Il était peut-être stupide, en tout cas maladroit, de la part du dr Michel Dubec, toujours expert devant les tribunaux en matière d’application de l’ancien article 64 du Code pénal (démence au moment des faits) de faire le faraud devant un photographe du Figaro. Son appétence pour la notoriété (et les droits d’auteurs) lui valent des rappels, mais non point de revenir saluer sur le devant de la scène.

Divers destinataires, à la veille de l’ouverture des débats du procès à Tours de Véronique Courjault ont reçu le texte qui suit ou l’une de ses variantes…

Nous nous interrogeons sur la légitimité du témoignage dans l’affaire Véronique Courjault,en tant qu’expert psychiatre de renom, du docteur Michel Dubec, qui devrait  se présenter à partir du lundi 15 prochain à la cour d’assises d’Indre-et-Loire. Michel Dubec est en effet un expert que beaucoup considèrent illégitime en raison de plusieurs faits dont une condamnation définitive pour injures publiques à caractère racial, et des propos qui légitimeraient le viol, publiés dans son livre Le Plaisir de tuer, propos qui ont fait l’objet d’une pétition – signée par plus de 1350 personnes – à l’encontre de ce médecin  qui écrit, parlant du violeur et tueur en série Guy Georges : "Si un homme est trop respectueux d’une femme, il ne  bande pas." ; "Oui, c’était possible de s’identifier à ce
 violeur qui baise des filles superbes contre leur gré." ; "Jusque-là on
peut le comprendre, et même il nous fait presque rêver".

Par ailleurs plusieurs associations et familles de victimes ont porté plainte à l’Ordre des médecins. Quelques 121 plaintes sont en cours.

Notre sentiment est que le docteur Dubec n’est plus en mesure de donner à la Justice un avis crédible.

Ci-joints en pièces attachées les documents suivants :

 1) Les minutes de la condamnation définitive du dr Dubec, pour injures publiques à caractère racial, par le TGI de Paris en date du 15 février 2008 ;  

 2) Deux pages (dont la couverture) du journal France Soir en date de mai 2008, dans laquelle la journaliste fait le point sur la légitimité du choix du docteur Dubec au procès Fourniret, en rappelant notamment la pétition dont ce médecin « qui justifie le viol › a fait l’objet ;

3) La pétition qui a récolté plus de 1 350 signatures ;

4) Le droit de réponse publié dans l’édition du 3 juin 2009 du Figaro (page 11) ; 5) Une lettre au président de la cour d’assises de Tours ;

6) La plainte envoyée en nombre àl’Ordre des médecins.

Suit le lien vers un article en ligne de La Nouvelle République du Centre-Ouest, édition de Tours : http://www.lanouvellerepublique.fr/dossiers/journal/index.php?dep=37&num=1265557

 

