A trop « tuer le père », le risque d’une société orpheline ? L’autorité en question

Récemment encore trois pères divorcés décidaient de se suspendre à la cheminée d’une usine près de Grenoble, exigeant des évolutions plus équitables dans leurs droits de visite et de garde d’enfants, suite à des divorces conflictuels. Elevés ainsi à plus de 70 mètres du sol, ils déployaient des banderoles proclamant « égalité parentale pour nos enfants, cessez de bafouer nos droits de pères » ou encore « nous aimons nos enfants, nous avons besoin d’eux et eux de nous ». Le « mariage pour tous » trouverait-il un nouveau prolongement ? Certains trouveront dans l’absence d’un père la solution possible. Le faux progrès épouse toujours la mauvaise foi.

A peine âgé de 27 ans l’un d’entre eux, Frédéric Foroughi, avait pareillement lancé une action semblable en Mai dernier, en arpentant le sommet de la Cathédrale d’Orléans. Des pères au Père éternel ? Parfois des faits divers raisonnent plus fort qu’il n’y parait de prime abord. Nous y reviendrons.  Quoi qu’il en soit, cet ancien assistant maternel réclamait déjà la «garde officielle de ses enfants » après que leur mère dont il divorça en 2011 soit  partie s’installer dans une région lointaine. Il était  accompagné de Rod Van Haute, père de trois enfants, divorcé en 2009, dont l’ex-épouse s’exila aux Etats-Unis avec son nouveau mari. Rod Van Haute bénéficiant pourtant d’un droit de visite logiquement régulier affirmait n’avoir pas vu ses enfants depuis plus de, six mois… Cette liste n’est pas exhaustive, la souffrance de bon nombre de pères reste proportionnelle à la courbe croissante des divorces.

Souvenons nous, de Nantes jusqu’à Strasbourg, en passant par Saintes, des pères lançaient déjà de pareils appels de détresse alors que les télévisions ne parlaient que de l’arrivée du pape François au Vatican.  Outre ce retour en force du Père Eternel à travers un nouveau pontificat « incroyablement » apprécié sur toute la planète, la paternité, mais plus largement la masculinité, l’Homme en tant que tel, toutes ces dimensions paraissent soumises à une étonnante dénégation « culturelle » au sein de la société occidentale. Dans le rejet parallèle de toute forme d’autorité, pendant que la « théorie » fallacieuse du « gender » fait ses premiers ravages, le genre Masculin n’a jamais autant été parasité dans tout ce qu’il représente. Du manque des pères au manque de repères, le risque d’une société orpheline ?

Alors que la thématique du « mariage pour tous » semble suspendue provisoirement ou durablement, voir si régulièrement des pères clamer ou réclamer le "droit à l’amour" dans la filiation, parle fort pour toute la société, au-delà de leurs cas personnels. Une permissivité légale tendant à abréger la fin de vie n’étant plus à écarter (les personnes âgées  ou trop grands malades ne seraient plus assez performants ou rentables),  la vie même n’en finit plus d’être menacée, notamment  par la désacralisation de la place de chacun, des enfants à la mère, jusqu’au père.  La recherche sur l’embryon pourrait pareillement effacer toute limite  dans le règne « progressiste » de la science sans conscience.  La « cellule souche de l’Humanité » qu’est la famille ou le couple procréateur ne mériteraient-ils plus aucune considération ? Le Marché ne tolèrerait plus que le Sacré maintienne l’Humain hors de ses critères et hors prix.

Pour peu que l’on pensa  vraiment que le Pape Benoît 16 se retira pour cause de fatigue insurmontable, sauf qu’il évoqua aussi une lassitude "Spirituelle", il n’en demeure pas moins qu’un combat plus vaste se déroule. Entendre l’ancien pape se mettant lui-même en retraite anticipée souhaiter de façon testamentaire que « l’Eglise revienne à Dieu le Père » n’eut rien d’anodin. Gardons que le « père » actuel de l’église reste un « bon candidat » (personne source d’audimat) pour les médias. Face à la science marchande, autant espérer que la théologie ne finisse pas seulement en bande dessinée. L’Eglise va-t-elle pareillement « tuer le père » ? A la Cour bon nombre de vieux prélats en soutane ne croiraient plus à grand-chose. Les confréries qui règnent ailleurs y feraient leur entrée en force. La relativité serait de mise ? Que dans la société de religion laïque obligatoire l’émasculation générale soit présentée comme un progrès ?  La supposée "modernité" devient le cache sexe du matérialisme athée, sonnant et, trébuchant. Cela pourrait exiger aussi une « sacrée » réorganisation de la maison « mère » Vaticaniste.

