Elle ne mérite sans doute pas le prix Nobel. On ne saurait lui en donner un pour avoir traîné dans la boue le nom et la vie d’un grand homme avec lequel le monde était obligé de compter pour aller de l’avant.

Mais Nafissatou Diallo aura fait tomber le mur de la honte et de l’humiliation qui empêchait certaines femmes dont l’histoire est peut être vraie, de franchir un grand pas. Et à travers les stupéfactions dont nous sommes l’objet au fil de l’histoire extraordinaire qui secoue la vie de DSK, l’on s’interroge : combien sont-elles ces femmes qui ont gardé le silence après s’être faites abusées par des hommes puissants ?

Combien sont-elles qui ont accepté dans le silence odieux qu’impose l’impuissance de réaction face à un bourreau omnipotent, de l’argent pour fermer les yeux sur les pleurs de leurs corps dénudés par la force ?

Combien sont-elles qui en ont eu des enfants aujourd’hui sans pères. En Afrique, d’où vient Nafissatou Diallo, le viol n’apparaît pas comme un crime aussi crapuleux, car tout bien pesé dans certains esprits, la femme est faite aussi pour être violée. Et celle qui en portent à vie les stigmates qui se manifestent parfois par la peur des hommes, la frigidité ou la stérilité,  sont vues comme des femmes indignes de la gente féminine et par delà de l’espèce humaine même.

Les périodes de guerre sont les moments propices pour ces seigneurs de circonstances ayant reçu le pouvoir par les armes d’ôter la vie, de faire valoir leur virilité en toute impunité. Et sous tous les cieux , dire non à un homme ne suffit pas à la femme coincée quelque part loin de tout secours pour garantir l’intégrité de son corps. Et l’humiliation qui s’en suit est d’autant plus grande qu’en parler est la dernière chose qu’elle peut faire.

 Et lorsque le violeur est tout puissant, les choses sont encore plus compliquées. La mère de Tristane Banon l’illustre bien en affirmant qu’elle en avait parlé en son temps à François Hollande, qui le dément formellement. Vrai ou faux, nous n’en savons encore rien. Mais une chose est certaine ; c’est que Nafi en s’attaquant à ce grand homme de la politique et de la finance à quelque pas seulement de la présidence française, lance un message fort.

D’abord aux hommes puissants qui se croient tout permis. Elle leur jette au nez que les rapports de forces peuvent toujours s’équilibrer dans un monde qui en dépit de l’injustice a l’espoir de s’améliorer. Et que ceux qui peuvent les faire couler du jour au lendemain n’ont pas forcement besoin d’être puissants comme eux.

Ensuite à toutes ces femmes violées sans cesse dont elle est  en quelque sorte le symbole. A ces femmes dont la crédibilité est tout simplement douteuse parce qu’elle sont pauvres, elle prouve qu’on peut bousculer les idées et parvenir à obtenir justice. C’est sans doute ce qu’a compris Tristane pour porter plainte 8 ans après ce qu’elle dit avoir subi.

 Au regard de tout ceci, force est de reconnaître que la princesse du Fouta Djalon a un mérite à reconnaître : celui d’avoir démystifié et démythifié DSK, symbole de puissance. Alors avant de la vilipender, reconnaissons lui d’abord cet attribut. Car les femmes violées qui ont gardé le silence n’ont pas encore fini de faire parler d’elles.