(à la manière de JM…)

Mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde. (Camus)
Le malheur n’est jamais déçu par l’imbécile qui est en nous !
(Kafka)

La scène se passe dans l’ouest de la région parisienne, les Yvelines plus précisément, en l’an 2015 ; pas aux temps préhistoriques, ni même au Moyen-Age…

X, une résidente européenne, atteinte d’un cancer, se voit prescrire un traitement de radiothérapie quotidien. Elle demande un devis à Y, la clinique la plus proche de son domicile, comme sa situation d’expatriée l’y oblige. La réponse vient sans tarder : 75.000 €. Soixante-quinze mille euros, se dit la patiente, un coût énorme que mon assurance santé risque fort de refuser de prendre à sa charge.

 

Elle fait part de ses angoisses à la clinique précitée. « Adressez-vous donc à Z », lui conseille-t-on. Ce qu’elle s’empresse de faire, espérant que des tarifs plus accessibles lui permettront de bénéficier du traitement salvateur. Vœux exaucés : le devis ne s’élève cette fois qu’à 7.500 € « seulement ».

X choisira donc Z, l’espoir au cœur, mais la mort dans l’âme car la situation géographique de Z lui imposera, au quotidien on s’en souvient, un aller-retour d’une « petite » vingtaine de kilomètres.

Vous avez bien lu : un rapport de un à dix entre les deux mêmes offres ! Y facture 10 la même prestation que celle que Z propose de réaliser pour 1 !

Un constat qui suscite quelques réflexions.

Y et Z sont établis de longue date. Le monde étant ce qu’il est, on peut en déduire que les comptes d’exploitation de l’un comme de l’autre sont positifs. Il est donc plus que probable que les prestations facturées par Z lui permettent de dégager une marge.

La radiothérapie étant un traitement sinon banal, du moins de routine, son prix de revient comprend deux composantes essentielles, les coûts salariaux des personnels et l’amortissement des locaux et des matériels, le solde étant constitué de consommables (les mêmes dans tous les cas).

Ceci étant, rien ne permet d’éliminer l’hypothèse selon laquelle Z bénéficierait d’un environnement plus favorable que celui de Y ; ni que, toutes choses égales par ailleurs, Z devrait facturer 10.000 € (au lieu de 7.500) si elle devait supporter le même environnement que Y.

Même si la question ne s’est pas posée en l’occurrence, on peut imaginer que si X avait été française, elle aussi se serait adressée à Y, s’estimant suffisamment pénalisée par le fait d’avoir à subir un traitement lourd et récurrent. Le tandem Sécurité Sociale-Mutuelle santé aurait donc eu à couvrir un supplément de 75.000 – 10.000 = 65.000 €.

D’où la tentation de se poser une question : cette situation se rencontre-t-elle exceptionnellement, ou bien au contraire est-elle d’une affligeante banalité ? Et une question corollaire : dans le deuxième cas, existe-t-il le moindre rapport avec le déficit de la SS ? Enfin, une question subsidiaire : les 65.000 € supplémentaires se seraient-ils alors évaporés, ou bien auraient-ils cherché asile et trouvé refuge dans quelque poche en mal d’hospitalité ?

Qui saura répondre à ces « délicates » questions ?

PS : bien entendu, tout ce qui permettrait d’identifier X, Y ou Z a été très volontairement occulté. Pourtant, rien ne s’oppose à ce que vous diffusiez cette anecdote le plus largement possible !