Militante de la branche féminine d’Ekta Parishad, un mouvement soutenant les droits des paysans sans terre en Inde, Lillykutty était en tournée dans toute la France durant tout le mois de mars. Elle était présente à la Maison des Tiers-mondes de Montpellier le 22 mars dernier, pour nous présenter son mouvement et ses actions.
Commençons par une brève présentation d’Ekta Parishad…
Notre mouvement a été créé en 1990 par Rajagopal V.S, et se base sur le principe gandhien de non-violence. Notre combat porte sur l’accès des paysans à la terre afin qu’ils puissent prendre leur destin en main. Les inégalités concernant l’accès à la propriété demeurent considérables: 43% de la population rurale possède peu ou pas de terre, alors que 10% des agriculteurs s’en accapare plus de la moitié. La construction de barrages,bâtiments ou d’usines ces dernières décennies ont provoqué le déplacement de nombreux paysans. Ces derniers n’ont eu droit à aucune compensation financière. Pour remédier à ces injustices, nous voulons faire connaître à ces populations leurs droits et les moyens de résoudre leurs problèmes.
Quels moyens de pression utilisez-vous pour vous faire entendre?
Nous sommes à l’origine de nombreuses actions populaires (marches, rassemblements, auditions publiques…). Ekta Parishad est présent dans 11 régions regroupant 5,5 millions de personnes. 380 militants se dévouent à notre cause, et 170 000 citoyens nous soutiennent financièrement. En 2007, une marche partant du nord de l’Inde jusqu’à New Delhi a été organisée pour protester contre l’insuffisance des réformes agraires. Elle fut suivie par 25000 personnes. Une initiative similaire est prévue en octobre prochain.
Quels résultats avez-vous obtenus?
Il y a 3 ans, une loi sur le droit des populations tribales forestières à la propriété (Forest Rights Act) est entrée en vigueur. Depuis, plus d’un million de titres de propriété ont été distribués. Par ailleurs, Un comité a été mis en place afin d’évaluer l’impact des réformes agraires. Rappelons aussi que 750 000 plaintes infondées du département des forêts contre les populations tribales ont été retirées. Enfin, la Cour suprême est actuellement en train d’examiner d’autres revendications du mouvement.
Quelles seront vos revendications pour la marche de 2012?
Malgré certaines avancées, il reste encore du chemin à faire. La loi sur le droit des populations forestières n’est que partiellement appliquée. Cette année, nous exigeons l’établissement d’une surface minimum a laquelle aurait droit chaque paysan. Nous allons par ailleurs faire pression sur le gouvernement afin de faire obtenir des titres de propriété à plus de trois millions de paysans "sans terre". Signalons enfin qu’un collectif d’associations « Paysans sans terre d’ici et d’ailleurs » organisera en octobre, en Languedoc, de Montpellier à Carcassonne, une marche en soutien à la marche d’Ekta Parishad en Inde.
20 ans après la création d’Ekta Parishad, le combat en faveur d’une répartition plus égalitaire des terres reste toujours d’actualité en Inde. La nécessité d’organiser une nouvelle marche en est la preuve. Néanmoins, les avancées obtenues grâce à ce mouvement sont là pour nous rappeler que l’engagement citoyen peut peser sur les décisions gouvernementales.