La première partie a illustré par le détail les formes que revêt la pollution de Come4News due à l’activisme des trolls ; le nombre des visites de cette première partie et celui des commentaires montrent que le sujet ne laisse pas indifférent. Le propos de la seconde est d’envisager pourquoi et comment il serait éminemment souhaitable d’en venir à bout.  

Pour mémoire, le lecteur néophyte pourra se documenter en consultant notamment la rubrique correspondante sur Wikipédia ; il lui est par ailleurs recommandé d’utiliser abondamment le « trollomètre » présenté sur le site www.lettres.org.

Il pourra aussi constater que ce phénomène affecte tous les forums, en particulier les articles publiés par Mediapart. Le problème toutefois n’en est un véritable que pour les sites qui n’ont pas voulu se résigner, en général au nom de la liberté d’expression, à mettre en œuvre le seul remède infaillible qui soit à la disposition des administrateurs, à savoir la clôture des fils de commentaires dès lors qu’ils deviennent infectés.

Outre le respect de leurs lecteurs, notons qu’une raison strictement matérielle pourrait les y inciter. Comme le faisait fort à propos remarquer Khalen dans son commentaire du 11 mars 2011 dans le fil de l’article Alerte à la pollution sur Come4News :
« En clair, la société COME4NEWSdoit gagner de l’argent pour vous permettre de continuer à vous exprimer, et pour cela, elle doit obligatoirement adopter le business model du B2C [NdR : Business to Consumer] reposant principalement sur un volume de connexions, base de calcul des revenus publicitaires.
Comprenez que ces sites se doivent de présenter le plus grand nombre de visiteurs uniques, le plus grand nombre de PAP, de taux de clic , …
», confirmant, s’il en avait été besoin, l’échange survenu, d’ailleurs hors sujet, sous un article dû à vieilleforge :

  • « pour info, nous venons de passer les cap des 400.000 visiteurs/lecteurs mensuel »
  • « Donc les revenus publicitaires augmentent… et le site n’est pas menacé ».

aller-retour qui pourtant négligeait cette précision que Khalen s’était pour sa part gardé d’oublier, à l’instar des responsables marketing : « … un client insatisfait racontera [ses déboires] à 8 à 16 personnes (environ 10% se vident le cœur à plus de 20 personnes)… ». Les conséquences de ce phénomène méritent qu’on s’y attarde quelques instants.

En première approche, le phénomène trollesque pourrait sembler positif, en multipliant le nombre de connexions. Pourtant, le bénéfice est plus qu’éphémère puisque, en dévoyant le fil des commentaires, les trolls irritent profondément de nombreux lecteurs qui se découragent et abandonnent le troll à son délire monomaniaque et solitaire (cf. le cas caricatural de "Sarkozy, Israël et les Juifs", le nouveau livre interdit en France ! de jmarc2006 signalé dans la première partie).

Le fond de la question est que ces déçus, jurant mais un peu tard qu’on ne les y prendrait plus, fuient le site pollué et le font largement savoir autour d’eux, à 8 à 16 personnes en moyenne et à plus de 20 personnes,dans environ 10 % des cas !

Le jeu en vaut-il la chandelle ? Pour se faire une opinion, il faut tenter de cerner l’ampleur du phénomène, par exemple grâce à la requête proposée par adminc4n déjà mentionnée dans la première partie et dont quelques résultats sont repris ci-dessous :

Requête

Occurrences

Résultats agrégés

Ver(bip) a dit

1000

Veritroll : 1838

VAU(bip) a dit

718

Pat(bip) a dit

120

Li(bip) a dit

1000

Libertroll : 1780

Liber(bip) a dit

780

Ava(bip) a dit

440

Avatroll : 671

(bip)_le_(bip) a dit

93

(bip)_le_(bip)_01 a dit

1 (et rose, il a vécu
ce que vivent les roses
)

(bip)_le_(bip)_02 a dit

mort-né ?

(bip)_le_(bip)_03 a dit

mort-né ?

(bip)_le_(bip)_04 a dit

61

(bip)_le_(bip)_05 a dit

6

(bip)_le_pou(bip)_06 a dit

4

(bip)_le_(bip)_07 a dit

13

(bip)_le_(bip)_08 a dit

mort-né ?

