et à celle de Napoléon 1er

 

Vidéo Arc de Triomphe.

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Arc triomphal, la foudre en terrassant ton maître
Semblait avoir frappé ton front encore à naître.
Pour nos exploits nouveaux te voilà relevé!
Car on n’a pas voulu, dans notre illustre Armée,
Qu’il fût de notre renommée
Un monument inachevé !
Dis aux siècles le nom de leur chef magnanime
Qu’on lise sur ton front que nul laurier sublime
A des gloires françaises ne peut se dérober.
Lève-toi jusqu’aux cieux, portique de victoire !
Que le géant de notre gloire
Puisse passer sans s’y courber !

Victor Hugo.

«Soldats, je suis content de vous. Je vous ramènerai en France. Là, vous serez l’objet de mes plus tendres sollicitudes. Mon peuple vous reverra avec joie et il vous suffira de dire : j’étais à la bataille d’Austerlitz pour que l’on vous réponde : voilà un brave !».

C’était au lendemain de la bataille d’Austerlitz aussi connue comme la bataille des trois Empereurs qui a été l’une des des plus grandes victoires de Napoléon Bonaparte détruisant la troisième coalition contre l’Empire Français, le 02 décembre 1805 que fut décidé, par la prise d’un décret le 18 février 1806 renouant avec la tradition Romaine, la construction d’un arc de triomphe en l’honneur de la Grande Armée à l’ouest de la barrière de l’Etoile, d’ou son nom primitif d’Arc d’Austerlitz, l’Arc du Carrousel étant l’Arc de Marengo. N’avait-il pas déclaré dans sa proclamation aux soldats au lendemain de cette bataille

«vous ne rentrerez dans vos foyez que sous des arcs de triomphe».

La première pierre de cet édifice fut posée le 15 août de la même année au carrefour de l’Etoile.

Cet arc de triomphe était à la gloire du génie militaire de Napoléon.

La ville de Paris a organisé en avril 1999 une exposition intitulée,

«Art ou politique ? Arcs, statues et fontaines de Paris».

A cette occasion, Georges Poisson, auteur d’une importante Histoire de l’architecture à Paris (1997) raconte,

l’histoire du plus célèbre monument napoléonien, voir ici .

 

C’est sur les sommes perçues sur le commerce des blés que fût prise de façon imprévue la décision de construire l’un des monuments les plus importants de Paris. Sur celles-ci, on emploierait «10% pour élever un arc de triomphe à l’entrée des boulevards, du côté de la rue Saint-Antoine».

Le thème de l’arc de triomphe, objet depuis la Révolution d’innombrables projets d’architectes, était majeur dans l’esthétique de cette époque où l’Antiquité romaine était proposée comme modèle philosophique et moral. Après tout, Rome elle aussi n’était-elle pas passée de la République à l’Empire ?

 

jean-baptiste_de_nompere_de_champagny.1253363853.jpgJean-Baptiste de Nompère de Champagny, duc de Cadore 04 août 1756-03 juillet 1834.

Le même 18 février, Napoléon écrivait au ministre de l’Intérieur Champagny, «Vous emploierez 500 000 francs pour l’érection d’un arc de triomphe à l’entrée des boulevards, près du lieu où était la Bastille, de manière qu’en entrant dans le faubourg Saint-Antoine on passe sous cet arc de triomphe»,(Correspondance, XII, 9841).

L’est de Paris était en effet le point traditionnel de départ et de retour des armées et à plusieurs reprises les autorités municipales s’étaient rendues cours de Vincennes ou à la barrière de la Villette pour accueillir les soldats victorieux. La route de l’ouest, route de l’Angleterre, était moins pavée de victoires. D’ailleurs, l’idée d’un arc à l’entrée est de Paris remontait au XVIe siècle et s’était un moment exprimée dans celui construit par Perrault place du Trône.

 

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Place du trône la foire aux pains d’épice 1863

Par ailleurs, l’aménagement et la décoration de la Bastille étaient une des constantes préoccupations urbanistiques de l’Empereur. La forteresse rasée avait laissé place à un espace informe, irrégulier, mal pavé, sans plan et sans décor. L’arc, placé en travers de l’axe de la rue Saint-Antoine, en face du faubourg dont on rectifierait le tracé pour la circonstance, il ne l’est toujours pas aujourd’hui, formerait un point de fixation autour duquel pourrait se développer une opération d’urbanisme.