La famille épiscopale rentrerait-elle dans une phase de désunion conflictuelle ? Au détriment du Père ? Comme dans la société globale, l’espoir demeure en effet de voir émerger un « père » suffisamment réinstauré dans ses pleins droits et sa légitimité. Par sa renonciation et le vide transitoire qu’il liassa, Benoît 16 sembla   paradoxalement redonner force à la fonction du « père », pas seulement dans l’Eglise. Jusqu’ici le pape François parait ne pas craindre les forces politiques les plus volontiers castratrices du père. L’entendre appeler à remettre un peu d’âme dans les lois, voilà qui reste de bonne augure pour les futurs combats, autant politiques que spirituels, essentiels (euthanasie, recherche sur l’embryon, cellule souche, gpa et pma, etc). La crise occidentale n’étant pas qu’économique, il n’est pas exclu que le retour souhaitable du Politique incarne par la même celui de l’autorité. Dans certains pays, celui du père…de la nation ?

L’écho mondial de la renonciation de Benoît 16  autant que l’influence de son successeur  attestent  de l’autorité de cet Etat à visée pourtant, spirituelle. Certains médias n’ayant pour paternité que celle du Marché n’auront pu  éviter  de rendre compte du renoncement de Benoît 16  suivi du jaillissement  charismatique inattendu de son successeur. Le peuple agirait-il dans son rassemblement comme la dernière survivance de la paternité ? Les « progressistes » y verraient la menace du populisme. La disparition du père dans sa fonction symbolique et réelle irait de paire avec la négation du peuple ? La démocratie  en mère protectrice de la  paternité ?

Alors que l’autorité Vaticane à domina paternelle marque sa permanence au cœur d’un Occident tout occupé à vouloir s’en défaire (à la différence de l’Afrique, de l’Amérique Latine…), les sociétés, notamment la France, cherchent précisément à réduire  toujours plus ce qui incarne « le père ». Que le premier projet de Loi emblématique du nouveau pouvoir français porta sur la famille et ses cadres vécus comme « d’autorité » parle en ce sens. Le « pays des Droits de l’Homme » aurait-il un problème avec le statut de la masculinité ? La « fraternité » ne serait plus ce qu’elle fut, peut être.

A travers le "mariage pour tous", la structuration filiale axée autour du « couple souche » de l’Humanité  vint donc se dissoudre un peu plus, conjointement à l’accroissement des cas de divorces, l’émergence de nouvelles formes de « couples » sans capacité naturelle de descendance, la mono ou homo parentalité, bref, l’enfance rendue à elle-même ? A moins qu’elle ne soit bientôt vendue au laboratoire du coin. L’avenir verra t’il l’avènement d’une société orpheline ? Emasculée ? A chacun d’oser librement se poser la question.

A travers la procréation artificielle, l’homoparentalité effaçant de fait l’un des deux parents, la promotion quasi mercantile du "droit à l’enfant", la destruction du sacré, la Vie en tant que telle est en question dans sa permanence autant que dans sa valeur même. A travers la non primauté des enfants de part le règne des exigences d’adultes, la base de la société perd ainsi de sa résistance. Une société structurée en famille toujours plus décomposée ? Un retour salvateur du « père » et de tout ce que cette dimension incarne n’est pas exclu. Ces pères revendiquant leurs droits l’annoncent-ils ? La démocratie deviendra-t-elle à terme plus autoritaire pour sauver ce qu’il reste d’elle ? La juste et nécessaire autorité est aussi éloignée de la dictature, que la nation l’est du nationalisme.

