un épisode douloureux de la guerre d’Algérie.

Plus de 200 morts par noyade ou exécutés lors d’une manifestation interdite par le couvre-feu de sympathisants du FLN, Organisation Militaire de Libération Nationale. Un épisode peu glorieux de ce conflit Algérien qui ébranla notre république. 150 cadavres furent repêchés dans la Seine. Encore sous la chape du secret, cette tragédie peu connue des Français, sauf par ceux de mon époque qui se rappelle à nous. Au terme de 50 ans le souvenir parle pour que la mémoire ne se perdre dans le fil du temps. Des manifestations commémoratives ont eu lieu à Paris à l’Assemblée nationale, des marches du Collectif du 17 octobre, des rendez-vous, des films un peu partout commémorent ce 50ème anniversaire par devoir d’historique et pour la reconnaissance de ce massacre. La police à matraqué, tué de pauvres Algériens aux ordres du FLN. Un épisode odieux que l’État Français ne veut reconnaître. Il ne s’agit pas de droite ou de gauche mais de l’État car les deux idéologies ont gouverné la France.

Dans la nuit du 16 au 17 octobre, la préfecture de police fut informée d’une manifestation organisée par le FLN qui se voulait pacifique, mais qui, dans le climat de cette guerre ou des attentats contre des policiers eurent lieu même à Paris rendirent explosif tout ce qui se rapportait au FLN. Ces attentats dont ils furent les victimes engendrèrent de leur part un mouvement de révolte compréhensif et demandèrent, probablement poussés par les membres de l’OAS et de l’extrême droite, que les coupables soient condamnés à mort, sinon ils se feraient justice eux mêmes. Dans ces conditions le préfet de police instaura un couvre-feu pour les Nord-africains. Il fut alors conseillé de la façon la plus pressante aux travailleurs Algériens de s’abstenir de circuler la nuit dans les rues de Paris et de la banlieue parisienne, et plus particulièrement entre 20h30 et 5h30 du matin. Il fut également déconseillé aux Nord-Africains de circuler à plusieurs, les assassinats de policiers étaient le fait de groupes de trois ou quatre hommes. Il s’agissait «de mettre un terme aux agissements criminels de terroristes Algériens». Mais en fait, il fallait réduire l’activité du FLN et ses collectes de fonds afin de prendre un avantage définitif dans la «Bataille de Paris» qui opposait depuis 1958 le FLN aux Messalistes, voir plus bas. Le FLN entendait contrôler toute la population Algérienne vivant dans la région parisienne. Ce couvre feu fut une gêne considérable pour leurs activités principalement nocturnes. Bien qu’il fut critiqué par la gauche, par les communistes, et par le MRP, mais aussi par les organisations contre le racisme, la traque au faciès, bien que citoyens Français à part entière, ils ne devaient pas être l’objet de ces discriminations.

A ce couvre feu, le FLN, décida de riposter par un plan d’actions détaillées au comité fédéral qui visait dans la matinée du 17 octobre à la grève des cafés, commerces et hôtels le 18 ainsi que des manifestations de femmes et d’enfants le 20. Le mot d’ordre ne devait être donné à la base que dans la journée du 17 octobre afin que la police ne le sache que le plus tard possible. Le «boycottage du couvre-feu raciste» devait être pacifique, c’est la raison qu’hommes, femmes et enfants Algériens décidèrent d’y participer. Le port d’armes fut interdit, et des fouilles furent pratiquées. Les manifestants eurent pour mission d’atteindre à 20 h 30 différents endroits à Paris, boulevards, et places sans gêner la circulation.

A 16 h 20 tous les services de la préfecture de police furent informés que «le FLN ordonnait à tous les FMA, Français Musulmans d’Algérie, de sortir ce soir 17 octobre en fin d’après-midi et en soirée sur les grands axes de la capitale afin de manifester pacifiquement contre les récentes mesures préfectorales». Consigne fut donnée dans ce même télégramme d’appréhender les manifestants, de conduire les hommes au Palais des sports, les femmes et les enfants au poste de police de la rue Thorel, dans le IIème arrondissement. 1658 hommes furent mobilisés entre policiers, gendarmes et CRS. La tension des policiers était extrême, une rumeur circula que cinq policiers étaient tués.

Cette manifestation, même pacifique, était une provocation dans ce climat de guerre Algérienne, il fut donc logique qu’elle fut réprimée, mais surtout pas de la façon dont elle le fut.

