Mokhtar Belmokhtar prétend, après les résultats mitigés pour ce qu’il campe de la prise d’otages à In Amenas, représenter Al Quaïda et favoriser l’ouverture de négociations « avec les Occidentaux et le gouvernement algérien ». Bonne idée : mais pourquoi le seul gouvernement algérien ? Le pakistanais, le yéménite, le syrien, l’afghan ou même le russe (à moins qu’il ne soit d’abord considéré « croisé »), tant d’autres, sont parties négligeables ? Pourquoi ne pas non plus en appeler à une négociation globale et pourquoi s’en tenir à la seule revendication mettre un terme aux bombardements visant les « musulmans du Mali » ? Que voilà donc une bien piètre, voire pitoyable « internationalisation ». Le de Gaulle djihadiste n’est qu’un maréchal Pétun.
Mokhtar Belmokhtar est un farceur… Sinistre, certes.
Aussi crédible qu’un chef de maquis français proposant à Hitler et Mussolini de mettre fin à la Seconde Guerre mondiale s’ils commençaient par lui garantir la tranquillité dans ses landes ou montagnes.
Simplement pour avoir réussi à liquider quelques supplétifs civils de diverses nationalités, échoué à faire se replier une partie importante de ses maquisards, échoué à faire sauter le dépôts de munitions, et n’avoir pas éliminé le moindre combattant de la Wehrmacht.
Toutes proportions gardées, cela revient à cela et si le coup de Tiguentourine redore le blason de Belmokhtar auprès d’autres chefs de « maquis », de cellules actives ou dormantes on ne sait où, la suite, d’une prétention ridicule, l’expose peut-être surtout à se faire liquider par ceux-là même qu’il défie et tente de supplanter ainsi : d’autres FMM (forces musulmanes maliennes).
Mais poussons la métaphore (pour ce qu’elle vaut). Cela laisse présager d’autres attaques, attentats ou coups d’éclat de la part d’alliés qui sont aussi des rivaux, en fonction d’une suite : Ben Laden n’était même pas un de Gaulle, certains maquis français ne se réclamaient pas prioritairement de lui, et ne parlons pas des autres : yougoslaves, grecs, italiens, &c.
De Mr Marlboro à maréchal Pétun
« Nous, Al Quaïda, annonçons cette opération bénie », fanfaronne Belmokhtar. Au nom aussi d’Altria et Phillips Morris International, Mister Marlboro ? Après tout, « Le Borgne », surnommé aussi ainsi, peut se targuer d’être un excellent agent commercial de la marque. Celui de la Reynolds Tobacco au nord du Mali va-t-il encaisser ce revers sans rien faire ? Et les autres, donc ? Le commandant Pétun (tabac) se voudrait seul maréchal, sauveur de l’oumma à lui seul ? Dérisoire !
Le succès (ou l’échec) relatif de Belmokhtar et d’une partie de ses hommes (Belmokhtar, combien de divisions ? au deux sens du terme, d’ailleurs…), est effectivement très dangereux : Aqmi, dont il est issu, risque de prendre ombrage de sa notoriété, et comme d’autres, vouloir faire pire et plus retentissant. Savoir où et quand est particulièrement inquiétant.
Son outrecuidance présente malgré tout un avantage. Interpeller ainsi l’armée et le gouvernement algériens (les tunisien et marocain aussi, bientôt ?) au prétexte qu’il aurait fait liquider une cinquantaine de « gaziers » (le bilan devrait s’élever à ou dépasser ce nombre), dont Mohamed Amine Lahmar, première victime algérienne, qui n’était quand même pas un « émir » (comme Abou El Bara, fidèle de Belmokhtar, lui aussi tué à Tigantourine), vaut inadmissible provocation. À l’endroit du pouvoir dont le blason a été aussi redoré dans la société algérienne, et même au-delà.
Alors que Kadhafi avait réussi à mettre à l’écart l’Algérie, en tentant de fédérer sans elle une Communauté des États sahélo-sahariens), Belmokhtar vient peut-être, par gloriole, au cœur d’un éventuel processus sécuritaire qui pourra avoir des prolongements.
Francisquain islamiste
Qu’il le veuille ou non, son « 11-septembre » personnel, comme le qualifie le JDD et un « expert » (encore un…) « égypto-allemand » aujourd’hui, n’a pas convaincu de sa puissance. Il a sans doute, indique un autre observateur, réussi à fédérer, pour cette opération, divers éléments issus d’autres mouvances. Il aurait pu capitaliser s’il n’était apparu seul, en « Mahdi » autoproclamé, alors qu’il en est d’autres. Il a certes obtenu sa « francisque » islamiste ; comme bien des anus s’ornent d’une rosette d’hémorroïdes.
D’autres, d’Aqmi, du Boko Haram, du Mujao, voire d’Ançar Dine, auraient sans doute davantage composé avec lui s’il avait obtenu des rançons pour des otages, fait fléchir un gouvernement ou un autre. Il reste très important dans la mesure où ses ressources en fonds, armements, contacts, relais, le sont.
Certes, il est possible que l’opération aura des répercussions internes en Algérie : le DRS n’a pas su prévenir cette attaque, il lui sera demandé des comptes. Surtout s’il apparaissait que Belmokhtar aurait dupé ses éventuels « officiers traitants » (il est présumé, fortement, mais non établi, qu’il conservait des contacts avec des officiers de renseignement algériens). Certes, il s’est fait formidablement mousser. Mais ensuite ?
