Tout sauf anonyme, de David Réguer (éds Anabet)

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C'est un essai assez bien documenté et habilement ficelé par David Réguer, l'un des animateurs du Blog 3.0, le blogue-notes du « club qui déshabille les trentenaires ». Il est consultant dans la com' et dispense des cours en rapport au Celsa (Sorbonne), pige dans Stratégies, bref, c'est un semi ou hémi anonyme, quoi ! Les trucs et astuces pour en sortir qu'il nous dispense ne suffiront pas, pour le moment, pour lui. Pour vous, à moins d'avoir un physique plus avantageux que lui ou une « gueule », de bon·ne·s assistant·e·s et un budget en rapport, vous pouvez zapper. Cela reste un bon tour d'horizon de la branchitude médiatisée actuelle. Alain Pacadis aurait apprécié, j'imagine. Wermus ne devrait pas tarder à nous z'« encauser » à son propos. Tout sauf anonyme (éds Anabet) devrait rester en rayon au moins un bon trimestre avant d'aller rejoindre le pilon des vanités.

Il ne m'en voudra pas, j'espère, d'avoir piqué un portrait sur la Toile et de l'avoir monté avec, en calque de fond, la une de couv' prélevée sur le site de la Fnac. Au départ, je suis allé agrandir la vignette sur le site des éditions Anabet. Franchement dégueu, le visuel, il était (j'en parle au passé car j'imagine que Maud Prangey, d'Anabet , saura y remédier). Alors, dans un premier temps, j'ai numérisé. Et je n'ai pas fait mieux, plutôt pire. Numériser du blanc, même si vous avez fait un point noir-point blanc (sur le rond noir du a d'Anabet, sur une zone blanche), c'est coton du temps des Noirs dans les champs. Au fait, comment réaliser un blanc au noir ou un noir au blanc via l'interface Joomla de C4N ? Je vous pose la question…
 
Puis je me suis demandé si Anabet était dépourvu de budget pour une quadri, optant finalement pour l'idée que mettre le photogénique David Réguer en une de couv' casserait le visuel de Lucile Adam. Un bon faiseur tentant de se faire passer pour un critique littéraire se doit d'assurer le service minimum et pratiquer le largage de patronymes (drop naming) pour obtenir un vrombruissage™ (buzz) correct à son petit niveau.
Mieux vaut aussi ne pas nommer « blogue-notes trois-zéro » le « ze blog tri-ziro », soit ce Blog 3.0 qui « déshabille les trentenaires ». Pourquoi ? Parce que – le répéterais-je jamais assez à Thomas Walter, euh, Walter Mathias, ah, zut, Mathias Walter –, « il n'y a pas de mauvaise publicité du moment que le nom est correctement orthographié », comme on le disait au cirque éponyme du sieur Barnum…
Plus porteur que le travail de fond…
 
En com', on peut avoir deux approches. Le « Cholet, ce n'est pas que la capitale des mouchoirs mais aussi… » de mes ex-homologues du service de presse de Cholet (ou de leur consultant·e), que l'on va essaimer tel le Petit Poucet sur des titres peu glorieux mais réellement diffusés, arrosant tant large que très ciblé sur la durée. Ou alors, comme à Trifouillis-les-Oies ou Belfort du temps où l'adjoint aux Finances y trouvait peut-être aussi son compte, on fait venir à grand frais pour les contribuables un Tour de France cycliste censé amener vers vous les télévisions. Coup de maître ou d'épée dans l'eau ? La sociométrie est encore balbutiante pour l'estimer. Disséminer sur la durée, c'est répandre des macarons , faire un coup, c'est bouffer en une seule fois tout le budget d'une pièce montée.
C'est aussi, surtout lorsqu'on délègue, la facilité.
David Réguer ne recule pas devant la facilité, et il a bien raison…
Facilité de lecture, d'abord. Car Réguer a, comme d'ailleurs Frédéric Beigbeder, un ton. Deux extraits pour vous en convaincre…
Se disant cuistre et fat (mais autrement), l'auteur va voir le collaborateur de Siné Hebdo, dit l'Entarteur.
– Je suis désolé. Un ouvrage pâtissier ne se commande pas. Il y a une liste et vous n'êtes pas dessus.
– Allez, lève-toi ! Lève-toi ! 133
– Pourquoi faire ?
– Lève-toi vite ! Lève-toi vite, ou je t'écrase la gueule à coups de talon !
– Mais enfin, arrêtez ! Vous n'allez tout de même pas vous entarter tout seul. C'est insensé !
BHL (ndlr. dit aussi BHV, dit aussi le derviche en extase de lui-même) aura cumulé un total de sept entartages. Bill Gates a eu le sien. Doc Gynéco aussi. Malgré ma détermination, Georges le Gloupier ne fera rien pour moi.
La note 133 rappelle que Bernard-Henri de l'Hôtel de Ville et de la place des Vosges (dite Royale) avait de la sorte interpellé Noël Godin en 1985, un peu comme un certain Nicolas Sarközy invectivait un pêcheur breton – et des Bretons, il n'en a cure, et ils le lui rendent bien – pour qu'il vienne voir s'il n'était qu'un nain.
Autre extrait, page suivante, soit la 126, du chap. 8, « Sacraliser avant de tirer sa révérence ». Je signale que ce choix est le fruit du hasard. J'ai renoncé à numériser moi-même la une de couv' quand j'ai vu apparaître toutes mes traces de doigts sur son blanc. Ce qui semble établir que j'ai tout lu ou que j'ai bien fait semblant. N'empêche, c'est dégueu et la retouche eût été trop fastidieuse.
 