(bip)_le_ (bip)_09 a dit

49

(bip).le.(bip) a dit

variante à points

Var(bip) a dit

207

Vartroll : 207

Jul(bip) a dit

89

Hum(bip) a dit

84

Ce quarteron (disons, cette demi-douzaine, en comptant large, pour ne vexer aucune susceptibilité mal placée !) est à lui seul responsable d’à peine quelques milliers d’« avis », soit une goutte d’eau en comparaison des 183.835 revendiqués à la Une de Come4News. Mais si l’assidue et pesante présence de chacun d’eux a provoqué la fuite de trois lecteurs, alors le déficit total en nombre de visiteurs uniques se chiffre à 150 à 200 personnes, soit de l’ordre de 50.000 clics par an, un nombre qu’il paraîtrait hasardeux de négliger dans l’évaluation du business model.

Après la question économique, place à l’aspect éthique. On entend parfois dire qu’il serait certes aisé, techniquement, de mettre hors d’état de nuire ces pollueurs, mais qu’on ne saurait s’y résoudre au motif de la liberté d’expression.

Sans doute est-il utile de préciser d’emblée que si publier un article relève bien de ce principe en effet sacré, il reste à démontrer qu’il en est de même pour le fait de se répandre à tort et à travers, jusqu’au point, parfois, d’émettre un avis se résumant à un simple « je n’ai pas d’opinion » (ce n’est pas une vue de l’esprit : ce type de commentaire n’est pas rare,vous pourrez aisément le vérifier).

Dans ces conditions, il est clair qu’on en arrive à une véritable perversion, car il reste à démontrer que la Constitution ou les lois de la République obligerait une publication à ouvrir ses colonnes à seule fin qu’un certain individu puisse proclamer urbi et orbi son absence de conviction, comme si le reste de la planète retenait anxieusement son souffle en attendant qu’il daigne se prononcer !…

Dans le cas singulier analysé dans la première partie de cet article, les rares commentaires positifs émis par ce troll-là (exceptions qui confirment la règle) concernent les articles publiés par deux auteurs seulement, soit un pourcent seulement de ses « ayant-droits ». Il se trouve, ce n’est pas un hasard, que la production de ces deux personnes est très abondante. Il se trouve aussi, et ce n’est pas un hasard non plus, qu’ils traitent des sujets qui relèvent de son idée fixe (en particulier, une série composée au total de 29 articles, ce qui n’est pas rien).

La différence, qui fait établir une solide distinction entre les trois, est que les deux derniers usent d’une liberté d’expression que nul ne songe un seul instant leur contester puisqu’ils l’exercent ouvertement et à visage découvert. De ce fait, la propre liberté du lecteur peut s’exprimer elle aussi : il ne tient qu’à lui de ne pas fréquenter des publications dont le contenu le laisserait indifférent.

Au contraire du troll considéré qui n’a produit qu’un seul article en quatre années (à mettre en regard des plus de 6.000 commentaires émis sur la même période). De plus, le domaine des sujets qu’il a commentés est tellement vaste que le lecteur lambda a infiniment peu de chances d’échapper à une agression sans sommation, au coin de n’importe quel article.

Enfin, autre différence considérable : un profil est consultable pour les deux auteurs ; bien entendu, rien ne garantit l’exactitude des renseignements présentés. Mais ils ont l’immense mérite d’exister, et valent de ce fait infiniment mieux lors que le laconique « Cette personne n’est pas inscrite ou ce profil n’existe plus ou n’est plus disponible » que l’on reçoit pour toute réponse en tentant de consulter celui des trolls. Si tel est effectivement le cas, alors le bon sens voudrait que les « avis » de ceux qui ont déserté le site ne l’encombrent plus inutilement.

Un incognito d’autant plus choquant que les moyens techniques dont disposent les administrateurs du site leur permettraient aisément de ne pas tolérer ce qui constitue, au-delà d’une profonde anomalie, une assertion mensongère et trompeuse à l’égard du reste de la communauté.

Voici quelques temps, quelques outils simples ont été suggérés pour permettre aux lecteurs de faire savoir aux indésirables qu’ils le sont :

 +  =

On pourrait aussi procéder par citation et user de celle extraite du César de Marcel Pagnol qui semble avoir été créée tout exprès : « Quand vous dites une chose comme celle que vous venez de proférer, je déclare et j’affirme que vous battez de loin vos propres records de stupidité.
C’est-à-dire que je vous vois très distinctement serrant contre votre cœur les bornes du couillonisme, et courant à toute vitesse pour les transporter plus loin, afin d’agrandir votre domaine
 ».