Un sort de Duce
Le contrepoint, c’est qu’il ne peut être totalement exclu que la revendication par le seul Belmokhtar ait reçu l’aval d’autres chefs de guerre, d’autres directions de formations : les groupes ont montré un degré de coopération, avec une sorte de partage des tâches. Mais à leur allié Mussolini, l’Allemagne et le propre gendre du Duce réservèrent un sort funeste.
Sa katibat a changé de nom pour le plus porteur de Signataires du sang. Son lieutenant, dit le Nigérien, avait déclaré : « nous avons miné la zone, si les Algériens s’approchent, nous allons la faire sauter ». Elle risque certes encore de sauter si le déminage est insuffisant, mais l’apothéose spectaculaire, l’apocalypse télévisuelle fait place à un type seul se haussant du col devant une caméra. Et puis, les Russes ont fait mieux (150 otages tués en 1995, presque autant en 2002, le double en 2004).
L’armée algérienne a certes échoué à sécuriser la zone, mais elle a l’appui à présent de la majorité de l’opinion et hormis le Japon, les puissances étrangères ont fort modéré leurs critiques (à destination de leurs propres opinions). Le GIS (intervention spéciale, groupe du DRS), le DSI (détachement spécial de la gendarmerie), les commandos-parachutistes (17e division de l’ANP) font au final figure de héros.
Certes, Belmokhtar a galvanisé. Notamment, le 12 janvier, de vaillants « combattants » djihadistes qui ont incendié le mausolée de Sidi Bou Saïd, au nord de Tunis. Les islamistes radicaux n’avaient pas apprécié qu’il ait été en voie de restauration en vue d’une ouverture fin janvier. À cette occasion, le ministère tunisien de la culture avait condamné « les agressions répétées qui touchent les monuments historiques dont les mausolées et zaouias dans les différentes régions ». Comme à Tombouctou, dis-donc ! Comme dans tout le nord du Mali. En sus « Sidi Bou » (le fameux village) fait sans doute figure de siège de toutes les turpitudes de la société occidentalisée. Belmokhtar a certes « internationalisé », mais avec ce corollaire : les identités nationales de pays musulmans se sentent, s’estiment menacées. Il n’y a pas que les Tunisois ou les soufis (d’autres musulmans encore) qui voient dans le Sahelistan une menace et en Belmokhtar un ennemi « national ».
Allié malgré lui
Que retient l’opinion algérienne, alors même que le commando des « sanguinaires » avait juré-promis ne vouloir s’en prendre qu’aux ressortissants étrangers : « un mort, 685 otages libérés », et une atteinte à la souveraineté nationale.
Moctar Belaour, dit Khaled Abu El Abass, l’enturbanné devenu sanguinaire, revendique du Mali, de la France, de l’Afrique, du Maghreb, &c., « le respect de la volonté [du peuple malien musulman] d’appliquer la charia sur son territoire », donc, finalement, de tout le Mali puisqu’il y a des musulmans dans tout le Mali. Il précise que l’opération a mobilisé une quarantaine de djihadistes venant de pays musulmans et de pays occidentaux (on évoque un Français et un Canadien et six nationalités). Il exige le retour du cheikh Omar Abderrahmane en Égypte. Il évoque la mosquée al-Aqsa (ou al-Aksa) dont on ne sait si elle désigne, dans sa rhétorique, celle de l’esplanade des mosquées à Jérusalem ou ce qu’évoque son nom « la plus lointaine », soit on ne sait quelle mosquée japonaise, thaïlandaise, indonésienne ou même australienne ou chilienne. Charia, contrebande, oumma (travail, famille, patrie).
« Que le monde retienne la leçon : ce sont des monstres qu’il faut éradiquer à tout prix, » conclut l’éditorialiste de l’algérien Info Soir. Le Borgne a certes l’approbation du cadi El Houssein de Tombouctou qui condamne les pays musulmans qui « ont accepté d’être de l’autre côté, où se trouvent les ennemis d’allah ». Mais pour un peu, il a aussi presque rendu « tolérables » (ou plutôt déplorables, mais…) les drones américains au Pakistan qui frappent des populations civiles, si ce n’est bientôt l’armée syrienne loyaliste.
En fait, il n’aura servi, par une attitude dictatoriale, que le renforcement des autres dictatures. Accessoirement, il continuera à enrichir les multinationales du tabac dont il reste l’un des plus efficaces agents commerciaux de Nouakchott à au-delà de Benghazi. Il a aussi « démonétisé » ses éventuels propres otages et ceux des autres factions djihadistes, présents ou à venir (ce qui n’arrange pas les affaires de ses actuels partenaires et futurs concurrents). Le maréchal Pétun a bien mérité ; il obtiendra ce qu’il mérite.
[b]où et qui ? bien malin qui saurait deviner ce qui se passe sous le crâne de ces névrosés et épileptiques compulsifs ![/b]
Espérons que cet épisode soit son chant de cygne…..et que les drones s’occuperont de de lui…..et de tous les autres …..
ou et qui et qui ?
qui les arme ?