« Je m'en souviens encore. Ce jour-là, une fan s'était immolée par le feu devant l'entrée de ma villa. (…) Cela peut vous paraître étrange, mais j'ai ressenti un plaisir infini que je n'ai pas osé avouer à la presse. N'est-ce pas une preuve d'amour extrême ? Cela m'a fait songer à mes concurrents, Mylène Farmer, John Lennon. (…) J'étais son petit ami, son frère, son père, je l'emplissais de joie ou de tristesse. Pour moi, ce geste grandiose fut une consécration. (….) J'ai même écrit une chanson.  Je suis certain que beaucoup me reprocheront cet engouement, mais pour rien au monde je ne l'aurais troqué contre le fanatisme de Nancy134, fan de Mylène Farmer. »
 
La note 134 renvoie à La Société des people, de Paris Hilton à Nicolas Sarközy, Royal, Hugues, Paris, 2008, Michalon.  Ce qui me permet opportunément de saluer amicalement au passage Gustavia Lashermes (la quintessence de la bellegossitude éditoriale, mais pas que…) et l'Éloge du miséreux de Mabrouck Rachedi.
Vous alllez croire que je l'ai fait exprès (voir supra au sujet du largage de patronymes).Tout faux ! Cela vient de me sauter aux yeux, et j'ai saisi au vol l'opportunité.
D'autres, plus feignants, plus conformes, mieux formatés…
Flammage et vrombruissage® étant les deux mamelles d'une bonne trolle, prenons-nous en à Jérôme Jouanno qui, dans l'attente d'un renvoi d'ascenseur de David Réguer, sur Le Blog du Club 30, balance de courts extraits. Comme me le confiait David Siegel, auteur de la police Tekton, gourou du Ouaibe graphique (celui du W3C), puis du Ouaibe mercantile (David, ce n'est pas grave, tout est pardonné !), circa 1994, « si cela les intéresse, ils lisent tout ! ». Oui, quelle que soit la longueur de la page, des extraits, les visiteuses et les visiteurs (non, pas Jean Reno et Christian Clavier) lisent tout-tout-tout comme si on leur parlait du zizi de Pierre Perret, du « Savoir le sexe » de Woody Allen.  Inutile donc, sauf à mépriser le visitorat, de se contenter d'extraits d'une ou deux lignes. Et encore, on pouvait mieux élaguer.
 
« je n'ai aucune conviction ou seulement a posteriori, si elle rencontre son public (…) si j’avais eu cette idée lumineuse, si j’avais eu le toupet d’Arash Derambarsh, dont le nom à lui seul demande des séances de média training (…) Je suis un bon et jeune papa, symbole de la génération trentenaire, actif et appliqué, alternatif et décalé, dedans-dehors j’adore, entrepreneur responsable, “ Ashoka connected ”. Mais ne vous bercez pas d’illusions quand je fais vibrer ma fibre alternative, “ No logo ”, je le vis principalement dans mon agence… ». 
 
J'admets que c'est plus aéré sur votre entrée de blogue-notes. Bon esclave du blanc, Jérôme Jouanno, pas du genre Nicolas Cirier de L'Œil typographique. Vous avez raison, cela doit être mieux rétribué (je ne vous dis pas que vous êtes suborné, stipendié, vendu ; c'est juste pour les moteurs de recherche que je cloute ce texte d'invectives, rien de personnel là-dedans).
Branchouille, mais nonobstant pédago…
Ne dites plus « pédago » mais « didactique ». Mais évitez les mots compliqués. Tutoriel, sept signes, vaut mieux que didacticiel, soit tout un firmament de signes à chasser en ligne suivante. Évitez donc les mots cuistres, du genre « nonobstant » quand un simple « mais » suffit. Théoriquement, il faudrait bannir au max' les notes de traducteur et d'auteur, sauf dans La Pléïade, où on vous recommande l'inverse. 
David Réguer nous gratifie de 142 notes de bas de page. Ainsi soit-il, tel est le nom du film. C'est Fareinheit 142.  Encore un effort pour arriver à 451 ou à 911 (écrivez 9/11). L'exemple même de ce qu'il ne faudrait pas faire. Eh bien, si. Cela ne rompt pas la lecture, cela l'allège, et on passe à la note à la fin du paragraphe. Vu le genre du récit (ce serait La Légende des siècles, du père Hugo, non, pas Pratt, Victor, cela friserait l'insupportable). Là, c'est fort bienvenu.
 
