Une injustice évitée…

Kader, un employé modèle, risquait d’être licencié pour avoir récupéré quelques melons et un peu de salade…L’opinion publique a fait plier l’entreprise. Retour sur une émotion, qui dissimule bien plus …

L’histoire a suscité l’émotion, amenant la société, MONOPRIX (groupe CASINO) à ne pas poursuivre dans la procédure, qu’elle avait initiée. Petit retour en arrière. Un employé d’un magasin Monoprix de Marseille est surpris, par un cadre de ce même point de vente, récupérant melons et salades dans une poubelle. Appliquant le règlement, cet employé est mis à pied et convoqué à un entretien préalable au licenciement.

 

L’affaire n’aurait pas été médiatisée , l’employé aurait été licencié pour faute grave, la société estimant avoir été volé. Mais, un tel employé, exemplaire selon se collègues, à seulement deux ans de la retraite, qui n’arrive pas à avouer son sort à sa propre famille, ne pouvait pas, pour l’opinion publique, être licencié. Reprise par les médias, l’affaire a donc été revue par Monoprix, qui a décidé une simple mise à pied d’une journée pour non respect du règlement intérieur.

 

J’approuve, à la lecture des faits, la décision du groupe, car comment peut-on reprocher à un employé, dont les revenus ne sont pas mirobolants, de récupérer des produits, destinés à la destruction. Même si les groupes de distribution –et il ne s’agit que de multinationales – ont des politiques identiques, fermes et claires – grosso modo, le mot d’ordre est « Rien ne sort du magasin sans l’autorisation du directeur » – , l’application en magasin reste à la discrétion de ce directeur, qui, bien souvent, autorise les employés à récupérer ces marchandises retirées de la vente. Car, le directeur d’un point de vente côtoie ces employés, qui ne sont donc plus que des matricules. Lorsqu’il les appelle pour un dépannage urgent – untel ou untel est malade, et il faut le remplacer au pied levé -, il sait qu’on ne lui opposera pas d’arguments stéréotypés – « Les changements d’horaires doivent être demandés 48 heures à l’avance, Monsieur le directeur… »-. Aussi, à son tour, il sait se montrer plus coulant, et être plus humain que technocrate. C’est de cela, dont il s’agit uniquement : les relations humaines.

 

Mais alors, pourquoi ces règles absurdes existent au niveau des sociétés ? Au risque d’en faire hurler certains, je vois 2 grandes  raisons de voir ces groupes de distribution appliquer de telles interdictions, assimilant la récupération de ces denrées à des vols purs et simples :

 1.     La protection de la santé des salariés.

 En récupérant des produits avariés, le salarié pourrait  mettre en cause la responsabilité de l’enseigne. A titre personnel, j’ai vu des personnes démunies récupérer de la viande dans des poubelles, alors que la température dépassait les 30 degré et que la viande y était entreposée depuis de longues heures. Le danger est bien réel. D’un autre côté, la pression du législateur mais aussi des voisins de ces commerces demandent à cette grande distribution de rendre impropre à la consommation tout produit retiré des rayons. Pour les premiers (le législateur), il s’agit d’une volonté de santé publique, et pour les seconds d’un simple confort – les habitants, voisins de ces commerces, n’apprécient guère entendre, voir  les personnes démunies se ruer pour retourner les poubelles. On sourira en pensant, que ces mêmes personnes seront horrifiés le jour, où l’un de ses récupérateurs sera retrouvé victime de malnutrition -. Aussi voit-on la « javellisation » des produits périmés. Il s’agit, avant de jeter un produit de le rendre impropre à la consommation, notamment en l’aspergeant de javel. Il n’est pas sur, que la consommation d’un laitage, dont la date de péremption est dépassée de quelques jours, soit moins nocive que l’absorption d’un fruit imprégné de javel…

 

2.     La lutte contre le vol.

  Même si ils gèrent des millions – voire des milliards- d’euros, les groupes de distribution ne sont pas gérés par des personnes, dont l’humanité aurait été abolie. Ils connaissent l’écœurement, que peut susciter, auprès des salariés de l’entreprise, le fait de jeter des produits encore consommables – personne n’est mort d’avoir consommé un yaourt dont la date était dépassé d’une semaine, ou un fruit taché,…-. Lors du développement de la distribution, dans les années 60, la récupération était non seulement permise, mais représentait un avantage non négligeable pour les salariés, avantage parfois mis en avant par certaines enseignes.

Comme dans tout système, il y eut des abus. Ainsi, les agents de sécurité, ou les managers du magasin si ce dernier était de petite taille, eurent tendance à faire confiance, à être humain. Et, ce qui devait arriver arriva : après la récupération des produits périmés,  certains eurent tendance à abuser. Ainsi recevant du monde le soir même, tel employé avait besoin d’un pack de bière de la marque X. Plutôt que de l’acheter, il suffisait de retirer une bouteille de ce pack le rendant invendable et donc aussitôt détruit. Besoin d’une célèbre boisson anisée…retirer l’étiquette condamne la bouteille à la destruction, et donc à la récupération…Les exemples sont si nombreux, qu’il m’est impossible d’en faire l’inventaire.  Néanmoins, ayant travaillé 15 ans dans la Grande Distribution, je peux affirmer, qu’il ne s’agit malheureusement pas de « légendes urbaines » mais bel et bien la véracité en ce qui concerne une minorité de ces employés. A titre personnel, je me souviens d’un ancien collègue, alors que je travaillais pour une grande marque de menuiserie industrielle, s’excuser auprès de son employeur car il avait fait une erreur de dimensions en commandant une porte sur mesure. De dimensions exceptionnelles, la porte reçue était donc inutilisable, et il fut décidé de la détruire…Ce même employé fit attention le soir à ne pas éveiller l’attention lorsqu’il chargea la porte. Il avait bien fait une erreur de dimensions en commandant la porte : il avait saisi les dimensions de sa porte et non celles du client. Bien sur, il ne s’agit pas de tous les employés mais d’une minorité indélicate. Comment faire le tri ? Impossible, donc les mêmes groupes ont décidé d’interdire toute récupération, espérant ainsi couper court à toute tentation.

 Difficile de trancher donc, même si nous e pouvons que réaffirmer notre totale adhésion avec la décision de Monoprix dans l’affaire, qui nous intéresse.

 

Auteur/autrice : ERIC REDACTION

Rédacteur Web et print indépendant depuis 2010. De la rédaction SEO à l'écriture du roman de votre vie, la passion de l'écriture au service des messages à faire passer ....