 

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Paris. La place de la Bastille et la colonne de Juillet, vers 1890.© ND / Roger-Viollet

L’Empereur voulait en même temps tracer une voie en droite ligne depuis la colonnade du Louvre jusqu’à la Bastille, en culbutant Saint-Germain-l’Auxerrois. Dans l’affaire de l’arc, on sent très bien que, dès le départ, Champagny fut opposé à la Bastille. Peut-être lui parut-il difficile d’élever un ornement central avant que la place elle-même fût traversée ? Peut-être sentit-il confusément que le Paris monumental et politique était tourné vers l’ouest ? Toujours est-il que nous le voyons, quelques jours après le décret, nommer une commission où figuraient notamment Gondouin, Roland et Dejoux, mais ni Percier, ni Fontaine, ni Chalgrin.

 

img728.1253433819.jpg«Jean François Thérèse Chalgrin (1739-1811) franc-maçon figure exemplaire du néoclassicisme qui se développa sur le territoire national sous le règne de Louis XVI, membre de l’Institut et du Conseil des bâtiments civils. Il reçoit des mains de Napoléon la commande en 1806 de l’Arc de Triomphe, et il en dessina les plans»,

pour délibérer sur le projet et son emplacement. Ladite commission enterra allégrement la Bastille, la Nation, l’Étoile, et proposa avec conviction de placer l’arc au débouché du pont de la Concorde, sur la place du même nom. Puis, effrayée de son audace, elle fit un second projet où elle revenait à la Bastille.

 

Étoile contre Bastille.

Champagny, de ces diverses options, devait faire pour l’Empereur la synthèse. Son rapport est un petit chef-d’œuvre de littérature administrative, à proposer en exemple aux fonctionnaires soucieux de faire adopter leurs vues. Distribuant des fleurs à la commission, s’abritant derrière le Conseil des bâtiments civils, mettant en valeur certains arguments et en escamotant d’autres, jouant à bon escient de la corde financière, le ministre combattait à boulets rouges le projet de la Bastille, sous le prétexte, d’ailleurs valable, que les voies qui y menaient ne se croisaient pas en un même point et que certaines d’entre elles, sinueuses, n’offraient pas de perspective.

Et, in fine, tel un magicien, il présentait sa panacée, le carrefour de l’Étoile, accompagnée d’un torrent d’arguments,

«Un arc de triomphe y fermerait de la manière la plus majestueuse et la plus pittoresque le superbe point de vue que l’on a du château impérial des Tuileries… Il frapperait d’admiration le voyageur entrant dans Paris… Il imprimerait à celui qui s’éloigne de la capitale un profond souvenir de son incomparable beauté… Quoiqu’éloigné, il serait toujours en face du Triomphateur. Votre Majesté le traverserait en se rendant à la Malmaison, à Saint-Germain, à Saint-Cloud et même à Versailles».

 

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La longue argumentation de Champagny est reproduite dans L.Biver, Le Paris de Napoléon, Paris, 1963.

En réalité, l’idée n’était pas de Champagny, mais de l’architecte Jean-François Chalgrin. Ce dernier, dans une lettre du 22 avril 1806 au ministre, avait rappelé qu’au retour de Marengo il avait proposé d’édifier un arc soit à la Concorde, soit à l’Étoile, que cet emplacement lui semblait préférable, mais que la dépense serait plus onéreuse, la position exigeant un monument plus colossal. Champagny, tout en adressant à Chalgrin des remerciements courtois, s’appropria sans hésiter l’idée. Napoléon, comme tous les grands patrons, savait accepter les suggestions qui allaient dans le sens de sa politique, et se souvenait de la Gloriette qu’il apercevait l’année précédente des fenêtres du palais de Schönbrunn, au fond du parc.

Le 9 mai suivant, il répondait au ministre,

«Monsieur Champagny, après toutes les difficultés qu’il y a à placer l’arc de triomphe sur la place de la Bastille, je consens qu’il soit placé du côté de la grille Chaillot, à l’Étoile, sauf à remplacer l’arc de triomphe sur la place de la Bastille par une belle fontaine, pareille à celle qu’on va établir sur la place de la Concorde».(Correspondance, XII, 10217. Sur les premiers projets d’arc et l’évolution de la pensée de l’Empereur, (cf. Isabelle Rougé, «L’Arc de triomphe de l’Étoile», in Art ou politique ? Arcs, statues et colonnes de Paris, Ville de Paris, 1999).