142 notes… Que dis-je, 143 avec ce renvoi après un chiraquien Pschitt. Un Pschitt qui vaut « Skip mousse peu pour laver mieux » et se défausser de ses responsabilités de financement occulte, de luxe de réceptions pour faire sympa auprès des corporations de commerçants et métiers de bouche, &c. La note 143 m'avait échappé.
143 notes, donc, pour 130 pages « utiles » (de texte hors hors-texte, table des matières, index, qui ne sont pas moins utiles), c'est un ratio de qui peut mieux faire.
J'espère lire de nouveau David Guerre-aux-faux-semblants, à la fausse notoriété préfabriquée. Réguer, anagrammé, c'est guerrier, n'est-il point ?
 
De quoi parlait-il déjà ?
David Réguer (ne jamais faire des coquillettes avec un nom de Zanpani ou ou de Crulustu-bien-descendu) vous entretenait de l'âpre négociation de l'accession à la notoriété. Feue Laurence « Lola » Ceuzin, ex-habituée de chez Castel, me disait qu'elle se mordait les ovaires d'avoir envoyé bouler Patriiiiiick (Bruel , celui de « déjà la rumeur court de ville en ville (…) combien de murs… ») et Frédéric de 99 Francs (dit Fred du Neuf-Neuf, du côté des Mascareignes, sans doute). Ils sollicitaient ses conseils, prêts, s'il l'aurait fallu, à faire une Star Academy qui n'était pas encore mûre. Ils débutaient dans la carrière, elle n'y est plus. Elle s'est quand même fait des gonades en or avec Mesguich (Daniel, dit le Souterrain). Moins rapide, mais plus durable. La pierre, la terre, ne ment pas, disait le Maréchal (non, pas Marcel, non pas celui de Boby Lapointe). De cela, justement, David Reguer en parle puisqu'il relève que tout pipeule peut se lancer dans n'importe quoi, la restauration, l'immobilier, la Nanard-Tapitude, ce que l'on veut (ou ne veut plus). Je ne sais plus si Lola avait ou non revendu ou gagé sa Rollex. Elle n'a pas atteint cinquante ans, ce me semble
David Réguer égratigne aussi le Charity Business. De fort juste manière. C'était mieux avant. Par exemple quand, sans le moindre photographe en vue, les Beatles venaient glisser en Rolls dans Drury Lane, les soirs de Noël, et déposer un gros chèque au Arts Laboratory. Je le sais parce que j'y étais, et ce fut trop furtif pour les photographier. Jim Hayes , chez qui Lola, avec feue Sandie Utley, du Tom Corraghessan Boyle's Reference Site, avait passé une soirée de Réveillon à Paris (non point à son domicile, où il organise ses dîners du dimanche, mais près du Pont-Neuf, rue de Nevers), le lui confirmait. J'ai oublié de lui dire que j'avais survécu à Londres en vendant The International Times (puis The Black Dwarf) à la criée. Chacun ses causes. Les plus désespérées ne sont pas les plus belles et Carla Bruni finira par nous gâcher le sida (application des chaps IV, Capitaliser ses erreurs en toute conscience, et VI, Faire parler de soi à n'importe quel prix).
Bref, devenu vintage sans avoir même eu le temps d'être has been, je tire ma révérence, en désacralisant un peu tout et le reste
Si j'étais consciencieux, je vous saisirait toute la table des matières.
Là, je pense aller voter Gaspard Delanoë (Pour une Europe de Gibraltar à Jérusalem). Comme je ne vous dis même pas où aller télécharger le bulletin de vote à imprimer, et qu'on ne risque guère de faire invalider l'élection de Gaspard à Strasbourg, et que C4N ne validera sans doute pas cette trop furtive, trop rapide, trop peu longuette présentation de Tout sauf anonyme avant 20 heures, ce dimanche 7 juin 2009, le risque est si minime qu'il passera inaperçu. Bref, un total contre-emploi, cette chute.
Je ferai mieux, avec une meilleure partition de notes de bas de page, la prochaîne fois !

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !