de bougies qu’elle  vient de confectionner. Pas de temps à perdre pour autant à se morfondre ! 

Elle monte dans sa mini et court à l’aventure à travers la lumineuse et foisonnante Marseille : au gré de ses pérégrinations, elle fera des rencontres improbables, nouera des relations amicales, fera jusqu’à son introspection ; l’occasion au passage pour Robert Guédiguian de nous livrer sa critique du monde contemporain souvent sous forme d’allégorie. 

Ariane semble atterrir dans un monde de bisounours où même un embouteillage sous un soleil radieux a un goût de fête. Une Chanson arabe qui résonne à plein tube, "ya rayeh win msafer" ?, a l’effet à elle seule d’un euphorisant sur les automobilistes : ils prennent d’assaut le bitume pour danser en mode flash mob. Ils réenchantent ce monde qui va se recroquevillant sur lui-même… 

La dame quant à elle se laissera emporter en vespa par un petit jeune, rabatteur de clients pour un sympathique restaurant en bord de mer, aux nappes en plastiques : "Je suis du verbe suivre et non du verbe être", confirmera t-elle d’ailleurs bien pensive à deux, trois reprises…Denis, le propriétaire du bistrot, (Gérard Meylan), est un rêveur qui refuse de servir le soir au nom de principes, le profit à tout crin n’étant pas sa priorité. Amoureux de Jean Ferrat, il fredonne ses chansons, pense la vie. Il y a Jack,(Jacques Boudet), le Marseillais américain épris de philosophie qui passe son temps à prendre des notes sur son carnet de bord. La serveuse qui préfère les avantages de la prostitution à son boulot. L’Africain malade de nostalgie ; ami des animaux, il tient à sauver les mammifères du musée d’Histoire naturelle. Sans oublier la tortue qui parle et qui porte un regard amer sur ce monde désenchanté. 

Après avoir pioché les ingrédients de sa recette "fantaisite" dans les maux de la société, Robert Guédiguian a cru les rendre digestes en nous les servant sous forme de patchwork bien décoré  : émailler le film de citations sur fond de musiques classiques, de chansons, de paysages envoûtants, d’ambiance pagnolesque, n’est pas forcément gage de réussite. Filmer Ariane sur la plage abandonnée, coquillages et crustacés ; filmer Ariane dans l’Estaque, dans une des îles Frioul, avec au loin Notre Dame de la Garde ; Ariane qui sanglote, Ariane le coeur sur la main, Ariane qui grogne,qui s’indigne, qui médite, qui rit ou  qui chante. Ariane en robe rose ou Ariane en pantalon rouge et chemisier presque turquoise. Ariane, les autres, leurs jérémiades ! L’overdose qui tue…

On sent même que certains acteurs n’ont pas pu épouser leurs rôles respectifs malgré leurs flagrantes prouesses techniques. Au fil d’Ariane, un cadeau du mari offert à sa tendre moitié mais qui risque de laisser certains spectateurs sur leur faim… 

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