Les concentrations prévues des manifestants furent la Place de l’Étoile, les boulevards Saint-Michel et Saint-Germain, et les Grands boulevards et la place de la République. Entre 20.000 à 30.000 manifestants se dirigèrent par petits groupes vers les lieux de rendez-vous qu’ils n’atteindront pas pour la plupart. Certains furent arrêtés à la hauteur des ponts de Neuilly et Saint-Michel, où ils furent tabassés et jetés dans le fleuve. Des violences eurent lieu dans les couloirs souterrains des métros d’où ils sortaient, Concorde, Madeleine, Étoile, Opéra. Les armes utilisées furent diverses, crosses d’armes, matraques, «bidules», longues matraques de bois, mais aussi armes non-conventionnelles comme des manches de pioche et des barres de fer. Les policiers frappèrent au ventre et à la tête. Dans le quartier latin, de nombreuses balles furent tirées par la police.

Les incidents du secteur des Grands Boulevards furent particulièrement violents et sanglants. Ceux qui avaient pu réussir leur rassemblement place de la République, brandirent des drapeaux et écharpes aux couleurs vertes et blanches du FLN et scandèrent les slogans «Algérie algérienne», «libérez Ben Bella». Ils se heurtèrent à deux compagnies de CRS devant le cinéma le Rex. Des coups de feu partirent d’un car de police transportant des interpellés vers le commissariat de la rue Thorel et il fut bloqué par des manifestants. Après les événements, l’état de la voie publique fut comparable à celui du Pont de Neuilly, débris de verre, chaussures perdues, flaques de sang, nombreux blessés gisant sur le trottoir.

L’autre secteur d’affrontements violents fut celui du secteur Saint-Michel Saint-Germain, à proximité de la préfecture de police dans la cour de laquelle les cars de la police déversèrent des flots de manifestants interpellés, plus d’un millier au total. Dans la rue, les forces de police encerclèrent les manifestants qu’ils chargèrent et frappèrent. Pour échapper aux coups des policiers, certains préférèrent se jeter dans la Seine du Pont Saint-Michel.

Plus de 11 000 Algériens furent interpellés et internés pendant près de quatre jours au Palais des Sports, au Parc des Expositions, au stade de Coubertin, au Centre d’Identification de Vincennes. Dans l’enceinte des lieux d’internement, les violences systématiques continuèrent et des exécutions sommaires eurent lieu. D’autres furent internés dans les commissariats parisiens et même, pour 1 200 d’entre eux, dans l’enceinte de la préfecture, où des policiers dénoncèrent à France-Observateur l’exécution de 50 Algériens ensuite jetés à la Seine. Une noria de cars de police et de bus réquisitionnés débarqua entre 6. 000 et 7. 000 Algériens au Palais des sports de la porte de Versailles. Au cours de ces transports, les corps furent parfois empilés les uns sur les autres. Après une heure du matin, les derniers cars, contenant 2 623 Français Musulmans d’Algérie, FMA, selon la dénomination de l’époque furent dirigés vers le Stade de Coubertin. Des centaines de manifestants blessés furent dirigés vers des hôpitaux. Dans cinq hôpitaux seulement, on compta 260 blessés hospitalisés. Sur ces 260 blessés, 88 furent admis entre le 19 et le 21, ce qui témoigna de la persistance des brutalités policières bien au-delà de la nuit du 17 octobre. Parmi les policiers, une dizaine furent conduits à la Maison de santé des gardiens de la paix pour des blessures légères. Certains des blessés hospitalisés vinrent du Palais des sports où les 150 policiers qui assuraient la garde des détenus se livrèrent à des brutalités. Des policiers diront dans les semaines suivantes « …d’après ce que nous savons, il y a eu une trentaine de cas absolument indéfendables ». Les bus de la RATP réquisitionnés par la police pour convoyer les détenus furent rendus couverts de sang.

Les 18, 19 et 20 octobre, les actions prévues par le FLN se déroulèrent pourtant, et donnèrent également lieu à une répression policière, grève des commerces brisée par des réouvertures forcées, plus de 2 000 manifestants arrêtés lors de manifestations avortées lors desquelles d’autres assassinats furent commis, violences physiques et verbales contre la manifestation des femmes du 20 octobre réclamant l’indépendance de l’Algérie et la libération des hommes, 60% des Algériens de Paris furent alors en détention.

Au mois d’octobre Maurice Papon et Roger Frey ministre de l’intérieur durent répondre à un feu continu de questions embarrassantes, au Conseil municipal de la ville de Paris, à l’Assemblée nationale, et au Sénat. Une demande de constitution d’une commission d’enquête fut rejetée par 43 voix contre 39. Au niveau du gouvernement le silence fut total, comme si ce qui venait de se passer n’exista pas ou bien avait dépassé ce qui fut imaginé. Il est évident que l’État ne pouvait ne pas couvrir les actes criminels que certains policiers avaient faits.