Qu’importe le flacon. Ce qui compte est que cette liberté d’expression là soit elle aussi respectée.

Et l’essentiel est par ailleurs que la trollomanie ne soit pas alimentée par des personnes de bonne foi mais non averties qui, pensant les décourager, les nourriraient en fait. « Don’t feed the trolls » disent les anglo-saxons, slogan qui n’est pas sans évoquer l’interdiction parisienne de nourrir les pigeons, manière de se prémunir des dégâts causés par leur fiente. Ce slogan (ou tout autre équivalent francophone ; je serais surpris que les Québécois, prolixes et inventifs comme à leur habitude, n’en aient pas créé un) mériterait de figurer à la Une de Come4News : c’est une question de salubrité publique.

Il serait déplacé de retenir la suggestion en forme de soupir (« votre article mériterait d’être en UNE de C4N ») qu’on a pu lire sous Alerte à la pollution sur Come4News. En revanche, il serait tout à fait bienvenu de trouver à la Une, de même qu’on peut y lire le nombre de reporters, de commentaires et d’avis, une information sur le degré de pollution, dans un premier temps, qui pourrait évoluer ensuite vers son complément (la qualité de l’air) après que la mesure ait prouvé son efficacité.

Cet indice de pollution pourrait se baser sur la différence entre le nombre de commentaires et le nombre d’articles publiés, rapportée au nombre de jours de présence. Toutefois, la forme de la présentation devrait être établie avec les plus grandes précautions, en évitant soigneusement les systèmes en forme de palmarès du style Troll d’orTroll d’argentTroll de bronze, ou encore Troll du mois, qui risqueraient fort d’aboutir au résultat inverse de celui escompté : on n’ignore pas que des radars installés à l’entrée de certaines localités pour afficher la vitesse instantanée ont servi à quelques esprits dérangés pour authentifier d’imbéciles records d’excès de vitesse.

Le plus simple et le plus efficace, sans doute, serait que la Une présente une barrette placée sous l’indication du nombre de reporters, d’articles et d’avis dont la teneur et la couleur, reflétant l’indice de pollution du moment, varieraient entre et .

Cliquable, elle renverrait utilement vers une notice explicative, également accessible à partir d’un lien placé sous la rubrique « Guide d’utilisation ».

En effet, comme on aura pu le voir en annexe de la première partie, les trolls se répandent tous azimuts et tout type de sujet leur sert de prétexte. Il ne serait donc que pure justice que les lecteurs, et plus particulièrement les néophytes, soient en mesure d’être mis en garde dès la Une par une quantification de l’intensité de leurs nuisances.

Ainsi informés, ils pourraient se montrer circonspects lorsqu’ils ne manqueront pas, hélas, de croiser leurs chemins et traiter les olibrius par le plus simple mépris ou, mieux encore, par une totale indifférence, insulte suprême à leurs yeux ; cette attitude constitue très probablement le seul moyen réellement efficace pour s’affranchir de leurs élucubrations. Mais il serait illusoire d’espérer un résultat instantané car, ainsi que le dit le savoureux bestiaire des expressions marseillaises : « Celui-là était si bête que le temps qu’il comprenne, on aurait eu le temps de tuer un âne à coups de figues molles ».

Remarquons enfin pour terminer que la première partie de l’article a suscité une assez forte activité trollienne dont on ne peut, paradoxe de l’histoire,que se réjouir. Oui, vous avez bien lu : s’en réjouir, car tout le temps gaspillé par eux de la sorte n’aura pas été consacré à polluer d’autres articles ; c’est le principe même du paratonnerre d’attirer sur lui la foudre pour s’assurer qu’elle ne tombera pas plus loin… Les trolls de tous horizons sont donc invités à commenter derechef sans retenue cette seconde partie ; pour une fois, soulignons-le encore, ils ne seront pas hors sujet !

De même les éventuels projets des propriétaires,administrateurs et animateurs de Come4News, en ce qui concerne le présent et l’avenir d’un site devenu au fil du temps « notre » site, y seront également tout à fait bienvenus.