Aucune fontaine ne devait finalement s’établir sous l’Empereur à la Concorde ni à la Bastille. En revanche, le projet était cette fois bien arrêté de construction simultanée de deux arcs, tous deux visibles du palais des Tuileries, et qui symboliseraient l’un la gloire consulaire, l’autre la gloire impériale. «Il faut, dit une note dictée le 14 mai, que l’un soit l’arc de Marengo, l’autre d’Austerlitz». J’en ferai un autre dans une situation quelconque à Paris, qui sera l’arc de triomphe de la Paix et un quatrième qui sera l’arc de triomphe de la Religion. Avec ces quatre arcs, je prétends alimenter la sculpture de France pendant vingt ans. Projets en l’air, bien sûr, comme Napoléon, dans ses premières années de règne, aimait en former, sans jamais être complètement dupe de lui-même. Mais la décision concernant l’arc de l’Étoile était prise et bien prise.

 

Arc, colonne ou éléphant ?

Depuis 1670, la colline de l’Étoile était gravie par la perspective tracée par Le Nostre en droite ligne depuis la Concorde actuelle jusqu’à la barrière de Chaillot, à l’emplacement de notre rue de Berry. Paris s’arrêtait là, et il en sera ainsi jusqu’en 1860. Au-delà, sur les territoires de Neuilly et Passy, se dressait le faîte de la colline de Chaillot, plus escarpée qu’aujourd’hui et pratiquement déserte.

Au début du XVIIIe siècle y fut aménagé un carrefour de chasse comme en comportaient les forêts royales et qui comme eux fut nommé «étoile de Chaillot». Lors de la création de la place Louis XV, Concorde actuelle, Ange-Jacques Gabriel, architecte du Roi, proposa d’aménager la butte de manière à établir à son sommet une esplanade circulaire pour accueillir la voie reliant la porte de Paris au pont de Neuilly par une pente régulière et harmonieuse au carrefour de celle reliant le village de Passy à Montmartre.

Entre 1768 et 1774, l’ingénieur Perronet fut chargé de diriger les travaux de terrassement nécessaires ayant pour effet d’écrêter la butte d’au moins cinq mètres afin d’en adoucir l’escarpement Jacques Hillairet nous dit,

«qu’on y employa tous les «pauvres valides» de Paris qui furent payés 15 sous par jour et un peu plus après 1772 «afin de ne point faire crier». Les terres enlevées servirent à remblayer les Champs-Élysées et à former les pentes de nos rues Balzac et Washington.»

«Le mur des Fermiers-Généraux la contourna par l’est, et la barrière de l’octroi, située avant dans l’avenue des Champs-Élysées, à hauteur de la commune de Chaillot (cf. avenue des ChampsÉlysées), y fut transférée avec sa grille, en 1787.»

Ce fut Claude Nicolas Ledoux (1726-1806) qui fut chargé d’édifier les bâtiments prévus pour le service de l’octroi, à l’emplacement du débouché actuel sur les Champs des rues de Presbourg et de Tilsitt, monuments ornés de colonnes annelées qui restèrent là jusqu’en 1860, année où l’octroi fut transféré à la porte de Neuilly, place de Verdun. La place de l’Étoile resta longtemps en chantier, les travaux d’aménagement traînant en longueur, bien que l’Arc de Triomphe ait commencé à y être édifié dès 1806.

 

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Dès le XVIIIe siècle, des idées avaient été agitées pour donner un couronnement à la colline, en clôturant la perspective. Dès 1758, quatre ans avant les travaux, un certain Ribart de Chamoust, membre de l’académie de Béziers, avait proposé d’élever à l’Étoile un éléphant gigantesque, dont le ventre contiendrait des salles de spectacle auxquelles on accéderait par un escalier dans une des pattes. Sa trompe servirait de fontaine et ses oreilles de haut-parleurs transmettant la musique d’un orchestre logé dans la tête. Le projet n’eut pas de suite, mais il est curieux de constater que l’arc de la Bastille et l’éléphant de l’Étoile échangeront leurs emplacements.

Les projets vont refleurir sous la Révolution, en particulier en 1798, quand le ministre de l’Intérieur François de Neufchâteau mit au concours une utilisation «monumentale» de l’Étoile. Un des concurrents proposa d’élever au carrefour une colonne de cinquante mètres. Le concours ne fut jugé qu’en janvier 1800, mais on ne se soucia pas d’exécuter le projet primé et le jury se contenta de décerner aux vainqueurs… une lettre de félicitations du ministre.