Le problème, s’il en était, du docteur Dubec, n’est pas tant d’être ceci ou cela que d’être devenu, en quelque sorte, le chouchou des magistrat-e-s et des chroniqueuses et journalistes spécialistes des Assises. On le retrouve dans tous les grands procès où la question de la démence ou de l’irresponsabilité au moment des faits se pose. Pour un Stéphane Durand-Soufflant, spécialiste des affaires judiciaires du Figaro, mais aussi pour nombre de confrères et de juges, le dr Dubec est un peu du pain béni. D’une part, ses titres, ses ouvrages, lui confèrent une crédibilité augmentant de déposition en déposition. D’autre part, un nom connu de cinq signes seulement (d, u, b, e, c), c’est beaucoup mieux de Sigismond-Théodule Untel-Tartempion, parfaitement inconnu du lectorat. Et aussi, faut-il l’avouer, dans un procès d’assises, on s’ennuie parfois copieusement. La sérénité tourne au ronronnement des dépositions, parfois nécessaires, parfois incontournables puisque parquet, défense et parties civiles se sont plus ou moins accordées sur leur recevabilité (ou qu’elles aient été marginalement, mais indubitablement, été estimées nécessaires à la manifestation de la vérité).
Mais, hop, une expertise Dubec, et cela repart. Voici le jury, le ministère public, la défense, l’escorte, l’assistance, tout requinqués. Quand vous n’avez pas un Youssof Fofana, dit le tortionnaire d’Ilan Halimi, qui lance ses chaussures en direction de la magistrature, vous pouvez compter sur une déposition de Michel Dubec pour avoir des bons mots, des citations calibrées sur mesure et pouvant être reproduites telles. Hors audience, vous pouvez enclencher le curseur des micros et des magnétophones. On tourne, cela tourne… Faut-il le reprocher à l’auteur Michel Dubec, certainement pas. Ou à l’expert Michel Dubec ? En soi, absolument pas. Même Isabelle Horlans et Sandrine Briclot, de France Soir, tout comme les consoeurs et confrères sachant mettre en valeur Michel Dubec, trouveront auprès de lui la « viande » qui fait parfois défaut en d’autres procès ou circonstances…. Et cela donne . « Frantz Prosper et Michel Dubec ont mené divers entretiens avec le chef du « gang des barbares ». Leur rapport de 31 pages, que France-Soir s’est procuré, exclut tout trouble d’ordre psychopathologique ou psychiatrique ayant pu altérer son discernement. Son contenu éclaire cependant sous un jour terrifiant la personnalité de cet homme de 29 ans. ».
Exclure tout trouble, ou ne pas l’exclure mais conclure à la responsabilité cependant, c’est un peu le tout venant de l’expertise : que ferait-on si, en sus des prisons à construire, il fallait étendre Sarreguemines, Cadillac, ou doter de lits des unités de soins psychiatriques ? Sauf spécificité particuliure, quand la personne est un notable, qui pourra suivre un traitement à domicile, ne récidivera pas, les cas de démence sont rares devant les tribunaux. Ce n’est pas une opinion, c’est en général vérifié statistiquement. La statistique n’est pas plus une science exacte que l’est la médecine, fusse-t-elle psychiatrique, et dans un cas pareil, à chacun ses doutes, ses incertitudes. Ce qui est semble-t-il récurrent, c’est qu’un médecin tuant son épouse serait souvent, statistiquement parlant, plus dément qu’un ouvrier ou chômeur coupable des mêmes faits. Je n’affirme rien : les cas de médecins sont assez rares, ceux de gens de peu coupables des mêmes faits bien plus fréquents, et rapporter le nombre de cas aux populations socio-professionnelles respectives serait peu significatif. L’échantillon est trop restreint pour exclure un biais assez fénoménal.  Entre être indispensable pour la manifestation de la vérité et pour le bon fonctionnement de la société, il y a parfois un gouffre. Ce qui est sûr, c’est que, dès qu’une affaire est un tant soit peu médiatisée, ou revêt un caractère particulier (une personnalité en vue, un notable local), il sera fait assez souvent – c’est peut-être une litote, je n’ai pas vérifié – appel à l’expert Michel Dubec. Alors que les experts du cru, présentant des notes de frais bien inférieures, seront négligés. On le comprend lorsqu’il s’agit d’une notabilité qui serait susceptible d’avoir entretenu les dits experts à sa table ou d’un dangereux récidiviste à la tête d’une fratrie susceptible de se livrer à des représailles sur la personne des experts.
Cela étant, on peut se demander si, à compétences égales et notoriétés ou capacités de réveiller l’assistance bien plus égales que d’autres par ailleurs, on n’abuse pas du temps du dr Michel Dubec. Il serait moins dispendieux de le faire salarier par un HP parisien et de le cantonner aux affaires du ressort local. Il n’est pas plus diffamatoire de le penser que de l’écrire. Serait-ce dommageable pour la manifestion de la vérité ? Ce n’est pas à moi, ici, de l’écrire. Il reste licite de s’interroger, enfin, jusqu’à nouvel ordre ou ordre nouveau, comme on voudra…