Le loup de Wall Street, le film de Martin Scorsese

Aussi talentueux soit-il, Martin Scorsese semble s’être fourvoyé dans son dernier film, le loup de Wall Street. Mettre si haut la barre et ensuite retenir les spectateurs enfermés dans une salle pour ne leur servir pendant presque deux heures qu’une succession de scènes répétitives joliment filmées sans pour autant apporter la moindre consistance supplémentaire au film !Il est question de l‘adaptation de la biographie de Jordan Belfort, interprété par Leonardo Dicaprio. 

Après une brève expérience chez Rothschild, le courtier en herbe contractera le virus de la folie des grandeurs ; il y apprendra le b.a.-ba de cet univers impitoyable qu’est le milieu de la finance.  Une scène phare filmée avec virtuosité dans un restaurant huppé au cours de laquelle Jordan Belfort, ensorcelé, bénéficiera d’un cours magistral d’initiation au job de la finance, asséné par un maître de Wall Street ; l’objectif principal étant de délester avec subtilité les clients de leur propre argent afin de le transférer dans les poches du courtier, tous les moyens sont bons à être appliqués, le scrupule n’ayant pas de place en la matière : « on crée que dalle, on construit que dalle, le client ne doit pas être réel, il faut à tout prix réinvestir son argent, qui lui est virtuel, pendant que nous, les courtiers, nous sucrons en liquide ». 

Par la suite, secondé par Donnie Azzof, ( Jonah Hill), Jordan Belfort volera de ses propres ailes et montera sa propre boîte, Stratton. Totalement transcendé par sa passion, le loup de Wall Street subira une métamorphose fulgurante et entraînera dans son sillage, du mieux qu’il pourra, toute sa troupe. Une véritable secte machiavélique avec à sa tête un gourou sans foi ni loi, faisant presque de ses homologues des enfants de chœur !

Une fois tous les employés vaccinés contre la vertu, ils s’emploieront  avec brio à extorquer de leurs clients leurs économies souvent durement  gagnées. Déshumanisés jusqu‘à la moelle, ils se défoulent, se ressourcent, s’adonnant bestialement à la débauche absolue avec comme maîtres-mots, sexe, drogue, alcool. Jusqu’à la nausée. 

Une peinture éloquente de la déchéance est transmise par certaines séquences du film dont celle inoubliable, parmi tant d’autres, mettant en scène Jordan et Donnie entrain de sniffer une nouvelle drogue encore plus dure : la « lemon », ses ravages, réduiront Jordan en une forme de loque humaine ayant perdu l’usage de ses jambes et, rampante, bavante, se traîne pathétiquement jusqu’à sa puissante Lamborghini…

On en recevra plein les yeux tout au long du film, de ces scènes explosives de délire en plein Wall Street, d’orgies, de lancers de nains, de violences où toute notion de limite est abolie !Une forme de langage symbolique complètement noyé dans un assourdissant tintamarre. Après l’ascension au firmament de pacotilles surviendra la chute inévitable, amplifiée pour non collaboration avec le FBI ; prise pour « signe », la perte de Jordan sera convertie en rédemption, croit-on deviner…

La réalisation, les performances en particulier de Leonardo Dicaprio, de Jonah Hill, l’humour instillé de temps en temps en filigrane aident quelque peu à supporter les trois longues heures de ce film. En revanche le banquier suisse interprété à coups de grimaces par Jean Dujardin a fait bien pâle figure aux côtés de Di caprio. 

Quant à la soi-disant dénonciation de ce monde pourri de la finance dans le film, le résultat de la satire est plutôt mitigé. Le rêve américain lui, en aura pris au passage un sale coup… 

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