Le facétieux Jean Rochefort avait donné le ton pour la cérémonie des Césars 2008 : le mot d'ordre était d'être "rigolo". La salle du théâtre du Chatelet était pleine des personnalités du cinéma dans l'attente de voir leur film récompensé, un césar pour un acteur ou une actrice et la tension était certainement forte. Marion Cotillard était particulièrement attendue, grande favorite : il allait de soi qu'elle reçoive le prix de la meilleure actrice. Après un bref discours de Jean Rochefort, président de la soirée, qui a surtout évoqué son costume, le show commence avec une petite mise en scène filmée dans laquelle on voit Antoines de Caunes avec Valérie Lemercier grimée en Edith Piaf, lui demandant de revenir à sa place. Elle décline, se disant en partance pour les Oscars. Il arrive alors sous quelques applaudissements. S'en suivent les remises de prix, dans lesquels, selon le mot d'ordre évoqué plus haut, chacun s'efforce d'être rigolo, avec un succès mitigé.

On remarquera la prestation de la présentatrice météo de canal+ avec Jean-Claude Vandamme jouant à "Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette…", ce qui a provoqué un silence glacial que l'acteur a remarqué lui-même, se penchant alors vers la salle, disant, "mais rigolez enfin!". Malheureusement pour lui, rigoler ne se décrète pas… Antoines de Caunes se rend dans les coulisses pour montrer de prétendus césarisés en fête, l'on y voit une ambiance de cotillon, avec des gens qui chantent et dansent. Il revient, le public n'applaudit pas et ne rit pas. Il en sera de même pour quasiment chacune de ses mises en scène, chacun de ses déguisements… Pour remettre des Césars, des acteurs viennent, qui avec du champagne, qui avec des petits gateaux, ou avec des mises en scène peu crédibles… Julie Depardieu, en tailleur, veste et pantalon noirs, monte prendre son prix emmenant la pétillante Ludivine sagnier avec elle, très élégante en robe. Julie Depardieu lui remet son césar, disant qu'elle en a déjà reçu, pas de vrai discours, et toutes deux rigolent "comme des cornichons". Houellebecq fait un petit discours totalement décousu pour le César du livre repris au cinéma. Edouard Baer félicite Antoine de Caunes pour la soirée très réussie. Antoine de Caunes allume une cigarette en critique de la loi contre le tabac dans les lieux publics, rappelle qu'il ne fume plus depuis quatre ans. On ne rit pas, la cérémonie continue.
Rien de très drôle dans la soirée au final! Les discours des césarisés eux-même ne trouvent pas d'écho véritable dans le public. Quelques moments plus marquant toutefois, lorsque le meilleur film étranger reçoit un César, avec un allemand qui dans un très bon français viendra chercher son prix, se félicitant de le recevoir en France eu égard aux grands films français qu'il a pu voir. Roberto Begnini remonte lui aussi le niveau, par son exubérance et par son discours très cohérent sur le cinéma français à la remise de son prix d'honneur : "vous avez inventé le cinéma, vous devez faire les meilleurs films". Convenons avec lui que le cinéma français a eu de très beaux jours derrière lui. Il eut aussi le bon goût de réclamer une minute de silence en hommage à Antonioni et Bergman. Dans cette minute de silence, on a pu voir un Roberto Begnini concentré, sérieux et recueilli.
Plus tard avec le César d'honneur remis également à Jeanne Moreau, et des extraits de films qu'elle a pu tourner, de "Jules et Jim", en passant par "Ascenseur pour l'échafaud" (avec la formidable musique de Miles Davis) et tant d'autres. Dans son discours, Jeanne Moreau, très ovationnée, évoque les subventions pour le cinéma français, disant le cinéma en besoin, ce qui pourrait nous faire tous songer que les plus grands films furent fait à une époque où le cinéma n'était justement pas subventionné. Rappelons à ce sujet que ces subventions sont le fruit du prix des séances de cinéma, que chaque spectateur paye. Alain Delon a rendu également hommage à la formidable actrice que fut Romy Schneider, rappelant leur amour et le tragique accident de son fils.
Quelques pleurs aussi. La jeune Hafsia Herzi arrive pour prendre son césar, auquel elle ne devait pas s'attendre, à 21 ans. Marion Cotillard également pleure. Avec elle, c'est l'occasion de voir une très belle jeune femme, sans tout le fard de son personnage, elle est sincère et émue. Elle remercient toutes deux chacun de ceux qui leur ont donné leur chance. Plus tard lorsque Abdellatif Kechiche vient chercher le prix du meilleur film, il fait monter avec lui Claude Berry, un Claude Berry qui marche avec difficulté, et se récrie lorsque le réalisateur dit de lui qu'il est une sorte de père, considérant son âge.
Une femme entame un youyou dans la salle. Le meilleur film est donc le portrait d'une famille franco-tunisienne, dont le père, ouvrier licencié d'un chantier naval, cherche à ouvrir un restaurant sur une péniche.  Le réalisateur fait aussi un discours : "Il y a une revendication commune à défendre un cinéma qui n'est pas tout-à-fait dans les rails et qui se risque à sa propre liberté. Je vous remercie de me donner cette légitimité." Il évoque aussi son père, petit ouvrier du bâtiment. Une soirée très convenue donc, peu drôle, avec des prix très "politiquement correct", à l'image du cinéma français d'aujourd'hui, se voulant un rien intellectuel, presque snob, toujours friand de morale et de bons sentiments et qui s'aventure rarement au-delà des sentiers battus et rebattus. D'une soirée qui se voulait "rigolo", reste l'impression que le cinéma, le vrai cinéma, n'est pas vraiment mis à l'honneur. Comme Valérie Lemercier dans le petit film du début, nous attendons nous aussi les oscars, en souhaitant bonne chance au film "La Môme"  .
Meilleur film français de l'année : "La Graine et le mulet" d'Abdellatif Kechiche

Meilleur réalisateur : Abdellatif Kechiche ("La Graine et le Mulet")

Meilleure actrice : Marion Cotillard ("La Môme")

 

Meilleur acteur : Mathieu Amalric ("Le Scaphandre et le Papillon")

 

Meilleure actrice dans un second rôle : Julie Depardieu ("Un Secret")

 

Meilleur acteur dans un second rôle : Sami Bouajila ("Les Témoins")

 

Meilleur espoir féminin : Hafsia Herzi ("La Graine et le Mulet")

 

Meilleur espoir masculin : Laurent Stocker ("Ensemble c'est tout")

 

Meilleur film étranger : "La Vie des Autres" de Florian Henckel von Donnersmarck

 

Meilleur premier film : "Persépolis" de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud

 

Meilleur scénario original : Abdellatif Kechiche ("La Graine et le Mulet")

 

Meilleure adaptation : Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud ("Persépolis")

 

Meilleure musique écrite pour un film : Alex Beaupain ("Les Chansons d'amour")

 

Meilleur court métrage : "Le Mozart des pickpockets" de Philippe Pollet-Villard

 

Meilleure photo : Tetsuo Nagata ("La Môme")

 

Meilleurs décors : Olivier Raoux ("La Môme")

 

Meilleur son : Laurent Zeilig, Pascal Villard et Jean-Paul Hurier ("La Môme")

 

Meilleurs costumes : Marit Allen ("La Môme")

 

Meilleur montage : Juliette Welfling ("Le Scaphandre et le Papillon"

 

Meilleur film documentaire : "L'Avocat de la terreur" de Barbet Schroeder

 

Deux César d'honneur ont en outre été décernés à l'acteur-réalisateur italien Roberto Benigni et à la comédienne française Jeanne Moreau.