Benazir Bhutto

Benazir Bhutto croyait aux signes du destin, à l’astrologie et aux devins. Les amateurs de prophétie relèveront sans doute que « la Sultane », qui avait échappé de justesse à un attentat-suicide le jour même de son retour – le 18 octobre 2007, après huit ans d’exil, un kamikaze s’explosait dans la foule de son premier grand rassemblement public à Karachi et tuait près de 150 personnes -, est morte pratiquement au même endroit que son père et mentor adoré, Zulficar Ali Bhutto.

Président de la république de 1971 à 1973, premier ministre de 1973 à 1977, le flamboyant Zulficar, renversé puis condamné à mort par Zia-ul-Haq, l’un des dictateurs militaires qui ont jalonné l’histoire du Pakistan, fut pendu le 4 avril 1979 à Rawalpindi, ville-satellite d’Islamabad, la capitale, à un jet de pierre du parc public où Benazir a finalement été assassinée par un autre kamikaze, le jeudi 27 décembre 2007. Elle aurait eu 55 ans le 21 juin 2008. Elle laisse derrière elle une fortune évaluée à plusieurs dizaines de millions de dollars, trois enfants, dont le plus âgé a 18 ans, et un époux malade après huit années de prison, entre 1996 et 2004, pour corruption. Elle laisse surtout un pays perclus d’avanies depuis sa création en 1947 dans la partie nord des Indes, et au bord de l’implosion.

Quelques dates

21 juin 1953 Naissance dans la province du Sind (Pakistan)

4 avril 1979 Exécution de son père à Rawalpindi

1988-1990 puis 1993-1996 Premier ministre du Pakistan

18 octobre 2007 Retour d’exil

27 décembre 2007 Mort à Rawalpindi

 Plus tard, la justice pakistanaise devra expliquer pourquoi celle qu’on appelait indifféremment « l’Héritière », « la princesse du Sind » ou simplement « BB », n’était pas, sachant les menaces qui pesaient sur elle, mieux protégée, mieux conseillée, mieux entourée par ses gardes.

Certains avanceront que la mort rôdait autour de cette femme d’exception depuis au moins vingt-huit années – mort de son père et début de sa carrière politique -, qu’elle y avait déjà échappé à plusieurs reprises et que, depuis sa condamnation à mort par tous les groupes islamistes, talibans, pro-talibans, djihadistes, pro-Al-Qaida, etc., qui pullulent au « Pays des purs » (Pak-i-stan en ourdou), ce n’était qu’une question de temps. Et d’opportunité.

« J’ai préparé ma famille et mes proches à toute éventualité« , confiait Benazir Bhutto juste avant de rentrer chez elle, en octobre. « J’ai mis ma vie en danger et je suis rentrée parce que je sens que ce pays lui-même est en danger », lançait-elle à son public énamouré quelques minutes avant de mourir. Présidente « à vie » du Parti du peuple pakistanais (PPP), la première formation politique nationale, fondée par son père, Benazir Bhutto avait toutes les chances de remporter les élections législatives du 8 janvier et de redevenir, pour la troisième fois de sa carrière, chef du gouvernement.

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