Pour Maurice Papon dans son communiqué de presse, il fit état que la police dispersa une manifestation à laquelle les Algériens furent contraints de participer sous la menace du FLN. Toujours selon le communiqué, la police sur laquelle des coups de feu furent tirés avait dû répliquer, faisant deux morts et plusieurs blessés chez les manifestants. Il fut également état de l’hospitalisation d’une douzaine d’officiers de police et du renvoi en Algérie de tous les manifestants arrêtés.

Nombreux furent les journalistes à couvrir la manifestation du 17, mais la censure de la presse en vigueur pendant la guerre incita à la prudence, c’est ce point de vue officiel que refléta la presse quotidienne le 18 au matin. Mais dès le 19, les journaux publièrent une version plus détaillée des évènements. De nombreux journalistes se rendirent dans les bidonvilles de la banlieue parisienne et y découvrirent les signes de la violence policière qui sévirent non seulement le 17 octobre, mais aussi précédemment.

Ces crimes de la république sont restés impunis. Autorisés, supportés ou dépassées par les autorités de l’époque en pleine guerre d’Algérie qui touchait à sa fin. La situation était tendue, le FLN, se trouvait en conflit avec le Mouvement National Algérien, le parti des Messalistes du nom de Messali Hadj homme politique réclamant l’indépendance de l’Algérie depuis 1927. Après le putsch des généraux à Alger du 16 avril 1961 organisé le cadre de l’OAS, Organisation Armée Secrète, par les partisans de l’Algérie Française, après le référendum sur l’autodétermination en Algérie, le FLN décida de passer à l’assassinat de responsables Messalistes en France. Cette guerre fratricide portait sur l’impôt révolutionnaire payé par les travailleurs Algériens en métropole. Le FLN qui était devenu puissant avec 150.000 adhérents pour 6.000 en 1960, briguait cet impôt. Cet impôt représentait près de 80 % des ressources du FLN, le restant provenait de la Ligue arabe. Son emprise se développait dans la vie quotidienne, prescrivant la loi Coranique, interdisant la consommation d’alcool, le recours aux tribunaux Français, et éliminant les contrevenants.

Jusqu’en 1958 le FLN s’organise suivant une structure pyramidale et programme des attentats spectaculaires. La police qui fut parvenue à démanteler cet appareil, ficha les principaux membres des hôtels et foyers pour les interner dans des centres surveillés comme les camps du Larzac, Aveyron, Rivesaltes, Pyrénées-Orientales, Saint-Maurice-l’Ardoise, Gard, Thol, Ain, Vadenay, Marne, et certains furent expulsés en Algérie. Près de 14.000 Algériens suspectés membres du FLN y furent internés, dont 4.000 au camp du Larzac. Ensuite le FLN se réorganisa en petits groupes de trois ou 6 et put ainsi compter sur 450 membres en région parisienne pour organiser des groupes de chocs, auxquels s’ajoutèrent 8 compagnies de 31 hommes chacune constituant l’arme de combat formée de tireurs confirmés et de techniciens des explosifs chargés d’éliminer les traitres.

C’est à cet appareil militaire que la préfecture de police dirigée par le préfet Maurice Papon fit face à partir de 1958. Le 30 novembre 1958 Michel Debré premier ministre décida de créer une Force Auxiliaire de Police, les «Harkis de Paris», musulmans et Algériens volontaires. L’objectif de la FPA fut de disloquer l’organisation du FLN en arrêtant les responsables et en empêchant le prélèvement des cotisations. Leur efficacité conduisit rapidement le FLN à une guerre sans merci. Le poste de la Goutte d’Or bien connu sur le boulevard Barbès pour sa forte concentration musulmane et maghrébine fut attaqué par deux groupes armés le jour même de son installation, le 20 novembre 1960, puis le 4 décembre. D’une façon générale, les postes et les cafés tenus par la FPA dans le XVIIIème arrondissement seront la cible de commandos qui y subissèrent de lourdes pertes, dans chaque camp.

Il est évident dans ce contexte que ce qui s’est passé le 17 octobre 1961 et les jours suivants ne peut surprendre, sans l’excuser. La guerre d’Algérie prévisible pour son indépendance fut combattue par les pieds noirs qui se sont fait ensuite rouler dans la farine par le général de Gaulle, accordant l’indépendance aux Algériens. Ce récit historique non exhaustif est tiré de Wikipédia, du blog Changement de société, et de Rebellion info.

Le prochain article sera, les dépenses de com’ du gouvernement,