Tous ces pères pionniers ou résistants de la première heure manifestant régulièrement pour leurs droits paternels légitimes, finiront par descendre de leurs grues ou cheminées.  Une question fondamentale restera néanmoins en suspend. Qu’une  société  se meure à trop vouloir « tuer  le père » ? Des cieux ou de la terre. Il n’y a pas de société sans une part de sacrée. Ces pères invitent aussi à reprendre de la hauteur, jusqu’à l’incarner dans leur mode de manifestation.  

Le premier père à s’être manifesté dans un usage parfait du pouvoir médiatique, Serge Charnay, resta le plus longtemps suspendu à sa juste cause. Que ses droits de garde et de visite aient pu lui être retirés par la justice sur des arguments qu’il persiste à contester aurait alimenté sa profonde rébellion. Il entendait dénoncer une "Justice sexiste". Mettant en avant le souhait légitime de l’égalité parentale entre hommes et femmes, cela souligne courageusement des excès liés à un certain groupe d’influence « intouchable » ayant  mené à une négation progressive de la paternité. Une future société infantile ou émasculée ? Du féminisme légitime à la féminisation absolue de tout et même, de tous ?  Rééquilibrer la société dans son fondement même.

Selon Fabrice Méjias, président de SOS Papa, association créée en 1990 pour la défense des pères divorcés ou séparés, les appels de détresse permanents de tous ces pères longtemps réduits au silence recouvrent  « une exaspération générale » affirmant que « nous sommes le pays des droits de l’Homme, mais la justice familiale française n’est vraiment pas un exemple". Il réclame depuis longtemps  « une stricte application de la loi, qui soit égalitaire et équitable ». En parallèle de la bisexualité souvent promue en modèle ou de la fameuse théorie du "Gender", difficile de nier que la gente masculine aura eue bien mauvaise presse depuis des années. La juste cause des femmes (égalité salariale, fléau national des femmes battues, etc) n’est pas à remettre en question pour autant.

Sans alimenter une opposition stérile entre hommes et femmes, rappelons que les femmes obtiennent très majoritairement la garde des enfants après un divorce. Selon une enquête récente de l’Insee ce fut le cas pour les 130000 divorces prononcés en 2012.  Plus des trois quarts des enfants mineurs résideront ensuite chez leur mère, seulement 8 % chez leur père. Selon la même enquête, plus l’enfant est jeune, plus il incombera à la mère d’en assurer la "parentalité". Certes, la Loi de 2005 voyant le consentement mutuel revalorisé aura permis que celui-ci l’emporte sur les ruptures conflictuelles, dont les enfants sont les premières victimes. L’actuelle ministre en charge de ces questions invitant à "développer la médiation" n’apporte rien de nouveau. En effet, les divorces par consentement mutuel représentaient 54% des cas selon une étude remontant à 2010, alors qu’ils étaient minoritaires  en 1998 (41%). La proportion des divorces "pour faute" est passée durant la même période de 42,2 % à 10 %. La pacification de la phase active de divorce permet un déroulement plus égal des procédures. L’application des sentences prononcées continue à contrario de poser problème, au détriment des pères.

Que le couple ait des enfants, ou pas, reste un facteur déterminant pour la qualité de la procédure de divorce. Chacun peut se réjouir qu’à la différence du débat sur le "mariage pour tous" voyant les enfants réduits à "des droits" comme il y en a en sécurité sociale ou routière, l’enfant resta jusqu’à ce jour le pivot des couples hétérosexuels. Ainsi, le taux de divorce par consentement mutuel était en 2010 de  59 % pour les couples sans enfant. Pour les couples avec enfants, les divorces s’orientent plutôt vers des rapports de force. En outre, ils s’étalent plus longtemps dans le temps. Les plaintes sont monnaies courantes après énoncé du jugement. Le "partage" des enfants et le paiement des pensions en sont les principales causes. En 2011, les tribunaux ont ainsi du faire face à plus de 60000 prolongements conflictuels. Les procédures furent largement en défaveur des pères. Pourquoi ? 

Selon une enquête de l’INSEE datant de la même année, un quart des enfants de moins de 25 ans issus d’un couple divorcé voient régulièrement leur père, une fois par semaine. Pour 22 % la fréquence des contacts tournerait autour de quelques fois, par an. Et 18 % affirment ne voir jamais…leur père. Comme l’affirme Fabrice Méjias « C’est un vrai fait de société ».

