Le théorème zéro

Réalisateur : Terry Gilliam

Date de sortie : 25 juin 2014

Pays : UK, Roumanie, France,

Genre : Science-Fiction

Durée : 107 minutes

Budget : 6,5 millions d’euros

Casting : Christoph Waltz (Qohen Leth), Mélanie Thierry (Bainsley), David Thewlis (Joby)

Qohen Leth est un informaticien de génie, un être étrange, asocial, triste et accordant peu de valeur au bonheur. Son apparence révèle ce trait de caractère, des habits austères, mornes et sans fantaisie. Qohen a un but dans la vie, recevoir le mystérieux appel téléphonique qui donnerait un sens à l’existence. Un appel qu’il a déjà reçu mais dont la communication a été interrompue brusquement. Management, le grand manitou, celui qui dirige cette société totalitaire, le charge de découvrir LA réponse, celle solutionnant toutes les interrogations existentielles. Enfermé dans son étrange laboratoire, ses recherches seront sans cesse interrompues par les allées et venus de son superviseur Joby, le fils de Manager, Bob et l’intrigante Bansley, prête à s’adonner à des plaisirs «numériques» avec lui.

Le film possède une véritable identité, une esthétique déjà vu et déjà bien travaillée par Terry Gilliam dans ses précédents films. Notamment dans Brazil dont Le Théorème Zéro se veut le fils spirituel, une non-suite en quelque sorte. Un subtil mélange de burlesque et de monde post apocalyptique. Mais ici point de grandes tours en verre, de béton, d’ambiance froide, austère et sans fioriture, dans le futur à la sauce Gilliam deux mondes se télescopent. D’un côté les vestiges de notre société, avec du mobilier ancien, des façades en ruine ou presque, sur lesquels se superposent des écrans géants et des appareils high tech servant au contrôle du peuple par Manager. Des décors inspirés par les toiles des peintres Neo Rauch et Ukulele Ike et dominés par des tons rougeâtres, orangeâtres et rosâtres. Un mélange de steam punk, de pop colorée et de flashy kitch eighties. Ce monde est inquiétant, instable, comme dans 1984, on ne sait pas à qui se vouer, tout acte inconsidéré peut vous desservir. Un malaise accentué par la mise en scène, le réalisateur s’amuse à alterner plans larges et plans rapprochés, comme s’il dépeignait des portraits peu flatteurs avec des va et vient qui donnent la nausée. A cela s’ajoute des cadres pas toujours droits, en contre plongée latérales donnant à cette société future une forme de rêve malsain.

Bien que le scénario semble simple aux premiers abords, résoudre le théorème zéro soit une étrange équation prouvant que 0=100%, n’est pas une mince affaire. Gilliam apporte une réflexion sur le sens de la vie, doit-on attendre une hypothétique réponse venue de nulle part pour donner une direction et s’enrichir spirituellement ? Une réponse qui sortirait du combiné d’un téléphone, comme une révélation mystique. D’ailleurs Qohen vit dans une chapelle désaffectée depuis qu’un incendie et des procédures douteuses de dédommagement ont fait partir les religieux. Ou bien faut-il trouver la réponse par soi-même, par les actions que l’on mène et qui nous définissent ou alors par l’amour qui peut être une voie pleine d’enrichissement personnel. L’histoire laisse place à un grand nombre de questions. Si la première partie est rythmée, elle reste néanmoins brouillonne car il est difficile de pénétrer dans ce monde et faire connaissance avec les personnages. Le milieu du film se transforme en un huis clos dynamique grâce aux passages incessants des personnages secondaires. Malheureusement la dernière partie est  mollassonne et apporte une drôle de réponse à la quête existentielle. Bâclée, peu structurée, laissant perplexe, elle peine à convaincre.

Concernant le choix des acteurs, Christpoh Waltz n’est pas au top de sa forme, lui habitué à imposer sa présence, à exulter et dominer l’écran, il est ici morne et sans relief. Il subit ce qui lui arrive et surjoue les moments de folie, on est loin de ses prestations dans Inglorious Basterds ou Carnage. A l’inverse, Melanie Thierry est le plus convaincant des personnages secondaires, drôle, aguicheuse, mémorable dans sa tenue d’infirmière aux cheveux roses, son rôle est ambigu car est-elle vraiment là pour soigner l’âme de Qohen ? On notera tout de même la présence de Tilda Swinton en psychiatre numérique et de Matt Damon en maître du monde énigmatique et solitaire. Le Théorème Zéro n’est pas le meilleur film de Terry Gilliam mais il en garde la saveur et la signature.