Exaltée par l'Affaire Chantal Sébire et par le cas plus récent de Clara Blanc, l'opinion publique ne parle plus que de la future loi sur la "fin de vie". Faut-il accepter l'euthanasie ? Ou plutôt le suicide assisté ? Faut-il le refuser ? Entre discours médicaux et débats intellectuels, on avait oublié la position de l'Eglise, certes connue, mais qui s'était assez peu fait entendre, si ce n'est à travers les propos scandaleux du Cardinal Danneels, primat de l'Eglise Catholique de Belgique, qui avait osé affirmer durant son homélie de veillée pascale, qu'Hugo Claus et par extension Chantal Sébire, n'avaient pas eu une conduite "héroïque" et n'avaient fait que "contourner la mort"…

Un Cardinal très vite remis à sa place par l'association pour le droit de mourir dans la dignité, qui, à travers sa Présidente l'écrivaine Jacqueline Herremans a répondu qu'Hugo Claus n'avait pas "contourné la mort, mais l'a regardée droit dans les yeux". Les propos de l'écclésiastique avaient en effet créé un buzz et surtout un scandale, que le porte-parole des Evêques de Belgique avait tant bien que mal tenté de calmer, quitte à "interpréter" le discours du Cardinal.

En France, c'est le Cardinal André Vingt-Trois qui prépare la contre-attaque, suite à son discours d'ouverture de l'Assemblée plénière de la Conférence des évêques de France du… 1er Avril (et pourtant ça n'est pas une blague) à en croire Le Monde. Le prélat n'a pas hésité à parler d'une "campagne (…) orchestrée" dans le but d'obtenir un "permis de tuer". Le Cardinal a ensuite multiplié les adverbes comme "sournoisement", "honteusement" et "frauduleusement", pour parler de l'action de ceux qui veulent légaliser l'euthanasie, ajoutant que le travail des équipes de soins était "discrédité" et que l'euthanasie était montrée à tort comme un "progrès humain". Bref, un discours attendu et sans surprise.

Là où les choses deviennent plus surprenantes, c'est quand l'Eglise s'invite dans les discussions de la République, à travers le Cardinal qui affirme : "Si les évêques peuvent aider les parlementaires à une réflexion plus large, dégagée de la pression ambiante, cela peut faire avancer le bien commun" (sic) ! On en rirait presque ! Il est certain que la "neutralité" et le total désintéressement de l'Eglise dans cette histoire, seraient un "plus" dans une République laïque qui s'est séparée de l'Eglise depuis la loi de 1905. D'autant que l'absence de parti-pris de l'Eglise garantirait bien évidemment les parlementaires d'une quelconque "pression ambiante". Christine Boutin étant l'exemple parfait qu'une catholique pratiquante au pouvoir n'est absolument pas influencée dans ses choix politiques, par ses croyances. (Paragraphe à lire au second degré et avec beaucoup d'ironie).

Bref, l'Eglise nous propose un équivalent religieux de la Commission Olivennes : Demander à un acteur aussi engagé que possible de prendre une décision "neutre" qui engage la nation.

Le Monde n'hésite d'ailleurs pas à titrer que l'Eglise prépare son "lobbying".

Ces affirmations du Cardinal sont largement tempérées par les catholiques pratiquants eux-même, qui, selon un sondage Ifop pour le journal chrétien "La Croix", seraient 65% à penser que "les autorités religieuses ne devraient pas prendre position publiquement sur les grands enjeux de société".

Rappelons que l'Eglise avait eu la même le même "combat" contre l'avortement, contre la contraception et l'usage du préservatif, préférant sans doute les abandons et le développement des épidémies sexuellement transmissibles à des "progrès humains" en désaccord avec ses dogmes.