Autre projet, découvert par Albert Mousset, d’un nommé Payre, «savant et très versé dans les arts», qui écrivit à Chaptal en octobre 1801, «Le seul monument que je croirais convenable serait un arc de triomphe sur l’emplacement de la Grande Étoile. On surmonterait cet arc d’un char de la Victoire attelé de quatre chevaux, sur le devant de ce char serait figuré le Premier Consul tenant son épée d’une main et une branche d’olivier de l’autre, cependant que la Victoire ceindrait son front de laurier… À l’intérieur du monument, des tables d’airain rappelleraient les noms des batailles et leurs dates. Dans l’épaisseur des murs logeraient de vieux braves chargés d’expliquer aux visiteurs ces inscriptions et, éventuellement, de leur vendre une brochure résumant l’histoire du monument».

«Je suppose, conclut-il, un étranger qui vient à Paris. Apercevant un arc de triomphe magnifique, il presse ses pas, arrive, contemple dans tous ses détails ce monument pompeux, lit les inscriptions avec respect et avec une espèce de sentiment religieux, se les fait expliquer et croit entendre la voix de nos héros, achète le livre et serre précieusement son trésor dans son sein… Il marche à pas lents et arrive d’enthousiasme dans le pays des merveilles et, j’ose le dire, dans la capitale du monde» (Arch. nat., F121032, cité par A. Mousset, Petite histoire des grands monuments de Paris, Paris, 1949).

L’idée de l’arc était trop dans l’esprit de l’époque pour qu’il faille accuser Napoléon d’avoir repris le projet de Payre. Il est tout de même intéressant de voir un simple amateur exprimer une idée qui ne viendra que cinq ans plus tard à l’administration impériale. Le lieu choisi était donc assez désert, en retrait des deux pavillons d’octroi de Ledoux, un carrefour champêtre où se croisaient les chemins de Chaillot et des Ternes, avec quelques guinguettes où les promeneurs du dimanche venaient manger une galette arrosée de vin de Suresnes, mais près desquelles il valait mieux ne pas s’aventurer le soir.

 

Deux fois la taille de l’arc de Septime Sévère.

Les travaux furent, et c’était justice, confiés à Chalgrin, vieil architecte d’Ancien régime qui avait sous Louis XVI construit l’église Saint-Philippe du Roule et la tour nord de Saint-Sulpice, et sous le Directoire aménagé le palais du Luxembourg. On lui adjoignit le Toulousain Jean-Arnaud Raymond (1742-1811),membre de l’Institut et du conseil des bâtiments civils, qui collaborèrent jusqu’en 1808, et qui avait quelques années auparavant aménagé les salles de sculpture romaine du Louvre dans l’ancien appartement d’été d’Anne d’Autriche.

Les deux architectes commencèrent, dès le 12 mai, par creuser une «fouille» de cinquante-quatre mètres sur vingt-sept et huit de profondeur, opération qui devait précéder la pose de la première pierre. Celle-ci (Elle se trouve au centre du petit arc faisant face à Passy, recouverte d’une dalle de plomb), fut mise en place le 15 août 1806, date obligatoire, mais sans faste exagéré, l’Empereur, qui était à Saint-Cloud, ne s’était pas dérangé et la cérémonie eut lieu en présence de quelques officiels de second ordre, avec architectes, entrepreneurs et quelques badauds.

La presse, qui relate longuement toutes les réjouissances offertes ce jour-là au peuple, joutes sur la Seine, jeux de quilles et mats de cocagne aux Champs-Élysées, n’eut pas un mot pour cette piètre cérémonie qui marquait pourtant une naissance capitale pour Paris. Tout de suite, une petite guerre fut déclarée entre les deux architectes.

Chalgrin, qui avait pris le parti monumental d’une arche unique, afin d’éviter des passages hiérarchisés, avait d’abord songé à un monument orné de colonnes détachées, alors que Raymond, s’inspirant d’une réalisation de Palladio (Cf. la thèse non publiée d’Isabelle Rouge, L’Arc de triomphe de l’Étoile, 1998), préférait des colonnes engagées.

Napoléon soumit les deux projets à Pierre-François-Léonard Fontaine (1762-1853), qui lui conseilla de ne pas introduire de colonnes, allant dans le sens de la simplicité monumentale souhaitée par l’Empereur puisque l’arc avait pour fonction d’être vu de loin. Les colonnes auraient perdu de leur effet. Raymond se désengagea du chantier en 1808, en raison de ses nombreuses activités comme architecte des palais de Saint-Cloud, de Meudon et de la bibliothèque impériale des colonnes. Ce dernier écrivit sur le géométral, «Approuvé, sauf les ornements qui sont mauvais» (Le dessin, avec l’annotation, est dans les collections du Prince Napoléon).

