La BBC n’a pas attendu que tombent les résultats des votes du Somerset – en faveur de la sortie de l’Union européenne – peu avant 7 heures ce matin, pour annoncer que le Royaume-Uni s’était prononcé pour le Brexit. Vers 07:11, cinq résultats étaient encore attendus, mais, avec plus de 17 millions de votants en faveur du « out », une majorité avoisinant 52 % ne laissait plus aucun doute sur l’issue… Autre résultat qui n’était guère envisagé : la démission du Premier ministre, David Cameron.

Ce fut une nuit riche en rebondissements. Très logiquement, les premiers résultats laissaient envisager une très légère avance pour les partisans du Brexit. Mais, par deux fois, le camp du « Remain » est repassé en tête. Insuffisamment… Ce n’est en fait que vers cinq heures du matin que s’est affirmée l’éventualité d’une victoire du camp « Leave ». Encore ne lui concédait-on qu’une courte avance. Ce n’est pas le cas : le différentiel de voix est d’un peu plus d’un million et le pourcentage du camp vainqueur frôle les 51,9 %.

Les directeurs des instituts de sondage ont présenté ce qui s’apparente à des excuses, et sans toutefois se frotter les mains, les bookmakers ont enregistré, très tôt, un renversement de tendance qui ne s’est pas démenti…

C’est en particulier l’Angleterre, et pour une majeure partie le Pays de Galles, qui ont projeté le Royaume-Uni hors de l’Union européenne. L’Écosse, contrairement à ce qui pouvait être redouté, et en dépit de dissidences manifestées au sein du SNP, le parti indépendantiste, n’a pas penché, par calcul, pour une sortie de l’UE. Mais environ 38 % des électeurs votant en Écosse se sont prononcés pour le Brexit. Il n’y a eu en fait que l’Irlande du Nord et Londres pour accorder une nette majorité au maintien dans l’Union, ainsi que, dans une moindre mesure, les comtés du centre et du sud regroupant de fortes proportions d’étudiants et de membres des classes moyennes supérieures.

Le Parti travailliste, qui redoute que Bojo (Boris Johnson) et les plus droitiers des conservateurs, affranchis des directives européennes, rognent résolument les avantages sociaux et allongent la durée du travail, n’a été que mollement suivi, voire souvent désavoué. Une large partie de son électorat a sans doute été plus sensible à la concurrence que représentent les immigrés (Polonais, Baltes et Roumains en particulier) sur le marché du travail. La direction du Labour Party a diffusé des éléments de langage pointant un vote sanction contre le gouvernement et la classe possédante.

Le sort du gouvernement de David Cameron semble en suspens. Boris Johnson et d’autres l’auraient volontiers laissé s’empêtrer avant de faire pression. Il les place face à leurs responsabilités en annonçant, une petite heure après la proclamation des résultats définitifs, sa démission. Elle deviendra sans doute effective en octobre prochain (après le congrès de son parti). L’Ukip, dont le chef de file, Nigel Farage, estimait, dès la fermeture des bureaux de vote, que le suffrage pour le maintien l’emporterait (et en faisait porter la responsabilité à l’organisation du scrutin), peut pavoiser.

Le futur, à moyen terme, est incertain… L’Écosse pourrait exiger un second référendum sur son indépendance. Il se pourrait même que l’Irlande du Nord songe à se rapprocher de Dublin.

Quant au futur proche, sauf dérapages, incidents chaotiques, ou réactions durables des marchés, notamment asiatiques, il semble orienté vers la circonspection. Le processus sera long et il n’est pas du tout sûr que les conservateurs ayant appelé à voter pour le largage des amarres veuillent vraiment le hâter.