Pour peu que l’on ait suivi les débats sur le « mariage pour tous », voir deux ministres (Taubira et Bertinotti) soudainement contraintes par l’actualité à une prise en compte plus grande des pères, n’était pas sans avoir quelque chose de cocasse. Alors que le statut du père, fondamental selon tous les psychologues, n’aura cessé d’être bradé au rayon des vieilles lunes anachroniques, certains fossoyeurs du couple « traditionnel » se voient-ils appelés en pompiers à la rescousse des pères ? Il y aurait un peu partout bien des  pompiers pyromanes.

Ainsi, la ministre Bertinotti n’hésita pas à déclarer « qu’il faudra atteindre un équilibre quand les enfants se trouvent au cœur des situations de divorce ». Elle précisait qu’il sera indispensable de  « voir ce qui est le mieux dans l’intérêt de l’enfant ». Si dans le cadre du « mariage pour tous » l’enfant fut le grand ignoré, hormis l’évocation des progrès scientifiques liés à la « pma » (contraindre la Nature à « produire » les enfants qu’elle ne souhaita pas ?) ou « gpa » (prostitution de ventres maternels), le couple « souche » de l’hétérosexualité vient donc opportunément remettre l’enfant au centre de tout. Est-ce inconvenant de le noter ?  Cela ne réduit pas le respect requis pour les autres formes d’unions. Le retour du père ? Certains y voient le retour du Père. Une pensée interdite à l’heure de la religion laïque obligatoire, laquelle s’accommode parfaitement de « l’enseignement » du théorique gender dés le plus jeune âge.

La ministre de « la famille », notion évolutive (une de ses collègues se demandant « pourquoi il y aurait obligation à n’avoir que deux parents, et pas plus ? »), concluait une intervention face à la détresse des pères privés d’enfants en affirmant « qu’il faut garder le soucis de l’autorité parentale ». Il n’est pas certain que les dictionnaires s’y retrouvent pour ce qui est de définir le terme de « parents ». Gardons que selon la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, ce dernier à précisément « le Droit d’être élevé par ces deux parents ». Durant l’élaboration de cette Charte il était entendu qu’il s‘agissait d’un père et d’une mère. Le « progrès » aurait donc symboliquement à « tuer les pères » ? Une société émasculée serait en marche ?   Dans cette logique, toute idée de Père éternel serait à bannir.

Alors que le Pape Benoît 16, ancien « père » symbolique de l’Eglise annonçait sa renonciation, certains crurent que le ciel allait leur tomber sur la tête, au travers de la foudre inattendue observée ce jour là. Croyant ou pas, chacun gagnerait à suivre l’exemple du même Benoît 16, qui affirma n’avoir jamais voulu être « qu’un humble serviteur ». Que chacun retrouve un peu d’humilité et de discernement, notamment en matière de service de l’Etat. La Loi Humaine, celle de « la mère » Nature, n’aurait que faire des lois circonstancielles ou électoralistes de certains hommes, de passage.

Le droit à l’amour pour tous ? Il est sans restriction aucune. Le droit de chaque enfant à évoluer au contact d’un père et d’une mère aussi ? Qui ignore encore cette quête des origines marquant bien des enfants adoptés une fois devenus adultes ? Une loi ayant été votée en marche forcée, il serait désormais interdit en démocratie de poser encore ces questions ? Le  « peuple père » retrouvera t’il  prochainement son autorité souveraine ?  Les mères-veilleuses y contribueront à part égale, au service de l’Humanité, sans discrimination de qui que ce soit.

Pour ce qui est de la nécessité chère à Sigmund Freud de « tuer le père », laissons lui la "paternité" de cette formule. Chacun est libre d’y adhérer, ou pas, qu’il s’agisse du père éternel, de celui plus symbolique de l’église,  ou de tous les pères.

A trop détruire les racines et repères, à trop affaiblir l’autorité ou bafouer le statut du père, veillons à ne pas tendre vers une société orpheline.