Selma, le film d’Ava Du Vernay

 

 

 

Selma retrace la bataille de la dernière ligne droite qu’avait livrée en 1965 Martin Luther King pour les droits civiques des Afro-Américains.Déclinée en une marche pacifique allant de Selma, ville emblématique du sud ségrégationniste  jusqu’à Montgomery, capitale devenue tristement célèbre depuis le boycott de ses bus, elle drainera quelques centaines de Noires. Conduites par le pasteur fraîchement auréolé de son Nobel, des foules silencieuses, dignes, devront subir l’ire de ces Forces de l’ordre dopées à la haine raciale.

En ce 7 mars 1965 le Pont Edmund Pettus est à cette Marche ce qu’est la Place Tian’anmen au Mouvemement démocratique chinois de 1989. 

Avec comme mots d’ordre, "négocier, manifester, résister", Martin Luther King, tribun incomparable, mènera sans démordre ce combat éprouvant sur plusieurs fronts, ralliant peu à peu à sa cause de plus en plus de personnes éprises de justice, d’égalité, de démocratie, indépendamment de leurs couleurs, religions ou races.

Que de larmes, de déceptions, d’humiliations, de peurs avant de convaincre le président Johnson d’accorder enfin ce droit de vote aux "Nègres", lequel sous la pression des ségrégationnistes espérait faire diversion en prétextant vouloir s’attaquer prioritairement au fléau de la pauvreté ! Autres temps, autres moeurs, la surmédiatisation de cette lutte, ses répercussions sur l’opinion publique ont toutefois contribué à la belle victoire de David contre Goliath. 

Une réalisation saisissante de cette page de l’Histoire toujours d’actualité qui rend un bel hommage à Martin Luther King. Les récents événements de Ferguson parmi tant d’autres rappellent que les acquis de cette"révolution" sont toujours fragiles comme l’a souligné Obama lors de la commémoration de cette Marche à Selma dimanche dernier et pour cause : indéfiniment rattrapé par son atavisme, ce pays exportateur invétéré de démocratie continue de se démener en dehors de ses frontières, au détriment de certaines de ses populations ; dans les années soixante, comme le martelait le pasteur,on se préoccupait du sort des Vietnamiens pendant que les Noirs américains devaient à tout prix courber l’échine…

Les interprétations sont fortes : David Oyelowo dans la peau de cet homme qui avait fait un beau rêve mais aussi  tous les autres personnages même les plus secondaires d’entre eux au charisme indiscutable. Belle bande originale sur fond de gospel et de hip hop.