Et le 3 mars 1808, au cours d’un Conseil tenu aux Tuileries, l’Empereur décrétait «qu’il sera élevé un arc d’une seule porte, à laquelle on donnera trente pieds d’ouverture sur chaque face. On devra faire en sorte que le monument ne coûte que deux millions, sans compter la dépense déjà faite» (Arch. nat., F13510 et 1147). De ce moment date la conception générale du monument, arche unique encadrée de piédroits ornés de reliefs, même schéma que la porte Saint-Denis, à laquelle Chalgrin, architecte d’Ancien régime, ne pouvait pas ne pas penser. A l’intérieur seraient «une salle voûtée, des salles annexes» et des vides réservés «aux escaliers et conduits». Qu’en coûterait-il ? 6 754 000 francs, prévoyait l’architecte (Arch. nat., F13203 et 206.), dont 1 470 000 pour la sculpture. Un premier crédit de 1 446 000 francs fut alloué en août 1808.

 

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Un an après la pose de la première pierre, les fondations descendaient à plus de six mètres (Elles iront à 8,37m. De gigantesques puits bourrés de pierres constituèrent une assise inébranlable sur cette colline trouée comme une pierre ponce. En même temps, Chalgrin menait de front la construction d’un autre arc, provisoire celui-là, à la barrière de Pantin, pour le retour de la Garde impériale le 25 novembre 1807 (Il est représenté sur un tableau de Taunay (musée de Versailles) et un dessin de Hennequin (musée de Bagnères-de-Bigorre), reproduits dans Société d’iconographie parisienne, 1932).

Mais l’entrepreneur, qui avait des difficultés à trouver de la pierre et des ouvriers acceptant de travailler en pleine campagne, renonça et on dut en chercher un autre. Ces retards inquiétaient le ministre, qui craignait les dépassements. Raymond, qui remplaçait Chalgrin, malade, s’efforça de le rassurer, le 9 mars 1808, «Nous nous empressons d’informer Votre Excellence que les résultats, devis, que nous avons eu l’honneur de lui remettre sont la suite d’un travail long et réfléchi. Si cette opération eut été l’effet d’un calcul précipité ou d’imagination, nous nous serions faits un devoir de le déclarer», (Cité par A. Mousset, op. cit.).

A le lire, on pourrait penser que jamais un architecte de France n’avait dépassé un devis. C’était le chant du cygne de Raymond qui, derrière le dos de son collègue ou profitant de sa maladie, faisait établir des fondations correspondant à ses projets à lui. Chalgrin, rétabli, se plaignit et Raymond dut se retirer en octobre 1808. Chalgrin présenta alors le 7 mars 1809, un nouveau projet pour un arc sans colonnes, à une seule arche, dont les piédroits recevraient des figures et trophées. Napoléon approuva, «Un monument dédié à la Grande Armée devant être grand, simple et majestueux, sans rien emprunter aux réminiscences antiques», ce qu’il avait reproché à l’arc du Carrousel. Comme souvent en matière architecturale, l’Empereur voyait juste. «Il avait de la répugnance, écrit Fontaine, à chercher le beau ailleurs que dans ce qui est grand, il ne concevait pas que l’on pût entreprendre de séparer l’un de l’autre». L’arc de l’Étoile sera sa meilleure réussite.

 

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Certes, le projet de Chalgrin s’écartait des arcs romains au plan de l’ornementation, mais plus encore sur celui des proportions. Si Percier et Fontaine, au Carrousel, avaient conçu leur arc de mêmes dimensions que ses modèles antiques, Chalgrin avait carrément visé au colossal, fixant des proportions doubles de l’arc de Septime-Sévère, le plus grand du monde romain, près de cinquante mètres de haut, contre vingt-cinq (Rappelons que l’arc du Carrousel tiendrait à l’aise sous la voûte de celui de l’Étoile). Et il eut incontestablement raison, le monument prévu était à l’échelle des Champs-Élysées et l’architecte avait aussi fait œuvre d’urbanisme bien inspiré. Le nouveau devis se montait à 9 132 367 francs (Arch. nat., F13499 et 510), et en cela Chalgrin ne prévoyait pas si mal puisque le coût total, après trente ans de travaux, d’incertitudes, de reprises, de contre-ordres, ne dépassera pas dix millions.

Chalgrin, en dépit de ses soixante-dix ans, resta donc seul à diriger les travaux, de sa manière bourrue et susceptible. Le Journal de Paris ayant publié une description «infidèle» de son projet, il en saisit aussitôt le ministre, «afin qu’à l’avenir un journaliste ne puisse rendre compte d’un édifice public sans y être autorisé et avoir communiqué son article à l’artiste chargé de la direction du monument» (Arch. nat., F131027).

La suite sur la seconde partie.