Une dette qui date

Après la Seconde Guerre Mondiale, l’Allemagne nazie vaincue, s’est vue obliger de devoir régler une facture colossale suite aux dommages orchestrés par un tel déversement de haine ravageant l’Europe. Une note se chiffrant à plusieurs milliards d’euros si on applique les taux de conversion actuels.

 

A cela s’ajoute de nombreux dommages occasionnés durant le  premier conflit mondial. La note n’est pas aussi salée et fut en partie réglée. Une décision prise lors du fameux traité de Versailles, qui au lieu d’être un signe de paix, fut en réalité une source de frustration et de vengeance envers un peuple allemand complétement annihilé par l’amertume et la détresse. Comment un pays au bord du gouffre pouvait il s’acquitter d’une telle tâche ?

 

Le 6 avril 1941, la Wehrmacht envahit la Grèce après une année de lutte acharnée. Hitler est rancunier et va faire payer cher cette offense. Jusqu’en 1945, les soldats nazis n’auront pas plus d’égard envers les grecs qu’ils n’en ont vis-à-vis des juifs ou des communistes. Le peuple grec fut asservi, une situation sans précédent depuis plus de 3000 ans. Au final, la Grèce a payé un lourd tribut humain, 70000 militaires et 52000 civils ont été tué, 100000 juifs déportés et 600000 personnes ont péri à cause de la famine. 

 

Durant cette sombre période, des fortes personnalités n’acceptant pas la fatalité décidèrent de résister à l’envahisseur. Des personnes comme Manolis Glézos qui, un jour empli de témérité, avec un confrère refusant lui aussi l’hégémonie du 3ème Reich, a trouvé la force nécessaire pour arracher violemment le drapeau à croix gammée flottant au vent de la mer Egée, accroché au symbole hellène qu’est l’Acropole d’Athènes. 

 

Un acte qui a laissé des traces et marqué tout un continent vivant sous l’oppression d’une tyrannie teutonne. Dans chaque pays envahi, des agissements similaires se multiplièrent. Le geste est emblématique, il n’aura duré que quelques secondes mais le message fut néanmoins passé. Les nazis, n’ayant pas un sens de l’humour très développé, l’arrêtèrent et le torturèrent maintes fois. Son combat, malgré son grand âge, il continue de le mener, défendant la liberté, il continue de s’indigner et de braver les gaz lacrymogènes dans une Grèce exsangue vivant au crochet de l’Union Européenne. Une Europe dominatrice, lui concoctant des plans de rigueurs et des cures d’austérité si drastiques qu’il devient impossible de vivre dignement.

 

Depuis quelques semaines, des milliers de grecs se massent devant les tribunaux pour porter plainte contre l’Allemagne. Des griefs émanant de personnes privées mais poussées à agir de la sorte par des préfets de province. Les remontrances ont même été portées jusqu’à la Cour Internationale de Justice de La Hayes. Les grecs demandent réparations pour la perte des proches et des dégâts subis durant la période où les bottes nazies ont foulé les terres égéennes. 

 

Une histoire de gros sous : 80 milliards de marks pour les nuisances provoquées entre 1914 et 1918. 523 millions de dollars pour l’entre-deux guerres. 7.1 milliards de dollars établis en 1946 puis 3.5 milliards de dollars quand l’Afrika-korps de Rommel a stationné ses troupes en Grèce, s’alimentant et utilisant les ressources nationales. 

 

Bien entendu, les allemands refusent et avancent comme motif la Conférence de Londres en 1953 où le sujet des dettes à payer fut renvoyé aux termes des discussions puis abandonné. Un pré requis de taille était nécessaire pour que ce futur accord soit valable, réunir les deux Allemagne. Une chose impossible pendant plus de 20 ans. En 1990, un nouveau traité vit le jour, Deux plus Quatre, un papier co-signé par les 4 vainqueurs de la guerre et par les deux Allemagnes désormais réunies. Le contrat stipule que l’Etat Fédéral d’Allemagne doit honorer les réparations par la gêne provoquée.  

 

Derrière cela, il n’y a pas seulement un aspect pécuniaire, mais aussi une dimension morale. L’Italie et la Bulgarie, elles aussi responsables de méfaits envers les grecs, ont corrigé leurs fautes. Seuls restent les allemands persistant à nier leur responsabilité.

 

L’Etat grec ne souhaite pas un gros chèque, même si cela lui permettrait de percevoir  plus rapidement la fin du tunnel, un long chemin jalonné de misères et de contraintes budgétaires, mais seulement des petits gestes. Des bourses pour les étudiants et chercheurs grecs afin qu’ils puissent faire des stages à l’étranger notamment en Allemagne. Le fait de pouvoir utiliser le savoir-faire allemand tant réputé pour sa solidité et son efficacité. Ou encore le financement d’infrastructures et des aides directes pour développer certains projets. Le tout devant être étudié collégialement et suivant un agenda  minutieusement préparé.  

 

Il est bon parfois de faire un mea culpa et d’avouer les fautes du passé. Même si la Grèce sait très bien que l’Allemagne ne paiera pas ses obligations, un petit signe de reconnaissance serait enviable. Si elle ne le fait, elle contribuera d’avantage à attiser une nouvelle haine envers sa nouvelle forme de dictature qu’elle au sein de la communauté. Un sentiment qui se manifeste par des athéniens osant brandir des pancartes représentant la chancelière vêtue d’un uniforme SS. On dit parfois que l’Histoire à une tournure cyclique, dans certains cas, il ne faudrait mieux pas. 

Une réflexion sur « Une dette qui date »

  1. Les Allemands sont, de tous les pays européens après la Seconde Guerre Mondiale, ceux qui ont le plus changé. Si vous en voulez une preuve, regardez comment l’Allemagne a organisé la Coupe du Monde de foot en 2006. Il n’est pas un pays qui put plus accueillant et plus chaleureux que les Allemands en pareille circonstance.

    Quant à la politique, il est certain que nul n’est parfait. Pas plus Angela Merkel que les autres personnes. Mais quant à la caricaturer sous les traits d’une SS, il y a des limites à ne pas franchir, surtout quand on a la prétention d’appartenir à l’Europe civilisée.

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