Les 8 salopards

Réalisateur : Quentin Tarantino

Date de sortie : 6 janvier 2016

Pays : USA

Genre : Western

Durée : 168 minutes

Budget : 44 millions dollars

Casting : Samuel L.Jackson (Warren), Kurt Russel (John Ruth), Jennifer Jason Leigh (Daisy Domergue), Walton Goggins (Chris Mannix), Michael Madsen (Joe Cage), Tim Roth (Oswaldo Mobray), Demian Bichir (Bob), Bruce Dern (Général Sandy Smithers)

2016 avait bien commencé, un nouveau film signé QT sortait sur les écrans, deux initiales pour désigner l’enfant terrible (devenu adulte depuis) du cinéma US indépendant. Un western, encore un. Et pourtant, il revient de loin, car cette 8ème réalisation pour Quentin Tarantino a bien failli ne jamais voir le jour. En 2014, son scénario avait fuité sur la toile engendrant la colère et la déprime du metteur en scène, il avait dit stop ! L’histoire était digne d’un thriller, six hommes de confiance dont une balance qui a cafté. Heureusement, une lecture publique à Los Angeles avec les acteurs principaux plus un emballement médiatique et le film est finalement mis en boite. Prêt à être projeté, pour notre plus grand plaisir (ou pas)? 

Oh que oui ! Le film est un brillant western, Quentin Tarantino connait ce genre depuis son enfance et il le maîtrise à merveille. Sous influence des séries des années 1960 telles que Bonanza ou The hHgh Chaparral et des grands classiques du thriller tels que 12 hommes en colère ou La cordeil nous livre un huis clos haletant où pendant plus de deux heures tout est confus, un vrai jeu de dupes, de poker menteur, que s’est-il passé dans la mercerie de Minnie ? Qui est/sont le(s) complices de Daisy Domergue ? Qui ment ? L’endroit est une vraie poudrière où la moindre erreur pourrait mettre le feu aux poudres. Heureusement un deus ex machina est là pour apporter toutes les réponses aux questions que l’on se pose et rebattre toutes les cartes que nous avions en main.

Les 8 salopards est un pur film tarantinien avec tous les différents éléments qui font l’ADN de ses 7 précédentes oeuvres. Le découpage en chapitres, peuplés d’individus charismatiques et volubiles racontant des histoires essentielles pour l’ensemble de l’édifice, parfois rocambolesques et à la limite de l’incroyable, des dialogues bien construits, pensés et justes, tellement qu’ils ressemblent à des pièces de puzzles s’imbriquant les unes dans les autres. La violence et la vulgarité sont bien présentes, elles reproduisent l’ambiance inhospitalière que devait être le Far West. A tout cela se rajoute les fixettes sur des objets pourtant anodins mais qui deviennent des instruments d’obsession. Tout cela sur le ton de l’humour et nourrit des réflexions sur les choses de la vie.

En plus de soigner son scénario, il peaufine la forme. Les musiques sont magistrales, bien choisies, bien exploitées, elles insufflent un climat de tension. Des morceaux composés pour la première fois par Ennio Morricone, avant il s’agissait uniquement d’emprunts. Les musiques d’extérieur sont angoissantes, puissantes, comme ce blizzard qui s’abat et coince nos protagonistes dans ce refuge. Pour renforcer cette appartenance aux années 1960, période faste pour les westerns, Tarantino a choisi de tourner en Ultra Panavision 70 mm. Un concept abandonné depuis près de 50 ans, ce qui est dommage car il offre un format large et une image de bonne qualité aux détails plus nombreux.

Les 8 salopards est surtout une réunion exceptionnelle d’acteurs talentueux. Des interprètes en majorité habitués au réalisateur, des retrouvailles en sorte. Samuel L Jackson est flamboyant, verveux, plein de dynamisme malgré ses 67 ans. Vif d’esprit, c’est lui qui mène le film sur ses épaules. Dire cela ce serait oublier les autres comédiens tous très efficaces : Kurt Russel en chasseur de primes un peu benêt, Tim Roth en bourreau sophistiqué, Michael Madsen en cowboy sentimental, Walton Goggins en shérif raciste puis Demian Bichir, le troublant remplaçant mexicain de Minnie. Chapeau également à la touche de féminité dans ce monde de mâles, Jennifer Jason Leigh, criminelle, raciste elle aussi, jurant, crachant et faisant preuve d’une grande virilité. Elle ne se laisse pas marcher sur les pieds.

La nouvelle production de Quentin Tarantino est de nouvelle fois une réussite. Bien construite, bien pensée, prenante, saisissante, les 8 salopards savent persuader. Que des signes rassurants pour la prochaine adaptation prévue au théâtre.