Les têtes de la police et du renseignement vont-elles tomber ?

Ce matin encore, on pouvait penser que le nouveau ministre de l’Intérieur Manuel Valls se préparait à annoncer le limogeage des principaux responsables, à savoir Bernard Squarcini, patron du Renseignement intérieur, et Frédéric Péchenard, directeur général de la Police nationale. Le Ministre devait prendre un décret aujourd’hui. Mais cela n’a pas été annoncé au cours du Conseils des Ministres de ce jour. Il s’agit donc d’une rumeur pour le moment ! Peut-être que le ministre prend son temps, notamment pour trouver les remplaçants et que l’opération sera annoncée plus tard…

 

 

(capture d’écran sur le site Europe 1.fr)

 

 

Pour l’heure, on ne peut que rappeler dans quel état d’esprit était le candidat devenu Président de la République depuis… En février dernier, François Hollande avait protesté contre ce qu’il appelait « un état UMP » et contre "un vrai système en place au niveau du ministère de l’Intérieur". Il avait déclaré : "aucun de ceux qui aujourd’hui exercent des responsabilités et qui sont loyaux n’ont à s’inquiéter mais, en revanche, ceux qui sont liés à ce système auront forcément à laisser la place à d’autres". Les partisans de l’UMP criait alors à « la chasse aux sorcières » si le candidat gagnait l’élection ! (D’après Libération)

Un peu plus tard, en mars, François Hollande, avait montré du doigt Bernard Squarcini, parlant alors de « manquements dans le fonctionnement de la DCRI ». Pour Frédéric Péchenard, il avait été moins sévère, déclarant  "Il n’y a pas de raison, si les Français m’en donnaient mandat, de le renvoyer du jour au lendemain, mais il n’y a pas de raisons qu’il reste toute sa vie DGPN ».

Ce doit quand même être urgent pour le Ministre de l’Intérieur de remplacer les responsables du renseignement et de la police, parce qu’il a trouvé des collaborateurs qui sont tous issue d’une même filière dépendant fortement du Président précédent… Ainsi, on parle d’un clan Guéant. Celui-ci a été l’ancien patron de la Police nationale sous les ordres de Charles Pasqua et ensuite le bras droit de Nicolas Sarkozy. Cela faisait 10 ans qu’il gardait la haute main sur les désignations au ministère de l’Intérieur. Si on ne lui était pas affilié, on n’avait aucune chance d’être promu, selon « un grand flic ». Le Chef du renseignement est considéré comme un ami d’enfance de Nicolas Sarkozy et il a aussi la réputation d’être « un ultrasarkozyste » ! Il y a peu de temps, il a été mis en examen dans l’affaire des fadettes du Monde où il a tenté d’identifier des sources des journalistes. On lui reproche aussi quelques ratés dans l’affaire Merah de Toulouse. On lui prête l’intention de se reconvertir dans le privé dans la profession d’avocat, selon le Nouvel Observateur.

Quant’ à  Frédéric Péchenard, grand patron des policiers sous Sarkozy, on lui reproche d’avoir couvert quelques agissements du patron des renseignements… Il devrait passer dans un statut « hors cadre » qui pourrait lui permettre de rester chez lui à ne rien faire…

Le sort de plusieurs policiers estampillés 100 % sarkozystes est aussi en question !

Le Préfet de Paris, le Directeur du renseignement intérieur, le Préfet de la Seine-Saint-Denis, le Préfet de police de Marseille, le Préfet de Grenoble, autant de responsables qui pourraient être remplacés à leur poste dans les semaines ou mois à venir….

Du côté de l’opposition UMP, on ne se prive pas de crier « à la chasse aux sorcières », depuis plusieurs jours. Claude Guéant a dit qu’il redoutait cela. Cela pourrait au mieux  retarder un peu certaines opérations. Il faut trouver des remplaçants et trouver les points de chute des sortants…

Le départ des deux principaux responsables du renseignement et de la police pourrait être considéré comme un acte symbolique, mais pas seulement. La politisation de ces fonctions, comme d’autres, fait qu’on n’a plus affaire à des simples hauts fonctionnaires dont la tradition voulait qu’ils soient « neutres » et qu’ils servent l’Etat quelle que soit la couleur politique des dirigeants. Cette dernière semble bien dépassée. Comme aux Etats-Unis, le nouveau Président, lorsqu’il y a alternance, mettra en place sa propre administration, ce qui lui facilitera sa gouvernance.

En France, on ne peut donc s’empêcher de dire qu’on va « couper des têtes », mais il va peut-être falloir s’habituer au fait que l’alternance se fera régulièrement à l’avenir, même au niveau des hauts fonctionnaires de l’administration, bien que rien ne soit prévu sur ce sujet au niveau de la constitution et des lois. Il faut cependant éviter qu’une instabilité trop grande se crée au niveau des administrations. Il ne faut peut-être pas changer tous les responsables et tous les Directeurs, mais, difficile pour ces derniers de se montrer réellement neutres, ils sont pratiquement obligés de s’impliquer dans la politique de leurs ministres !