Ces derniers temps, les relations entre AG2R La Mondiale et Arpège Prévoyance sont pour le moins tendues. La raison ? L’institution de prévoyance alsacienne serait en proie à des « manœuvres de déstabilisation » et des « opérations de désinformation » visant à l’éloigner du groupe de protection sociale avec lequel elle doit former la SGAPS AG2R La Mondiale. Or, au regard des conséquences qu’aurait un tel divorce entre les deux entités, c’est toute une région qui tremble.
des coûts fixes particulièrement élevés
20 % de ses fonds propres. Voilà ce que coûterait — au minimum — à Arpège Prévoyance, une séparation avec AG2R La Mondiale. Pourquoi au minimum ? Car cette estimation ne comprend que les frais de migration du système informatique de l’institution et d’adaptation réglementaire. En effet, aujourd’hui, c’est bien le groupe de protection sociale qui permet à l’institution de prévoyance d’amortir ses coûts fixes, qui sont particulièrement élevés. En cas de départ, Arpège Prévoyance devrait donc faire face à une augmentation non négligeable de ses frais de fonctionnement (notamment par la constitution d’une équipe experte en gestion financière et assurantielle dans le cadre de la réglementation Solvabilité 2), sans pour autant connaître une augmentation de ses revenus.
Résultat : si l’institution prend son indépendance, ce sont vraisemblablement les assurés de l’institution qui trinqueront. Ces derniers devraient ainsi voir leurs cotisations sensiblement augmenter, le tout pour un service inchangé. Nul doute que cette éventualité leur déplaise. D’autant que plusieurs d’entre eux ont d’ores et déjà subi les conséquences des « manœuvres de déstabilisation » mises en place par les dissidents de l’institution.
En janvier dernier, plusieurs assurés d’Arpège Prévoyance ont en effet découvert que certains de leurs remboursements manquaient à l’appel. Et pour cause, le Directeur financier d’Arpège Prévoyance, Denis Kleiber, en charge de délivrer les autorisations de paiement, avait abandonné son poste, sans avoir pris le soin de communiquer les codes nécessaires au déclenchement de la procédure de paiements des prestations aux assurés, qu’il était le seul à détenir.
Et n’en déplaise aux partisans du départ, c’est bien AG2R La Mondiale qui aurait alors pris en charge les paiements des prestations, permettant ainsi de débloquer une situation qui aurait pu durer bien plus d’une semaine.
L’Alsace, une terre choyée par AG2R
La perspective de voir ses assurés payer le prix de la « guerre intestine » qui fait rage au sein d’Arpège Prévoyance n’est pas envisageable pour AG2R, qui n’a pas manqué de le rappeler dans un communiqué de presse paru le 7 février dernier. Après avoir condamné « les manœuvres de déstabilisation », « les opérations de désinformation menées auprès des collaborateurs alsaciens du Groupe et de la presse locale », et « l’usage de la violence physique et morale », le groupe de protection sociale a tenu à s’adresser aux membres de l’institution.
« Nous alertons sur les conséquences possibles de jeux d’ambitions personnelles mettant à mal l’image d’un paritarisme séculaire de gestion qui a démontré sa robustesse. Nous rappelons qu’AG2R La Mondiale est un groupe à but non lucratif qui sert quotidiennement 15 millions d’assurés », ont ainsi déclaré Bernard Vercoutre, Président, et Brigitte Pisa, Vice-présidente l’Association sommitale AG2R LA MONDIALE RÉUNICA, dont fait partie Arpège Prévoyance. Et de mettre en garde les dissidents d’Arpège : « nous appelons les parties à la raison, au bon sens et à la bonne foi. Nous ne tolérerons pas que de telles manœuvres mettent en danger la pérennité des emplois et celle des couvertures d’assurance de nos clients ».
Par ailleurs, l’Alsace n’est pas une région comme une autre pour AG2R : André Renaudin, l’actuel président du groupe, est en effet originaire de la région et s’affiche comme l’un de ses ambassadeurs. « L’Alsace est la terre qui m’a vu grandir. C’est peu après l’avoir quittée que j’ai pris conscience de mon attachement », témoigne-t-il sur le site des Ambassadeurs d’Alsace. Et de rajouter : « Mon engagement est avant tout celui d’un terroir : je ne manque pas une occasion, et voire je la suscite, d’évoquer l’Alsace en général et Sélestat en particulier. J’ai bien sûr adhéré à l’Association générale d’Alsace et Lorraine (AGAL) en même temps que je me suis occupé de la Saint-Nicolas des Alsaciens à Paris auprès de Denis Kessler ».
Un engagement que le président matérialise également à travers son groupe : AG2R dispose en effet de 6 agences dans la région du Grand Est (Alsace, Lorraine et Champagne-Ardenne), soit deux fois plus qu’en Bourgogne — Franche — Comté, qu’en Bretagne, que dans le Centre-Val De Loire ou qu’en Normandie, et finance la fondation mulhousienne Alliance-CAIRPSA-CARPRECA, qui soutient les initiatives concourant à « l’amélioration de la qualité de la vie (que ce soit au plan sanitaire, moral ou social), au développement de l’activité économique ou au bien-être humain ainsi qu’au maintien à domicile des personnes âgées et à leur mieux-être en institution ».
Dès lors, les manœuvres de déstabilisation auxquelles se livrent les dissidents d’Arpège Prévoyance pourraient être lourdes de conséquences, notamment au niveau social. Car si Stéphane Demuth assure qu’Arpège Prévoyance sera en mesure de conserver l’ensemble de ses salariés — aujourd’hui payés par AG2R — les chiffres ne plaident pas en sa faveur… Une réalité qui doit faire réfléchir à deux fois avant d’entériner un éventuel divorce.