Folles de joie

Réalisateur : Paolo Virzi

Date de sortie : 8 juin 2016

Pays : Italie

Genre : comédie dramatique

Durée : 114 minutes

Budget : NC

Casting : Valeria Bruni-Yedeschi (Béatrice), Micaela Ramazzoti (Donatella)

La Villa Biondi, jolie demeure italienne, a été transformée en asile pour femmes souffrant de troubles mentaux en tout genre. Des patientes catatoniques, hystériques, dépressives ou encore paranoïaques. C’est ici qu’évolue Béatrice, la précieuse mythomane, « princesse » en robe légère de satin, sujette à des sauts d’humeur violents quand on la contredit. Elle s’ennuie ferme parmi les autres pensionnaires qu’elle considère comme ses sujets. Un jour, Donetella débarque dans son univers, sa curiosité est piquée au vif. Tatouée, la jambe cassée, rock’n’roll et suicidaire, Béatrice ne reste pas indifférente. Malgré les tensions du début, une amitié naît entre elles. Profitant d’une après midi de travaux agricoles à l’extérieur, elles filent à l’anglaise. 

Qu’il est agréable de voir le cinéma italien renaître après des décennies de coma. Les heures sombres avaient commencé avec la mort des maîtres dans les années 1980 suivie d’une grave crise économique et créative. La politique n’accordant plus, ou peu de crédit à la culture, préférant abonder le cinéma et la télévision de productions américaines. Fort heureusement, les temps ont changé et Folles de joie est un film brillant. C’est fin et subtil, drôle et émouvant, tout à la fois. Capable de bouleverser et de passer du rire aux larmes. Même si la première partie se passant dans la villa n’est pas dénuée de rythme ni d’intérêt, c’est clairement dans la deuxième phase que le film prend toute son importance. Il se transforme en road movie vécu telle une fugue, ressentie par les protagonistes comme une ode à la liberté, un pied de nez au système qui les a jugé folles. Chaque instant passé à l’extérieur de la villa est un instant gagné sur la vie. Pourtant cette demeure n’a rien d’effrayant, loin d’un asile d’Arkham avec son ambiance glauque et malsaine. Ici, la vaste propriété agricole est entourée de champs gorgés de soleil et une nature luxuriante, les patientes vivent en semi liberté, encadrés par un personnel soucieux et prévoyant. Comme lieu de rétention, il y a pire !

Folles de joie est porté par un duo d’actrices magnifiques. Valérie Bruni Tedeschi joue certainement un de ses meilleurs rôles au cinéma en beauté déglinguée, exubérante racontant ses histoires d’amours malheureux sans retenue, confondant réalité et fantasme. Une pétulance cachant en réalité une grande tristesse. Micaela Ramazotti quant elle, campe parfaitement cette femme taciturne et secrète. Même si tout les oppose, les deux « folles » se complètent, l’une est solaire, l’autre lunaire et elles partagent un passif douloureux. Si elles sont ce qu’elles sont cela est du à des histoires d’amours. C’est bien connu, ça finit mal en général. Celle de Béatrice n’est pas aussi glamour que prétendue, ressemblant plus à une passion dramatique et dévorante qu’à un amour idyllique. Le rythme du film est insufflé par celle de Donatella, progressivement son passé est raconté et la raison de sa détresse est expliquée. En réalité, elle ne sont pas aliénées, elles sont juste victimes consentantes d’une relation qui les a détruites. Si le fond est tragique, Folles de joie est bourré d’énergies positives et un plébiscite pour la deuxième chance.

Paoli Virzi après Les opportunistes en Lombardie, place l’intrigue de son film dans une Toscane de toute beauté. Le soleil, la campagne, la mer magnifie l’image. Folles de joie est un film où ça crie, ça rigole, ça se dispute jamais très longtemps, ça se rabiboche aussi vite, ça se hait, ça s’aime, les relations passent d’un extrême à l’autre mais Béatrice et Donatella sont comme deux soeurs en quête d’un renouveau.