René Maran, l’auteur de Batouala*, ce chef d’œuvre romanesque est d’origine Guyanaise. L’œuvre se déroule quelque part en Oubangui-Chari, en Afrique équatoriale française, aujourd’hui République Centrafricaine. Au-delà du personnage principal, Batouala, qui donne son nom au titre de cet ouvrage, l’objectif de René Maran, c’est de faire la satire du colonialisme tel qu’il était réellement mais pas comme ont voulu le faire croire ses devanciers gouverneurs.
Il lui a fallu une dizaine d’années pour le parfaire, une dizaine d’années de travail acharné, couronné par le prix Goncourt de la littérature française en 1921. Sur le plan stylistique, ce roman est une référence. La préface qui sert d’intermède entre la couverture et l’œuvre proprement dite est annonciatrice de sa valeur. Le lecteur qui la découvre nouvellement ne se lassera point à la lire et la relire, tant les idées utilisées sont expressives et enrichissantes. En dépit de son talent reconnu par tous les critiques de son époque, humble, René Maran ne s’est point empêché de dire ceci : « Il ne me reste de tout ce passé si proche que d’avoir fait mon métier d’écrivain français et de n’avoir jamais voulu profiter de ce brusque renom pour devenir un patriote d’affaire ».
René Maran décrit si bien la nature, tous les faits et gestes de Batouala, que le peintre n’aura aucun problème en faire un millier de tableaux. Pour les amoureux de la pluie, ils tomberont sur des passages tels que « drue, diluvienne, torrentielle », qui les rapprocheront plus des effets exacts de la grande saison pluvieuse en Afrique, comme s’ils y étaient. Quelle description parfaite !
Il formait avec Senghor, Damas et Césaire, le quatuor de la Négritude, ce courant de revendication du talent noir, très vite pris en contrepied par les écrivains Woyé Soyinka et Stanislas Adotevi, parlant de la Tigritude. Un courant qui a marqué à jamais la littérature africaine par ses œuvres monumentales telles que Chants d’ombre de Senghor, Pigments de Damas et Cahier d’un retour au pays natal de Césaire.
Pour l’écrivain débutant ou pour le lecteur avide de style recherché, Batouala s’avère un bon outil de travail, qu’il faut forcément avoir dans sa bibliothèque.
*Batouala, René Maran, Paris, Ed. Albin Michel, 1921, 169 p.
Constant Ory
Ecrivain
Je ne connaissais pas son œuvre. Merci !